Le caftan marocain a été officiellement inscrit sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Cette reconnaissance internationale met en lumière l’objet en lui-même mais surtout les savoir-faire, les techniques et les connaissances des artisans qui le fabriquent et le transmettent de génération en génération.
L’inscription marque le début d’un processus de sauvegarde et de valorisation visant à protéger les artisans, à améliorer leurs conditions de travail et à encourager les jeunes à s’engager dans cette filière patrimoniale. C’est une étape majeure pour préserver et promouvoir un héritage vivant, reflet de l’identité culturelle et artistique du Maroc.
L’anthropologue Ahmed Skounti, expert consultant auprès de l’Unesco et membre de la délégation marocaine qui a défendu le dossier, revient dans cet entretien sur le processus d’inscription du caftan sur cette liste et sur l’importance de la sauvegarde de ce patrimoine vivant.
Le360: Comment s’est déroulé le processus d’inscription du caftan sur la liste représentative du patrimoine immatériel de l’Unesco?
Ahmed Skounti: Le Maroc a officiellement porté la candidature du «Caftan marocain: art, traditions et savoir-faire» en vue de son inscription sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. L’organe d’évaluation de l’Unesco a étudié la candidature dans le cadre du cycle 2025 et a recommandé son inscription, après avoir vérifié que tous les critères requis étaient satisfaits. Le comité intergouvernemental a ensuite validé l’inscription. Conformément aux procédures, les documents d’évaluation avaient été rendus publics quatre semaines avant la session du comité, confirmant ainsi l’avis positif de l’organe d’évaluation en faveur du caftan marocain.
Concrètement, que signifie cette inscription pour le Maroc?
L’inscription est un signal fort de reconnaissance internationale. Elle marque le début d’un travail de sauvegarde et de valorisation. Il s’agit d’améliorer les conditions de travail des artisans, de garantir la transmission des savoir-faire aux jeunes générations, d’assurer leurs droits sociaux et de maintenir la production sur le territoire marocain. C’est un processus long mais essentiel pour la pérennité de ce patrimoine vivant.
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Que recouvre l’appellation «Art, traditions et savoir-faire»?
Ce titre ne concerne pas seulement l’objet mais tout l’écosystème qui l’entoure: les savoirs, les techniques et les connaissances des artisans, hommes et femmes, qui permettent sa fabrication et sa transmission. L’objet seul n’existe pas sans ces savoir-faire et l’inscription met justement en avant ces pratiques et leur importance culturelle.
«Il faut que les artisans traditionnels bénéficient d’un cadre légal et social clair, pour que leur travail et leur savoir-faire soient protégés et transmis correctement.»
— Ahmed Skounti, expert consultant auprès de l’UNESCO
L’inscription garantit-elle la préservation du caftan?
L’inscription n’est pas une fin en soi. Selon la convention de l’Unesco, l’objectif premier est la sauvegarde et la transmission du patrimoine immatériel, le respect des communautés qui le pratiquent et la coopération internationale.
Le caftan n’est pas considéré comme menacé, contrairement à d’autres éléments inscrits. Il est important de protéger les droits sociaux des artisans, de valoriser leur travail et d’encadrer la production. Si la fabrication à l’étranger ne peut être empêchée, la protection de la propriété intellectuelle doit être garantie par un label dédié qui valorise les productions faites au niveau national.
«Il y a également un dossier prioritaire sur les Khettaras d’Errachidia, inscrit sur la liste nécessitant une sauvegarde urgente»
— Ahmed Skounti, expert consultant auprès de l’UNESCO
Ces dernières années, certains designers marocains ont modernisé le caftan pour la haute couture. Cela peut-il affecter la transmission du savoir-faire artisanal?
Les designers et artisans traditionnels peuvent coexister. L’important est de respecter les règles de propriété intellectuelle et de garantir que la production reste au Maroc. Il faut que les artisans traditionnels bénéficient d’un cadre légal et social clair, pour que leur travail et leur savoir-faire soient protégés et transmis correctement.
Le Maroc a-t-il déposé d’autres dossiers de candidature à l’inscription sur cette liste?
Le Maroc a déposé plusieurs dossiers: le oud, l’art du bâti en terre et la vannerie. La candidature des khettaras d’Errachidia a également été déposée pour une possible inscription sur la liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente.
Vous venez d’être nommé membre de l’organe d’évaluation de l’Unesco. Quel sera votre mission?
L’organe d’évaluation est technique et consultatif. Il aide le comité intergouvernemental à examiner les candidatures avant les sessions annuelles. Nous étudions chaque dossier en profondeur, individuellement puis collectivement et formulons des recommandations. Ce travail garantit que les décisions prises par le comité soient éclairées et objectives.







