En 2023, la ville de Rabat était désignée Capitale africaine de la Culture pour une période de deux années, au cours desquelles ont été organisées dans ce cadre d’importantes manifestations qui ont mis en lumière la richesse de la culture africaine. Dans l’intervalle, un accord portant sur l’établissement du siège du Comité des capitales de la culture africaine dans le Royaume était signé, le 10 septembre 2024, à Rabat, par le ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, Mohamed Mehdi Bensaid, et le représentant du Comité, également expert en culture et en arts auprès de l’UNESCO, Michel Saba.
En vertu de cet accord, il a ainsi été convenu que le Royaume abriterait le siège du Comité, conformément à la décision du Conseil exécutif de l’Union africaine (UA), tenu en juillet 2023 à Nairobi, en se basant sur le rapport du comité technique chargé de la Jeunesse, de la Culture et du Sport, relevant de l’UA.
Le 12 décembre 2025 a vu cette décision entérinée lors de la cinquième session du Comité technique spécialisé de l’Union africaine sur la Jeunesse, la Culture et le Sport, qui se tenait à Bujumbura, au Burundi. Ce jour-là, à l’issue d’un vote unanime, le siège des capitales africaines de la culture a officiellement été confirmé à Rabat, et a par la même occasion, a fait son entrée dans l’agenda africain de 2063.
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Après un retour au sein de l’Union africaine en 2017, suite à 32 ans d’absence, ce retour du Maroc en tant que locomotive de la diplomatie culturelle n’est pas anodin. D’autant que cette initiative qui s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la vision du roi Mohammed VI, qui œuvre avec et pour l’Afrique, en faveur d’une coopération Sud-Sud qui constitue l’un des piliers de la politique étrangère du Royaume, a ainsi été saluée par l’ensemble des pays de l’Union africaine.
Le sacre de la diplomatie culturelle marocaine
C’est au professeur Lupwishi Mbuyamba, qui dirige l’Observatoire des politiques culturelles en Afrique, qu’est revenue la tâche de présenter en séance plénière, aux ministres de la Culture des pays de l’Union africaine, un rapport élaboré par des experts dudit Observatoire sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du siège du Comité au Maroc. Comme pour l’inscription du caftan marocain sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité à l’UNESCO, la chose ne s’est pas faite sans remous en raison des crispations habituelles d’Alger, mais aura connu la même issue. En effet, malgré les réticences qui se sont élevées tout au long de ce processus, le vote a finalement récolté l’unanimité des voix, y compris celle de l’Algérie. Le comité a ainsi «félicité le Royaume du Maroc pour les progrès accomplis dans la mise en place du projet des capitales culturelles africaines et invité les États membres à soutenir l’initiative du Maroc d’accueillir le bureau des Capitales culturelles africaines dans le cadre de la mise en œuvre de l’Agenda 2063 de l’Union africaine».
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«Ce qui a été salué à travers ce vote, c’est le progrès de la mise en œuvre progressive de cette décision d’accueil et d’installation du secrétariat du siège au Maroc. C’est une grande faveur accordée par le Royaume à une activité qui concerne l’ensemble du continent», rappelle le professeur Lupwishi Mbuyamba pour Le360.
Le Maroc, laboratoire d’une politique culturelle africaine
Ainsi, c’est fort de l’expertise d’une politique tournée vers la culture –dont le sacre de Rabat en tant que capitale africaine culturelle a été l’un des aboutissements– que le Maroc s’apprête à accueillir le siège du Comité des Capitales de la culture africaine.
Et les avancées du Royaume en matière de savoir-faire et d’expertise sont nombreuses, à commencer par le développement des infrastructures culturelles, de la culture en général, mais aussi en termes de diplomatie culturelle. Outre la tenue de nombreux festivals d’envergure organisés par et au Maroc, le Royaume peut également accompagner les pays africains «dans la structuration, la faisabilité de certains évènements ainsi que le partage d’expériences et de savoir-faire», estime Khaled Tamer, cheville ouvrière et initiateur des capitales africaines de la culture. Et d’ajouter que si pendant des années, «nous avons fait appel à des structures européennes pour accompagner certains évènements, aujourd’hui le Maroc occupe une position cruciale pour accompagner le continent dans la structuration de la culture».
Le comité exécutif de ce bureau sera chargé tous les deux ans de choisir la nouvelle capitale africaine de la culture mais pas que. «Il s’agira aussi de l’accompagner dans sa structuration, dans sa politique culturelle», explique Khaled Tamer pour Le360.
De façon concrète, depuis Rabat sera ainsi promu l’accompagnement pour «la construction de musées, de médiathèques, de bibliothèque», poursuit l’expert culturel. Autant de démarches mises en œuvre afin, notamment, d’accompagner les artistes africains sur le continent pour mieux favoriser l’émergence d’un marché de l’art africain, mais aussi de structurer de nouveaux centres dédiés à la culture. Ainsi de la même manière que se sont imposées les capitales européennes de la culture à travers un programme lancé en 1985, c’est au tour des capitales africaines de briller en tissant entre elles, à travers le continent, un réseau. «Le fait d’avoir désigné Rabat capitale africaine de la culture a favorisé les collaborations avec de nombreuses structures africaines qui ont commencé à travailler avec la ville et le font toujours d’ailleurs. Désormais, les structures qui étaient tournées vers l’Occident se tournent vers l’Afrique», analyse ainsi Khaled Tamer.
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Certes, les chantiers sont nombreux mais la fonction de laboratoire du Maroc permettra la mise en œuvre d’une politique de développement continentale. «Nous veillerons à tout faire pour mériter la confiance qui nous est accordée, pour que cette promesse devienne réalité», insiste le professeur Lupwishi Mbuyamba en rappelant que «le développement de la culture à travers tout le continent participera au développement global de toute l’Afrique».
Quant aux risques de politisation de la culture dont l’UNESCO s’est fait le théâtre lors de la tenue de la 20ème session du Comité intergouvernemental pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel à New Delhi, début décembre, le professeur Mbuyamba se montre «très optimiste». En effet, affirme-t-il, «l’Afrique connait et apprécie le Royaume du Maroc. Nous avons des témoignages et des exemples de toutes sortes en ce sens, sans compter les nombreuses réalisations que le Royaume du Maroc a faites en direction de tout le continent africain et même en ouvrant ses portes à la jeunesse africaine. De nombreux jeunes du continent africain viennent au Maroc pour s’y former et s’y ouvrent à la culture. Nous avons vu comment tous ces jeunes rentrent heureux et plus compétents dans leurs pays. Ce sont eux qui font la plus grande promotion du Maroc, et des avantages que l’éducation et la formation qui leur y ont été dispensées au cours de leur séjour apportent à leurs pays respectifs. Il en sera de même pour la culture», affirme ainsi ce grand artisan de la culture au sein de l’Union africaine.










