L’effet Macron est devenu historique. Pas la peine d’égrener ici tous les discours de la presse nationale et internationale. C’est un fait, la France change et celui qui a réussi à concrétiser sur le plan politique ce changement, c’est Emmanuel Macron. Bien sûr, il a pour lui la jeunesse, mais que vaut cela sans l’intelligence profonde couvrant tous les domaines? L’intelligence doublée de bonnes intuitions et d’une immense volonté qu’on peut appeler ambition, sont les ingrédients de ce jeune homme, hier traité par les vieux routiers de la politique de «gadget qui ne passera pas une saison» et qui se retrouve aujourd’hui non seulement très largement élu, mais qui a su mettre son mouvement sur le chemin de la victoire. Ainsi, le président de la République aura une très large majorité pour gouverner et faire passer les réformes et les lois les plus urgentes et non moins difficiles.
On lui rappellera le taux historique de l’abstention (51,2 %). On lui dira que c’est une victoire illusoire. On ne va pas le ménager. Sauf que Macron est de cette trempe d’hommes, qui avance et n’est pas intimidé par les menaces d’une opposition sans merci.
Ce que nous pourrions retenir, nous autres Marocains, de cette expérience magnifique qui impose le respect et l’admiration est une leçon de civisme politique et de philosophie. Même si nos systèmes constitutionnels diffèrent, «la vague Macron» pourrait donner à réfléchir à notre jeunesse qui, jusqu’à présent, s’est méfiée de la politique et a laissé la chose à des gens dont les motivations ne sont pas toujours de grande qualité. Le phénomène de l’abstention se généralise et a pour conséquence la médiocrité d’une partie de la classe politique.
Macron va devenir synonyme d’ambition, d’audace, de courage et d’imagination fertile et sans tabous. Au Maroc, la société civile est importante. Elle travaille dans l’ombre et grâce à elle, le pays se modernise. Je pense aux associations qui luttent contre les violences faites aux femmes, contre les abus sexuels des enfants, contre l’esclavage des petites bonnes, contre les injustices dans plusieurs domaines dont souffrent les plus démunis. Macron s’est largement appuyé sur la société civile française pour réussir son projet. Il a mis par terre les vieux partis traditionnels, de droite comme de gauche. Il a renvoyé le parti socialiste à ses erreurs et à ses errances. Il a mis la droite républicaine en difficulté et il a même réussi à dégonfler l’arrogance du Front national qui aura dimanche prochain au plus 4 députés alors qu’il se présentait comme le premier parti de France !
Au Maroc on a vu aussi l’échec des vieux partis traditionnels, l’Istiqlal et l’USFP. La méthode Macron devrait faire réfléchir ceux qui veulent que le Maroc évolue, change dans le sens du progrès et entre dans une modernité donnant à la femme les mêmes droits que l’homme. Macron a fait de la parité une exigence absolue. Et il a réussi.
C’est maintenant que les bonnes volontés devraient entrer en scène et préparer l’alternance aux prochaines élections. Qu’elles abandonnent le vieux discours langue de bois et vieilles méthodes pour faire de la politique. Qu’elles donnent l’exemple d’intégrité, de transparence et de réelle ambition pour que le pays émerge de manière forte et légitime.
Macron ne s’est pas appuyé sur un discours religieux. Il ne pouvait pas le faire, étant donné que la France est un pays laïc. Mais que les nouvelles intelligences marocaines s’en inspirent et laissent la religion dans sa place naturelle, c’est-à-dire dans les cœurs et dans les mosquées.
Reste que le combat le plus difficile au Maroc est celui contre la corruption qui, loin de reculer, progresse et touche quasiment tous les domaines. Là, la détermination devrait être décisive. Pourquoi ne pas organiser une grande marche contre la corruption ? Car ce sont les plus pauvres qui en sont les grandes victimes. Que de pattes à graisser comme on dit vulgairement. Partout des mains se tendent, que ce soit aux tribunaux, aux hôpitaux, dans les administrations ou dans d’autres secteurs où rien ne s’obtient sans corruption.
Là, je ne sais pas si la méthode Macron pourrait nous aider. Le ministre de la justice, François Bayrou, a présenté un projet de loi pour la moralisation de la vie politique. Au Maroc, on devrait dans un premier temps réduire la circulation de l’argent liquide. On ne peut pas corrompre avec un chèque ou une carte de crédit. La banque est en droit de connaître l’origine de l’argent en espèces. En principe, les banques marocaines ont été alertées sur cette question. Mais la lutte doit être totale et sans concessions. C’est ce que le Maroc nouveau attend et espère.