Quel bonheur de revenir au pays! Quelles que soient les péripéties qu’on subit, les pépins aléatoires du transport, la nervosité de certains, la mauvaise foi des autres, on est heureux de retrouver la terre natale sous un soleil timide, attendant la pluie.
Justement, j’ai entendu des choses que je vous livre telles quelles:
– il nous faut de la pluie.
– La sécheresse menace.
– On attend et on prie.
Oui, mais, commençons par économiser l’eau, par faire attention à ce bien si précieux.
Pendant ce temps-là, l’affaire douloureuse du petit Rayan continue d’être commentée par les gens:
– le pauvre, à peine cinq ans!
– Oui, le Maroc a été cité partout dans le monde comme s’il avait gagné ou perdu la coupe du monde de football. Il a été cité en bien. C’est pas fréquent.
– Oui, Le petit Rayan est mort, c’est la volonté de Dieu, tout a été fait pour le sauver, pourquoi ne fait-on pas tout ça pour sauver des paysans qui ont des difficultés à joindre les deux bouts; pourquoi, ne se mobilise-t-on pas avec la même énergie et la même solidarité pour sauver de pauvres femmes qui avortent clandestinement au risque de leur vie?
D’autres:
– oui, c’est émouvant toute cette attention mondiale, allant jusqu'au département d’État américain qui envoie des condoléances.
Et puis la question de la sécheresse revient et préoccupe tout le monde. Il ne faut pas attendre que le manque d’eau fasse des ravages dans les campagnes pour se mobiliser et prendre cette affaire au sérieux au même titre que la pandémie.
Mobilisation générale pour ne plus gaspiller l’eau. Apprendre aux enfants que ce bien est précieux et qu’il ne faut pas l’utiliser n’importe comment ou oublier un robinet ouvert. Prendre une douche rapide plutôt qu’un bain. Certains golfs absorbent une quantité d’eau considérable. Ne faut-il pas les fermer en attendant la pluie? Il en est de même des piscines qu’il faut remplir puisque le soleil est là et qu’il fait chaud. Apprenons les gestes quotidiens qui nous font respecter cette denrée si importante. Une pédagogie pour l’eau est nécessaire. Or, si on parle de la menace de la sécheresse, je n’ai pas entendu dans les informations un appel à mobilisation pour utiliser l’eau avec parcimonie.
«L’accès à l’eau, est le début de la démocratie», a dit Nelson Mandela. Il avait raison. Que de conflits eurent lieu autour de cours d’eau.
Il est évident qu’au Moyen Orient, l’eau est un enjeu géopolitique important. On n’en parle pas beaucoup, mais il alimente le conflit israélo-palestinien. Il en est de même à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. Les réserves s’épuisent et les pluies sont rares. Les autres pays, notamment en Europe, ont mis en place une politique pour mieux gérer ce qu’on appelle désormais «l’or bleu».
Le règne de feu Hassan II a été marqué par la construction de plusieurs barrages. Le roi Mohammed VI a donné, dans ses directives, une priorité pour améliorer et aménager l’économie de l’eau. Le travail sur le dessalement de l’eau de mer est un chantier immense et coûteux.
Reste la pédagogie au quotidien à mener comme une campagne pour sauver les territoires agricoles et les paysans. Le drame du Maroc a été durant les années de grande sécheresse, l’exode rural vers les villes. Fuyant la misère causée par la terre sans eau, les paysans venaient en ville, démunis, sans travail et sans espoir. La grande vague de mendicité est due en partie au malheur de l’exode rural.
Prier est une chose. Agir sur la manière dont on peut économiser l’eau est une autre chose, plus urgente. Le Maroc a besoin de discipline, car en tant que nouveau pays émergent, il faut qu’il traite la question de l’eau avec autant d’exigence et de rigueur que le reste des politiques de développement. Habituer les citoyens, même quand les barrages sont pleins, à mieux utiliser l’eau. Changer ses habitudes et ne pas perdre de vue que l’eau, c’est la vie.