En 2004, l’écrivain israélien Amos Oz avait publié un petit livre, «Aidez-nous à divorcer». Il y exhortait l’Europe à aider le peuple israélien et le peuple palestinien à trouver une solution au conflit qui les oppose depuis plusieurs décennies. Il était l’un des fondateurs du mouvement «la Paix maintenant». Son cri, son appel urgent n’eurent pas de réponse. La situation n’a cessé d’empirer sur le terrain. Il est mort en 2018 sans voir ces deux peuples réconciliés et vivant en paix.
Si la tension actuelle entre l’Algérie et le Maroc se poursuit et s’aggrave, quelqu’un se lèvera un jour et lancera à son tour un cri: «assez! Faites la paix! Nos peuples ont besoin de vivre en fraternité et solidarité!»
Pour y arriver, on pourrait observer une période de silence. On arrête les menaces, les agressions verbales ainsi que les préparatifs à la guerre. On installe une sorte d’état d’indifférence jusqu’à ce que la raison triomphe.
Divorcer! Pourquoi pas?
Quand un couple va mal, il ne faut pas insister et croire que les choses s’arrangeront avec le temps. Cependant, il existe plusieurs formes de divorce: à l’amiable (c’est ce qu’il y a de mieux), à la guerre (c’est le pire). Toute séparation est un déchirement, un échec et parfois un drame aux graves conséquences.
Tous ceux qui ont opté pour la manière forte et agressive, l’ont regretté. Rien ne sert de détruire l’adversaire. La haine et la vengeance ne produisent rien de bon. La haine est facile. Le respect et la solidarité exigent un travail et un sens aigu de la responsabilité, de l’honneur et de la dignité.
En ce moment, l’une des parties ne veut pas entendre parler de divorce à l’amiable. Elle veut la guerre avec tout ce que cela comporte de destructions, de tragédies et de désespoir. Si par malheur, cette partie persiste dans son désir de guerre et va jusqu’à commettre l’irrémédiable, il faudrait un jour juger dans un tribunal international ceux qui auraient déclenché cette catastrophe. Les juger et les punir. Car, le Maroc n’a cessé, par la voix de son Souverain, de tendre la main et de réclamer l’ouverture des frontières et de travailler en commun pour le bien des deux peuples. Il n’a cessé de réclamer le dialogue, le retour à la raison. Le gouvernement a annoncé officiellement qu’il ne voulait pas de guerre avec le voisin. Il refuse de se laisser entraîner dans cette voix catastrophique pour tout le monde.
Cette sagesse ne trouve pas d’écho dans l’esprit embrouillé des généraux dont la légitimité est constamment contestée par les manifestants dans les rues depuis février 2019.
Comme l’a fait remarquer Luc de Barochez dans un éditorial du Point, «pour un régime en perdition qui cherche à resserrer les rangs de la population, rien de tel qu’un ennemi identifié pour jouer le rôle de bouc émissaire».
Ni le Maroc, ni la France, ni Israël ne sont prêts à jouer ce rôle. Les généraux n’ont qu’à se rendre à l’évidence et écouter la clameur populaire.
Le divorce ne signifie pas une rupture définitive, mais le dépôt des armes et le retour de la parole apaisée. Les deux peuples ont tant de liens et d’histoire en commun, ont une fraternité empêchée et qui ne demande qu’à exister, ont des projets et des aspirations quasi identiques qu’il faut les laisser se revoir, se rendre visite, vivre et construire ensemble un Maghreb uni, fort et crédible face à une entité européenne qui joue les uns contre les autres.
Imaginez ce que serait ce Maghreb, si la haine est vaincue, si les armes restent dans leurs hangars, si la volonté et la raison l’emportent sur la folie destructrice. Qui possède la clé? Qui pourrait calmer la hargne des généraux?
On remettra le dossier du divorce à des avocats sérieux et compétents. Ils trouveront la solution politique et pacifique à un conflit qui doit cesser.
Dans cette affaire, le Maroc ne peut compter que sur lui-même. La France qui jadis, s’est toujours tenue à ses côtés, a peur de l’Algérie. Une peur entretenue par Alger, laquelle ne cesse de culpabiliser l’ancien colonisateur. C’est ce que Macron a nommé «rente mémorielle». Bien dit, mais voilà qu’il fait marche arrière et calme la tension avec des mots sympathiques pour cet Etat.
Quoiqu’il en soit, un bon divorce vaudra mieux qu’une guerre aux conséquences catastrophiques pour tous les peuples de la région.