Et à la fin, l’amour triomphera…

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ChroniqueLe scandale sexuel dont tous les Marocains parlent a une morale: ce qui unit une femme à un homme, qui s’appelle l’amour ou le désir, et que certains s’amusent à appeler Satan, est plus fort que tout le reste. Qu’on se le dise !

Le 27/08/2016 à 19h50

L’histoire de Fatima et de Omar, les deux prédicateurs qui ont choisi (mais ont-ils vraiment choisi ?) de s’aimer envers et contre tout, est une sorte de miroir aux alouettes. Avec son mélange de sexe, de religion et de pouvoir, cette histoire attire tous les regards et se prête à toutes les lectures, des plus philosophiques (l’éternelle histoire d’une femme et d’un homme et des amours contrariées) aux plus paranoïaques (la théorie du complot et de la barbouzerie, éternelle elle aussi). C’est donc un miroir aux alouettes qui peut offrir tous les reflets possibles. C’est un piège aussi, mais alors un beau piège puisque chacun peut y trouver ce qu’il veut. Et si ce n’est pas ci, c’est ça. Essayez, vous verrez!

Si vous pensez que cette histoire n’est qu’une machination ourdie contre les islamistes pour les affaiblir à quelques semaines des élections, vous avez sans doute raison. Quoi de mieux, pour faire douter un parti et sa fabrique religieuse (le PJD et le MUR auxquels appartiennent Fatima et Omar), que d’amener deux prédicateurs hyper zélés à se faire hara-kiri en retournant contre leurs ventres les armes avec lesquelles ils menaçaient les autres ? Beau scénario, rien à dire! Bunuel et Bergman, deux cinéastes connus pour être de grands «amis» des religions, en auraient tiré des films joyeusement dérangeants s’ils étaient encore de notre monde.

Si vous considérez l’histoire dans son volet moral et religieux, vous avez toutes les raisons de vous arracher les cheveux. Les champions de la morale familiale et de la chasteté sont les premiers à les violer. Rt comment ? En s’aimant à bord d’une voiture, et à pas d’heure, comme deux ados pressés d’en venir aux faits !

Si vous êtes un monstre de cynisme que rien ne semble affecter, vous pouvez considérer cette histoire comme un gentil amuse-gueule destiné à occuper la populace et à animer une rentrée qui s’annonce molle. Là aussi, le scénario se tient. Vous pouvez même imaginer que le fait divers avec son mélange de sexe et de religion est un moyen efficace d’occuper (assommer ?) le commun des mortels pour de longues et interminables semaines.

Dans tous les cas, la morale religieuse, ce sacerdoce dont les prédicateurs se servent comme d’une épée pour faire régner la peur, est mise à mal. Elle est malmenée et battue en brèche. C’est rare. Cette bonne et vieille morale des familles a été supplantée par une autre morale beaucoup plus forte et beaucoup plus «vulgaire» : la logique de l’amour et du désir incontrôlable qui peut lier dans l’absolu une femme à un homme. C’est cet amour et ce désir, que certains (à commencer par le couple Fatima-Omar) appellent Satan, qui sort vainqueur de tout ce méli-mélo à la sauce marocaine.

C’est quoi, au fond, l’histoire de Fatima et de Omar? Enlevez le superflu, l’apparat, les titres, le timing, les théories, le carnaval! Que reste-t-il ? Une femme et un homme qui s’aiment et vont l’un vers l’autre, irrésistiblement, en toute heure et en tout lieu, et alors que tout, mais alors tout, les en empêche.

En réalité une belle, une très belle histoire.

Je vous le disais plus haut. Cette histoire belle et sordide à la fois est un miroir aux alouettes. A la base de ce piège, il y a un ingrédient et un seul : une femme, un homme et ce petit quelque chose que je vous laisse le soin de définir et d’appeler comme bon vous semble.

Bon week-end, amis lecteurs!

Par Karim Boukhari
Le 27/08/2016 à 19h50