Le décor est d’une affligeante tristesse, alors même qu’il s’agit là du plus emblématique des sites historiques de la ville impériale de Meknès. Jadis fierté de cette cité, et alors que son édification remonte au XVIIe siècle, à une époque où le sultan alaouite Moulay Ismaïl avait fait de Meknès sa capitale, le grenier immense de Hri Souani se retrouve aujourd’hui à l’abandon. C’est un euphémisme que d’affirmer qu’il s’agit là, ni plus ni moins, que d’une négligence criminelle.
Imaginez un peu: cet édifice, vieux de quatre siècles, qui avait été construit par Moulay Ismaïl, englobe d'immenses greniers, situés à 500 mètres du Palais royal de Meknès. Un fort constitué de plusieurs salles, dont la plus grande mesure plus de 26 mètres de long, 10 mètres de large et 9 mètres de haut, avec des murs dont l’épaisseur est de 4 mètres… Ce patrimoine, inestimable, est aujourd’hui ravagé, en jachère, à l’épreuve des aléas climatiques, et subissant la négligence des hommes.
C’est un lanceur d’alerte, un Meknassi jaloux du patrimoine de sa ville qui a dénoncé cette situation sur les réseaux sociaux, vidéo à l’appui. Le constat qu’il dresse est effarant.
«Avec un touriste étranger et un ami marocain, nous avons dû nous acquitter de 90 dirhams pour pouvoir visiter ce lieu. Une fois à l’intérieur, j’ai eu honte pour moi et pour le touriste qui nous accompagnait», résume-t-il d’emblée. Absence totale de personnel d’entretien, des vestiges (portails, moulins) jetés à même le sol, et, pire encore, des saletés diverses, des clôtures improvisées et indignes pour barrer certains passages et aucune indication. Tout cela, alors même que cet édifice, visité en moyenne par 500 personnes chaque jour, génère des recettes conséquentes.
Certes, de très timides travaux de restauration ont été entrepris. Mais en plus d’enlaidir le décor, ces travaux n’ont de «restauration» que le nom, puisqu’ils n’obéissent à aucune des règles en vigueur, régissant ce type d’entreprise, par essence délicate à mener.
Dans sa vidéo, le lanceur d’alerte en vient finalement à implorer une intervention royale, aucun autre responsable n’ayant jusqu’ici daigné bouger le petit doigt. Mais à qui la faute?
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Contactée par Le360, une source locale nous précise que bien que placé sous le domaine du Méchouar, Hri Souani est, à 100%, la propriété du ministère de la Culture. Joint par nos soins, le nouveau titulaire de ce poste, Hassan Abyaba, conseil de gouvernement oblige, à l’heure où nous mettions en ligne, est resté injoignable ce jeudi 14 novembre.
De son côté, le maire de la ville de la Meknès, Abdellah Bouanou, n’a pu que confirmer l’état désastreux dans lequel se trouve ce patrimoine national. «Nous avons attiré l’attention de l’ancien ministre de la Culture [Mohamed Laârej, ndlr] sur cette situation, mais il n’a donné aucune forme de suite à nos sollicitations. Actuellement, nous sommes en train de préparer une rencontre avec le nouveau ministre de tutelle pour rattraper les choses», promet le maire de Meknès.
En attendant, les visiteurs de Hri Souani, comme les touristes étrangers, ne peuvent que contempler, choqués, ce désastre. A l’instar de cette femme, qui, comme le montre la vidéo, a même failli glisser et tomber, tellement le sol est mal entretenu.










