C’est un réseau social qui ne cesse de monter en puissance depuis son lancement en 2016. Le principe est simple et son utilisation est très intuitive. Il permet d’enregistrer et de partager de très courtes vidéos de musiques, de danse, de sketchs, de maquillage, éventuellement avec "lyp sinc" (synchronisation labiale), sorte de doublage sous-titré ou non. On peut y ajouter des filtres et des effets de ralenti ou d'accélération.
Les vidéos défilent sur les écrans d’accueil de façon continue, le tout dans une ambiance détendue et amusée. Il n'est pas étonnant que l’application devienne une addiction pour la plupart des jeunes.
En peu de temps, la plateforme a connu une montée sulfureuse devant ses concurrents. Plus de 800 millions d’utilisateurs mensuels actifs ont été recensés en janvier 2020, soit le 7e réseau social le plus utilisé au monde, juste derrière Instagram (selon Hootsuite). Après le bannissement de l'application par l’Inde, qui représentait le tiers des téléchargements, ces chiffres seront revus à la baisse.
Cette course s’étend même sur le terrain où la start-up chinoise récupère dans ses rangs des ex-employés des deux grandes firmes technologiques de la Silicon Valley. En effet, selon une étude effectuée par LinkedIn, TikTok emploie actuellement sur le niveau international 172 ex-Googlers et 165 ex-Facebookers, incluant des cadres et ingénieurs emblématiques des deux firmes.
Cette bataille est menée à plusieurs fronts -même politique- entre deux pays d’une compétitivité historique: la Chine et les États-Unis. Ces derniers soupçonnent cette application d’espionnage, l'accusant de récolter des informations personnelles pour le compte du gouvernement chinois.
Le Secrétaire d’État américain Mike Pompeo a déclaré, au cours de ce mois à Fox News, que les États-Unis envisagent de bannir TikTok ainsi que d’autres applications chinoises. "Nous prenons cela très au sérieux. Nous y réfléchissons activement", a-t-il dit.
"C'est quelque chose que nous étudions", a lancé, de son côté, le président américain Donald Trump dans un entretien avec l'animatrice Greta Van Susteren.
Malgré la menace de la Maison-Blanche d’interdire TikTok aux États Unis, la plateforme promet d’embaucher 10.000 salariés sur trois ans pour consolider sa croissance, en capitalisant sur une offre salariale alléchante et d’autres avantages afin de garantir l’obtention des meilleures compétences sur le marché.
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Néanmoins, le fait d’interdire l’utilisation ou le téléchargement de l’une des applications les plus populaires au monde aux États-Unis serait un acte inconstitutionnel et se heurterait à la résistance de millions d'Américains, en particulier des jeunes, pour qui TikTok est devenu une forme d'expression culturelle et politique, selon les avocats de Electronic Frontier Foundation (EFF), un groupe de défense des droits numériques.
D'après des réactions rapportées par le New York Times, l'interdiction de l’application aurait plusieurs conséquences, notamment la perte d’amis virtuels qui constituent un véritable soutien et refuge psychologique.
Certains influenceurs, qui craignent la perte de leur business, ont déjà commencé à faire migrer leur communauté vers d’autres réseaux sociaux suite à cette éventuelle décision.
Aujourd'hui, TikTok se retrouve dans le viseur de plusieurs pays, à l’instar de l’Inde, qui a banni le mois dernier la plateforme afin d’assurer la sécurité et la souveraineté du cyberespace indien, et de Hong Kong où elle ne sera plus accessible en raison de la récente loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin. En France, Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté a convoqué le 30 juin dernier la direction de TikTok suite à plusieurs témoignages de harcèlement sexuel sur des jeunes filles.
TikTok, dont la maison-mère possède une application similaire sous un autre nom en Chine, a souvent été amenée à se défendre en affirmant ne pas partager des données avec les autorités chinoises et ne pas en avoir l’intention.
"TikTok est dirigée par un PDG américain, avec des centaines d'employés et de cadres (...) ici aux États-Unis", a déclaré un porte-parole du groupe, cité par l'agence Bloomberg.
"Nous n'avons jamais fourni de données sur les utilisateurs au gouvernement chinois et nous ne le ferions pas si cela nous était demandé", a-t-il ajouté.
Longtemps considérée comme une plateforme funny et sans problèmes, l'application fait couler beaucoup d’encre autour d’elle, car elle s’est politisée, devenant progressivement un espace de campagnes, de mouvements et de militantisme ainsi qu’une "arme diplomatique" qui dérange beaucoup de gouvernements et d’applications concurrentes...Affaire à suivre!