La commune de Bouznika, dans la province de Benslimane, a été secouée par une affaire de corruption et de falsification judiciaire d’une ampleur exceptionnelle. Deux conseillers municipaux sont accusés d’avoir falsifié un jugement afin de le présenter au gouverneur de la province dans le but de priver un autre membre du conseil municipal de son mandat. Face à ces agissements, le conseiller visé a déposé une plainte officielle auprès du procureur général du Roi auprès de la Cour d’appel de Casablanca, indique le quotidien Al Akhbar dans son édition de ce lundi 8 décembre.
Selon la plainte, les deux conseillers, Tarik Saadi et Mohamed Baia, membres du Parti du progrès et du socialisme, auraient falsifié un jugement rendu contre le conseiller de l’Istiqlal, Redouane Imou. Ils ont présenté ce jugement modifié dans une requête adressée au gouverneur de Benslimane pour demander la destitution de Redouane Imou, en prétendant qu’il avait perdu son éligibilité. L’accusation reposait sur l’idée que le jugement initial le déclarait inapte à exercer ses fonctions électives, conformément aux dispositions du droit électoral.
Dans son libellé, la plainte précise que le jugement original avait été rendu par le tribunal de première instance de Oued Eddahab le 9 mai 2013. Il condamnait Redouane Imou à six mois de prison avec sursis, une peine qui ne le prive donc pas de ses droits électoraux. Selon la plainte, les deux conseillers ont procédé à une modification du texte du jugement pour transformer la peine avec sursis en peine effective, dans le but de tromper les services administratifs et de provoquer la perte du mandat du conseiller concerné.
Une comparaison entre le jugement original et le document falsifié montre que la mention «avec sursis» a été effacée et remplacée par «exécutoire», précise Al Akhbar. Cette manipulation transforme ainsi le jugement en une condamnation à six mois de prison ferme. La plainte souligne que cet acte constitue clairement une falsification d’acte officiel, conformément aux articles 351, 354 et 356 du code pénal, et a été réalisé de mauvaise foi dans le but de nuire au conseiller visé.
Au-delà de la falsification, la plainte évoque également le crime d’usage de document falsifié, qui est réprimé par la loi pénale et peut entraîner une peine de cinq à dix ans de prison. Les accusés auraient utilisé le document falsifié en le présentant aux services compétents de la province et en sollicitant l’activation de la procédure de destitution à l’encontre du conseiller Redouane Imou. La plainte demande au procureur général d’instruire la police judiciaire afin d’entendre toutes les parties et de se rendre au service des collectivités locales à la province de Benslimane, où se trouve le document falsifié accompagné de la requête pour la destitution.
Cette affaire soulève également des questions sur la légalité et l’éligibilité au regard de la loi électorale. Selon la loi organique n°59.11 relative à l’élection des membres des conseils communaux, un candidat doit figurer sur les listes électorales générales. La loi n°57.11 sur les listes électorales stipule qu’une personne condamnée à une peine de prison ferme supérieure à trois mois pour un crime ne peut être inscrite sur ces listes. Cette interdiction n’est levée qu’après dix ans ou en cas de prescription de la peine. Or, dans le cas de Redouane Imou, le jugement initial avec sursis ne constituait pas un obstacle à l’exercice de ses fonctions, ce qui rend l’usage du document falsifié encore plus grave et manifeste.







