Les affaires d’agressions sexuelles sur enfants et jeunes mineurs se multiplient de façon inquiétante. Est-ce parce qu’il y a recrudescence des viols ou est-ce parce que les familles osent plus facilement aujourd’hui briser le silence et dénoncer ces violences ? Toujours est-il que le nombre et l’atrocité de ces drames ne permettent plus de parler de "faits divers", qui relèvent en principe d’événements ponctuels et isolés, mais de véritable mal social, si ce n’est de pathologie.
Le suicide d’Amina Filali, qui s’était donné la mort à l’âge de 15 ans pour s’être vue obligée d’épouser l’homme qui l’avait violée, avait déjà fortement bouleversé l’opinion publique et suscité de vives réactions. Les affaires d’agressions sexuelles sur enfants ne s’en sont pas raréfiées pour autant. Se sont en effet succédés depuis nombre de viols dont les victimes sont souvent des enfants en très bas âge, comme ce petit garçon de 5 ans violé dans une crèche casablancaise en février dernier. Sera révélé, plus récemment, à Tétouan, le viol de trois filles par leur propre père qui leur aura fait subir ces atrocités pendant des années avant d’être enfin écroué.
Ces viols ont marqué les consciences dans lesquelles resteront longtemps gravés, aussi, le nom et le visage de la petite Wiam, âgée de 9 ans, violée et défigurée à la faucille par son violeur, un père de sept enfants. Et ceci sans parler de toutes les tragédies qui restent tues par honte, par peur du scandale et du qu’en dira-t-on dans une société où, cependant, de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer l’atrocité de ces crimes, contribuant ainsi non seulement à sensibiliser les mentalités mais, aussi et par là même, à lutter contre les sentiments de culpabilité et de déshonneur auxquels se trouvent souvent confrontées les victimes et leur famille.
Colère à Mohammédia
Alors que la société civile est profondément touchée par le drame subi par Hiba et Jihane et encore sous le choc de l’affaire Daniel Galvan, un nouveau viol sur une petite fille de 5 ans a été révélé, à la veille de l’Aïd, dans la ville de Mohammédia où a lieu ce soir samedi 10 août un sit-in de soutien à la petite victime et sa famille. Sit-in demandant aussi à ce que tous les efforts soient déployés pour retrouver le criminel.
Contactée par Le360, Najat Aadil, présidente de La marche des femmes, rapporte en effet le viol de la petite Kawtar, viol perpétré à Karian Al Massira, un bidonville de Mohammedia habité par l’enfant et l’homme de 36 ans qui l’a agressée. Najat Aadil retrace les circonstances qui ont mené à cette nouvelle tragédie : "Le père de la petite fille, qui travaille dans un café, doit s’y rendre vers 15h pour la mise en place des tables, le nettoyage de la salle, avant le ftour. Kawtar suit son père qui n’y prend garde. A ce moment-là, un jeune qui travaille chez un voisin et habite dans un baraquement au coin de la rue la kidnappe et, la prenant sous le bras en courant, l’entraîne dans le parc Le prince, à Mohammedia, et la sodomise. Kawtar se débat, elle est couverte de blessures. Elle arrive à fuir une fois le viol commis et arrête une voiture sur le boulevard attenant au parc. Elle dit au conducteur qu’un monsieur tente de la kidnapper. Le conducteur la ramène dans son bidonville sans rien comprendre à la tragédie. C’est sa maman qui, après, s’est rendu compte, en voyant le sang couler, qu’elle n’avait plus de culotte. S’ensuit l’examen à l’hôpital, le certificat médical. Elle n’y passera pas la nuit et n’aura pas de suivi médico-psychologique. Plainte est faite au commissariat et chez le caïd. Le voisin qui employait le violeur est en détention, pour le moment".
La ville de Mohammédia est en émoi et en colère. Najat Aadil tient cependant à préciser que, contrairement à l’information relayée par certains réseaux sociaux, la baraque du violeur en fuite a été prise d’assaut par la police et non par la population qui, ajoute-t-elle, demande à ce que la sécurité soit renforcée dans leur ville pour que cessent ces atrocités et "pour que le drame de Meryem Benchik, la petite fille qui été violée et coupée en morceau l'an dernier, ne se répète pas".L’implication et la mobilisation de la société civile se sont affirmées dans ces affaires de viols sur enfants et feront peut-être désormais la différence.