Mariage forcé d’une mineure dans la province de Kénitra: la justice saisie

En 2018, selon le ministère de la Justice, les juges marocains ont délivré 26.000 autorisations de mariage à des mineurs.

En 2018, selon le ministère de la Justice, les juges marocains ont délivré 26.000 autorisations de mariage à des mineurs. . DR

Revue de presseLa diffusion sur les réseaux sociaux du mariage d’une mineure avec un homme plus âgé a provoqué une vive réaction des associations de défense des droits des femmes et de l’enfance. La Ligue Injad dénonce un contournement de la loi et appelle les autorités à intervenir pour protéger l’enfant et lutter contre la persistance du mariage des mineures au Maroc. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Assabah.

Le 11/11/2025 à 19h11

La diffusion sur les réseaux sociaux de l’information selon laquelle une fillette de 14 ans aurait été mariée à un homme plus âgé dans l’une des localités de Kénitra, au moyen de ce que l’on appelle le «mariage de la Fatiha», a suscité une vague d’indignation, indique le quotidien Assabah dans son édition du mercredi 12 novembre. Ce type d’union est perçu comme une manœuvre pour contourner la loi sous le prétexte d’une tradition, et représente un recul inquiétant dans le domaine de la protection de l’enfance et de la lutte contre le mariage des mineures.

Suite à la propagation de cette affaire, la Réseau de la Ligue Injad contre la violence basée sur le genre, composante de la Fédération de la Ligue des droits des femmes, est intervenue en déposant deux plaintes officielles auprès du procureur général près la Cour d’appel de Kénitra, du président du Parquet général et du procureur général près la Cour de cassation à Rabat. La Ligue a qualifié l’événement d’«acte grave et de violation flagrante des droits de la fillette», estimant que de telles pratiques exposent les jeunes filles à la violence précoce et les privent de l’éducation et d’une vie digne.

L’organisation, dirigée par Najia Tzerout, a appelé les autorités compétentes à intervenir immédiatement, à ouvrir une enquête approfondie sur les circonstances de l’affaire et à prendre les mesures légales nécessaires pour empêcher la concrétisation de ce mariage illégal, protéger l’enfant et garantir ses droits, tels que garantis par la Constitution marocaine et les conventions internationales ratifiées par le Royaume, relate Assabah.

Même si le Code de la famille fixe un âge légal pour le mariage et restreint strictement les exceptions permettant le mariage de mineures, les statistiques annuelles sur le mariage des enfants depuis l’entrée en vigueur de ce code en 2004 soulèvent de nombreuses questions. Le nombre croissant de demandes de mariage de mineures interpelle les autorités et la société civile sur les mesures à adopter pour freiner ce phénomène, compte tenu des conséquences graves qu’il entraîne: privation des droits fondamentaux, exposition accrue à la violence, hausse de la mortalité maternelle et infantile, et entraves à l’accès à l’éducation et à l’autonomisation des filles.

Selon le Conseil supérieur de l’autorité judiciaire, plus de 16.000 demandes de mariage de mineures ont été enregistrées en 2024, soit une baisse de 17% par rapport à 2023. Parmi elles, plus de 96% des jeunes filles concernées ne suivent aucune activité professionnelle. Le nombre de demandes de mariage de filles en dessous de l’âge légal est passé de 20.002 en 2023 à 16.501 en 2024, soit une baisse de 17,5%, tandis que les demandes de mariage de garçons mineurs ont augmenté de 190 en 2023 à 254 en 2024, soit une hausse de 33,68%.

Le taux d’acceptation des demandes de mariage de mineurs en 2024 s’est établi à 62,94%, restant stable par rapport à l’année précédente. Les données révèlent également que le mariage des mineurs reste particulièrement répandu parmi ceux qui ne sont pas scolarisés, avec 15.503 demandes émanant de cette catégorie, soit 92,53% du total des demandes enregistrées. Ces statistiques illustrent l’ampleur d’un phénomène qui continue de menacer les droits des enfants. Il est donc nécessaire de renforcer la vigilance et les mécanismes de protection pour garantir que chaque mineur puisse bénéficier pleinement de son droit à l’éducation, à la sécurité et à une vie digne.

Par La Rédaction
Le 11/11/2025 à 19h11