Lutte contre les criquets pèlerins: aucune infiltration massive signalée à ce jour

Un essaim de criquets pèlerins. (Photo d'illustration)

EntretienAlors que le Sud-Est a connu une légère résurgence, mais étroitement surveillée, du criquet pèlerin, le Centre national de lutte antiacridienne redouble d’efforts pour anticiper toute invasion. Dans cette interview, son chef, Badreddine El Guennouni, fait le point sur la situation, les risques, et les réponses mises en œuvre.

Le 12/04/2025 à 14h03

Le printemps 2025 a vu apparaître quelques groupes de criquets dans le Sud-Est. Rien d’inquiétant pour l’instant, mais les équipes de surveillance restent sur le qui-vive, assure Badreddine El Guennouni, chef du Centre national de lutte antiacridienne, dans cet échange avec Le360.

Le360: Quelle est la situation actuelle au Maroc?

Badreddine El Guennouni: Le criquet pèlerin, fléau historique, a connu une légère résurgence au début du printemps dans le Sud-Est. Des prospections menées dès la deuxième décade de mars 2025 le long d’Oued Draa (entre Assa et Tagounite) et au sud de Tafilalet ont révélé des groupes de criquets (individus solitaires ou en petits rassemblements) avec des densités allant de 5 à 400 ailés par hectare. Jusqu’à début avril, aucune infiltration massive n’a été constatée, même si la menace d’arrivée de groupes en provenance des zones limitrophes (frontières sud-est avec l’Algérie) reste présente.

Quelles provinces sont le plus susceptibles d’être touchées par des invasions acridiennes?

Les zones les plus sensibles incluent Aousserd, Boujdour, Es-Semara, Assa-Zag, Tata, Zagora, Errachidia et Figuig.

Comment les conditions climatiques peuvent-elles influencer la prolifération des criquets au Maroc?

Les conditions écologiques favorables jouent un rôle important dans le développement du criquet pèlerin. Les précipitations exceptionnelles enregistrées en septembre dernier, notamment dans le Sud-Est, ont créé des conditions idéales pour la reproduction du criquet pèlerin.

Dès novembre 2024, ces conditions favorables ont incité une transition du mode de vie individuel à un comportement grégaire, facilitant la formation d’essaims migrateurs qui, après quelques générations, se déplacent en fonction des courants de vent à la recherche d’habitats favorables.

Le Maroc est-il une zone d’invasion, de transit ou de reproduction pour les criquets pèlerins?

Le Maroc est principalement une zone d’invasion. Bien qu’il n’abrite pas d’aires grégarigènes pour anticiper un risque acridien de manière préventive (comme dans les pays de la ligne de front), certaines provinces sahariennes et au Sud-Est (le long d’Oued Draa jusqu’à la région orientale) abritent des étendues favorables à la reproduction hivernale et printanière. Cela souligne la nécessité d’une préparation en amont face à ce péril imprévisible. Toutefois, il y a lieu de rappeler que l’ensemble des mesures préventives et de surveillance a été dûment activé. Les services compétents, en étroite coordination avec les départements concernés, assurent une mobilisation complète des ressources et un suivi permanent de la situation, garantissant ainsi une réactivité optimale en cas d’évolution, comme à préciser le communiqué du ministère de l’Intérieur en date du 29 mars dernier.

Quels ont été les épisodes d’invasion marquants dans l’histoire?

Les premières mentions remontent à 1780, mais les données précises datent de 1914, le début d’un cycle qui s’est poursuivi jusqu’en 1919. Depuis, le Maroc a connu plusieurs cycles d’invasions majeurs (1914–1919, 1927–1934, 1941–1948, 1953–1961, 1987–1989, 2003–2005) entrecoupés de périodes de rémission ou de recrudescence moins étendues, notamment en 1951, 1968, 1974, puis des résurgences en 1993–1997, 2006, 2009, 2010, 2011, 2013, 2016, 2018 et 2023.

Par Hajar Kharroubi
Le 12/04/2025 à 14h03