De la haine

Tahar Ben Jelloun.

ChroniqueÀ la suite d’agressions répétées, diffamatoires, injurieuses et simplement haineuses à mon égard, parues dans un torchon algérien, j’ai décidé, non pas de répondre à l’individu qui les a commises, car mon mépris suffit, mais de creuser un peu la notion de haine qui semble habiter profondément ce type qui n’a même pas osé signer par son nom.

Le 12/08/2024 à 10h59

Ces agressions concernent aussi notre pays, son peuple, ses valeurs, son histoire et surtout son Souverain, injurié avec des mots de la pire espèce.

La haine est une maladie incurable. Pire que le cancer, elle est contenue dans le sang et le foie, le pancréas, le cœur et les poumons.

La haine est une malédiction portée comme un étendard de l’échec et de la détresse non admise.

La haine est un virus qui ronge tout le corps, à commencer par la tête.

La haine est un aveu de bassesse, de médiocrité, de pauvreté d’esprit, de stupidité et d’une absence totale d’intelligence.

La haine est une forêt dont les arbres ont été sciés à la base et empêchés de vivre.

La haine est une amie du vomi et de la charogne.

La haine se nourrit des succès des autres et transforme tout en rage et en cruauté.

La haine est une maison où le malheur s’est installé pour toujours.

La haine est un mur assez haut pour empêcher de voir le soleil, la lumière.

La haine est une échelle chancelante qu’on escalade pour voir le bonheur des autres.

La haine est une page froissée qui ne se tourne plus.

La haine est une route parallèle à la vie et aux valeurs qui font que nous soyons humains.

La haine ne connaît ni valeurs ni principes et encore moins de moralité.

La haine est une voiture accidentée où les rats de la ville et de la campagne ont trouvé refuge.

La haine sent encore plus mauvais que la merde, sauf que la merde est quelque chose de naturel.

La haine est une grande marmite qui bout tout le temps, renfermant les tripes de celui qui l’utilise.

La haine est une flaque d’eau morte remplie de microbes aussi dangereux que contagieux.

La haine est le visage de la peste et les mains du choléra.

La haine a une couleur: les yeux jaunes.

La couleur a un parfum: un mort en décomposition.

La haine a une voix: celle de la hyène qui mange ses petits.

La haine est un plat chaud mijoté avec le venin des vipères.

La haine est une table où les chacals s’impatientent de bouffer les testicules de l’être haineux.

La haine est une montagne d’immondices qui ont fermenté sous le soleil.

La haine est une prairie brûlée où plus rien ne pousse.

La haine est un portefeuille avec de la monnaie de singe.

La haine est profonde, sans limite, sans retenue, comme la bêtise.

La haine est un film d’horreur qui sort de l’écran et rejoint la réalité.

La haine est attachante, faisant partie intégrante de l’être qui la porte.

La haine n’a ni porte, ni fenêtre, ni vue sur la mer.

La haine est une prison où l’on est condamné à perpétuité.

La haine est une passion inutile, néfaste, souillée d’excréments.

La haine, contrairement à la vengeance, est une fièvre qui monte, monte, sans jamais être assouvie ni apaisée.

La haine est une erreur, une monstruosité inventée par la mort pour être son substitut.

La haine a les symptômes de la faim et de la soif au fond d’un puits sans eau.

La haine est un piège, un traquenard, une crevasse, une falaise au bout du néant.

La haine n’a ni amis ni complices. Elle s’étend comme de l’huile sur le feu.

La haine a perdu toutes ses dents à force de mordre dans le fer et l’argent.

La haine s’accapare l’oxygène des autres et les condamne à mourir étouffés.

La haine est un produit inévitable de l’envie et de la jalousie morbide.

La haine n’a absolument pas d’humour. Quand elle rit, elle rit jaune sang.

La haine n’a pas de contraire, surtout pas l’amour; elle n’a pas besoin d’un opposé.

La haine est un marteau-piqueur qui fait des trous dans la vérité.

La haine est un manteau gris qui nourrit les cloportes et autres parasites.

La haine, quand elle se regarde dans un miroir, elle le brise en mille morceaux.

La haine, quand elle éternue, ce sont des vers qui tombent de son nez et sortent de sa bouche qui bave.

La haine est l’ennemi traditionnel de la paix. Elle est la guerre, les massacres des innocents la font vibrer jusqu’à chuter dans le néant.

La haine, finalement, ne sert à rien si ce n’est à rendre l’être plus méprisable encore. Car la haine de soi est la pire de toutes.

Par Tahar Ben Jelloun
Le 12/08/2024 à 10h59