Il convient de comprendre comment est construit un rapport du SG de l’ONU sur la situation au Sahara pour se saisir du nombre de mains qui sont impliquées dans son élaboration. La plus grande partie du rapport est dédiée à un compte rendu des activités de l’envoyé personnel du SG de l’ONU, aux rapports de la MINURSO relatifs à la situation sur le terrain et aux propres rencontres du SG, ainsi qu’aux lettres qui lui ont été adressées. Vient ensuite la partie intitulée «Observations et recommandations», qui est du seul ressort d’Antonio Guterres, et qui sert habituellement de base au Conseil de sécurité pour établir sa résolution.
Il y a deux tonalités distinctes dans le dernier rapport d’Antonio Guterres sur le Sahara: une première où l’on reconnaît ouvertement l’apport du nouvel envoyé personnel du SG de l’ONU et une deuxième relative aux recommandations qui relèvent de la seule responsabilité de Guterres.
Disons-le sans attendre: la partie compte rendu, qui présente à plusieurs endroits une approche partiale, jure avec la partie "Recommandations" qui est impartiale. Avant d’étayer cette séparation des deux parties par des exemples, il convient d’attirer l’attention sur une manie du Polisario d'inonder le SG de l’ONU de lettres, dans l’espoir qu’il rende compte de leur contenu dans son rapport annuel. A ce sujet, le SG de l’ONU écrit dans son rapport annuel: «le Secrétaire général du Front Polisario m’a écrit à 16 reprises», alors que «les autorités marocaines m’ont écrit à cinq reprises». Encadré par Alger, la machine propagandiste des adversaires du Maroc tourne à plein régime et inonde le secrétaire général de l’ONU par des doléances, des jérémiades, une mauvaise littérature, à seule fin de la voir rapportée dans son rapport annuel.
Les indices de la partialité de KöhlerHorst Köhler a été très ému de sa visite dans les camps du Polisario. Il a lancé de grands trémolos dont le SG de l’ONU a gardé une trace dans son rapport: «la dureté des conditions qui règnent dans les camps et l’exaspération de nombreuses personnes, en particulier des femmes et des jeunes, face au manque de perspectives d’un lendemain meilleur, sont autant de souvenirs indélébiles que mon Envoyé personnel a gardés de cette visite». Köhler n’est visiblement pas au courant du numéro bien rôdé d’exhibitionnisme auquel se livre le Polisario chaque fois qu’il reçoit un hôte qu’il cherche à culpabiliser, à faire compatir et dont il provoque l'empathie. Le Polisario exhibe des enfants, des femmes éplorées, des animaux de compagnie qui n’ont que la peau sur les os, avec l’objectif de créer un sentiment d’insupportable chez les visiteurs. Espérons que Köhler sera moins dupe la prochaine fois et qu’une meilleure connaissance de la nature humaine réussira à effacer ce «souvenir indélébile».
Il y a plus grave: dans le dernier rapport sur le Sahara, le Maroc est sévèrement épinglé sur la question des droits de l’Homme. A ce sujet, le Conseil consultatif des droits de l’Homme (CNDH), qui était cité pour son indépendance dans le précédent rapport du SG de l’ONU, a disparu de l’actuel rapport. En revanche, la situation des droits de l’Homme dans les camps du Polisario est étrangement épargnée. On a presque envie de rire quand on lit cette phrase: «Les rares groupes locaux de défense des droits de l’Homme qui existent dans les camps de réfugiés continueraient à opérer librement, sans qu’il soit fait état d’entraves».
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Comment Horst Köhler a-t-il pu ignorer la chape de plomb que le régime algérien et le Polisario font peser sur les camps à l’est du mur de sable. Aucun mot sur les ségrégations raciales, l’esclavage, la traite humaine qui sont dénoncés par la presse même du Polisario. Combien de fois, la presse séparatiste ne s’est-elle pas émue des discriminations dont sont l’objet les personnes de couleur noire. Dans un article récent, l’un des sites les plus proches de la direction du Polisario faisait part de l’émoi de dizaines de mères qui voient leurs enfants éliminés des programmes de vacances en Espagne pour la seule raison qu'ils ont la peau sombre. Les enfants dont la peau est claire sont privilégiés et sélectionnés dans des programmes chez des familles d’accueil espagnoles, alors que les enfants bruns ou noirs sont cantonnés à des colonies de vacances. Une mère s’écrie: «on dénonce cette sélection suivant la couleur de la peau des enfants!» Comment Horst Köhler peut-il ignorer le cas de plusieurs dizaines de jeunes femmes sahraouies, venues d’Espagne pour passer quelques jours dans les camps, et qui ont été séquestrées? L’agence de presse espagnole EFE rend compte régulièrement du désarroi et de l’impuissance des parents adoptifs espagnols de ces jeunes femmes, maintenues prisonnières avec la complicité du Polisario. Le cas le plus emblématique est celui de Maloma Morales qui, désespérée de ne pouvoir rentrer chez elle, a tenté de se suicider en absorbant du poison pour rat.
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Au lieu de dénoncer cette réalité d’un autre âge et les inégalités flagrantes entre hommes et femmes, Köhler nous laisse supposer une situation idyllique des droits de l’Homme dans les camps. Ou bien Horst Köhler est crédule au point de prendre pour argent comptant le numéro sur la parfaite égalité des genres et du respect des droits de l’Homme dans les camps du Polisario. Ou bien, il a un schéma préétabli et s’aveugle sur ce qu’il ne veut pas voir.
A l’est du mur de sable, les ténèbresLa MINURSO ne se sent pas en sécurité à l’est du mur de sable! Cette menace à l’est occupe une partie importante du rapport du SG de l’ONU. «À compter du 1er juillet, en raison d’une menace directe d’enlèvement contre le personnel international reçue fin juin, les patrouilles à l’est du mur de sable ont été limitées à un rayon de 100 kilomètres autour des bases d’opérations», lit-on dans le rapport. En revanche, «Les patrouilles normales se sont poursuivies à l’ouest du mur de sable», c’est-à-dire au Maroc.
Et de poursuivre: «A l’est du mur de sable, la menace terroriste, évaluée à partir des menaces directes reçues au cours de la période considérée et antérieurement, a été jugée élevée.» On peut légitimement se poser des questions sur les objectifs d’intimidation et de menace qui ont ciblé les membres de la MINURSO. Est-ce pour les empêcher de prendre connaissance de ce qui se passe sur le terrain?
En tout cas, c’est sans doute pour cette raison que le porte-parole du SG de l’ONU a affirmé, le lundi 2 avril, en réponse à une question sur la présence d’éléments du Polisario dans la zone tampon, que «nos collègues de la MINURSO n’ont observé aucun mouvement d’éléments militaires dans la zone tampon».
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Il est difficile pour la MINURSO de prendre connaissance des mouvements des éléments du Polisario, du moment qu’elle a réduit son périmètre d’action et qu’elle ne patrouille plus la nuit. Le porte-parole du SG de l’ONU aurait pu apporter cette précision dans sa réponse.
Les recommandations impartiales du SG de l’ONUDans la partie "Recommandations", la plus importante dans le rapport du SG de l’ONU, le ton change. Si dans le compte rendu, le Maroc est pointé du doigt sur le respect des droits de l’Homme, alors que les camps du Polisario sont dépeints d’une façon étonnamment naïve comme exempts de toute violation des droits de l’Homme, Antonio Guterres exhorte, sans les nommer, «les parties à respecter et promouvoir les droits de l’Homme».
A propos de la situation à Guerguerat, le SG de l’ONU pointe directement la responsabilité du Polisario et se félicite de «la réaction mesurée du Maroc». «Je suis préoccupé par la possibilité d’une recrudescence des tensions à la suite du retour du Front Polisario à Guerguerat et des effets qu’auraient sur le cessez-le-feu de tels actes commis par l’une ou l’autre partie. Je constate que le Maroc a eu une réaction mesurée lorsqu’il a tenu ses troupes bien éloignées de la zone tampon durant les tensions. Je demande au Front Polisario de se retirer de la zone tampon comme il l’a fait en avril 2017». Le SG de l’ONU demande toutefois au Maroc de reconsidérer la fin de non-recevoir qu’il a opposé à la présence d’une mission d’experts onusiens à Guerguerat.
Autre point important dans les recommandations, le SG de l’ONU exhorte l’Algérie et la Mauritanie à «apporter leur concours au processus politique et à s’engager plus en avant dans les négociations». Tout le monde sait que le pays visé est celui qui est partie au conflit et véritable force qui maintient en vie le Polisario: l’Algérie. Le voisin de l’Est met beaucoup d’énergie à ne pas se voir épinglé pour sa responsabilité avérée et certaine dans le conflit du Sahara. C’est peine perdue!
Et last but not least, le SG de l’ONU a ignoré superbement les consultations élargies, menées par son envoyé personnel. Horst Köhler entendra-t-il pour autant cette façon fine de le rappeler à l’ordre?
- le_texte_integral_du_rapport.pdf