Les premières révélations livrées par le juge antiterroriste en charge du procès contre la Brigade Al-Andalus ont de quoi étonner. En ouverture du procès contre cette cellule affiliée à Daach, Pablo Ruz n’avait presque qu’un seul nom à la bouche et, contre toute attente, ce n’est pas celui de Lahcen Ikassrien, ex-vétéran de la guerre d’Afghanistan, ex-détenu de Guantanamo, fondateur de cette Brigade de sinistre réputation, qu’il retournait, mais plutôt de son bras droit, Omar El Harchi, que le juge espagnol a qualifié de «plus dangereux encadreur terroriste» qu’ait jamais connu la région, voire le monde entier. Mais qui devrait donc être ce Omar El Harchi pour secouer à ce point le landerneau juridico-médiatique ? «La tête pensante» de cette Brigade qui, comme son nom l’indique, voulait reconquérir l’Andalousie, relève Akhbar Al Yaoum, dans son édition de ce mardi 16 décembre. Le journal «El Mundo» soulignait, dans son édition du lundi 15 décembre, que ce dénommé Omar El Harchi avait même relégué au second plan le pourtant fondateur de cette très dangereuse Brigade d’Al-Andalus, Lahcen Ikassreen, dont le «leadership» se réduisait à sa stricte dimension charismatique. Omar El Harchi, bras droit de Lahcen Ikassreen, serait, selon El Mundo, le réel «leader» de cette Brigade, alliant deux qualités rarement joignables chez un même dirigeant : le charisme et l’opérationnalité.
Charisme et opérationnalitéOpérationnalité dont il aura fait d’horribles preuves lors de son ex-équipée du côté de la Syrie, où il a combattu aux côtés de Daach contre les forces « impies » de Bachar El Assad et dont il est retourné sain et sauf à Madrid se lancer, à nouveau, dans le recrutement au profit du présumé «Etat islamique» réussissant à tisser, à partir de 2011, sa toile en Belgique, en France, au Maroc, en Tunisie, en Egypte et en Syrie. A Madrid, il prenait ses quartiers tantôt à la mosquée de la M-30 tantôt à la cafétéria «del templo» qui lui servaient, comme le souligne El Mundo, de point de rencontre pour l’embrigadement des candidats au jihad en Syrie. Parmi ses « victimes », figure même un imam de la mosquée de «Yunquera de Henares», Hicham Chentouf, qui se trouverait actuellement en Syrie. Et ce n’est pas tout. Les 15 membres de la Brigade d’Al-Andalus, déférés en début de semaine devant le tribunal antiterroriste de Madrid, comptent parmi ses disciples. Parmi les suspects, figurent cinq Marocains, deux Espagnols, un Bulgare et un Argentin. Six autres seraient actuellement en Syrie, où ils combattraient aux côtés de « l’Etat islamique » contre l’armée de Bachar Al Assad.
Omar El Harchi, un casse-tête pour les servicesSentant qu’il était à l’œil des services espagnols, pour son prosélytisme pro-Daach, Omar El Harchi réussit à prendre la fuite en février dernier pour se replier vers sa ville natale, Tétouan. Première précaution, il change de nom de famille pour s’appeler «Omar Tétouani». Là, il a réussi à tisser des liens avec une autre cellule affiliée à Daach, démantelée le 14 août dernier. Il s’agit de la cellule de Mohamed Jalal Aznadan, arrêté, mi-août dernier, par les services nationaux. Avec ce dernier, Omar « tétouani » serait parvenu à enroler et acheminer pas moins de trente jihadistes en Irak et en Syrie, dont le tristement célèbre coupeur de têtes Mohamed Hamdouch, alias «Kokito». Selon l’enquête des services nationaux, Mohamed Jalal Aznadan aurait fait connaissance avec Omar El Harchi en 2013. Ce dernier avait révélé à Aznadan que dans le cadre de son activisme au sein de la filière syrienne, il a découvert un itinéraire menant à la région syrienne d'Alep via la ville turque de Gaziantep. Un trajet banni par la suite en raison du renforcement du contrôle sécuritaire par l'armée turque. En mars 2014, El Harchi a informé Aznadan du souhait exprimé par un Argentin converti à l'Islam et un Iranien sunnite de rejoindre les rangs des moujahidines en Syrie. L'Argentin Raul Rodriguez, Omar Al Argentini de son nom de guerre, et l'Hispano-iranien Navid Sanati Koopaei, actifs au sein de la cellule de Madrid, espéraient être pris en charge par le recruteur marocain et cautionnés auprès des facilitateurs d'accès au niveau de la région turque Sanli-Urfa. En somme, un itinéraire atypique pour Omar El Harchi, toujours activement recherché.



