Alors qu'il est sorti par la petite porte des dernières élections et du parti qu'il dirigeait, Ilyas El Omari tente désespérement de revenir... par la fenêtre. Politique en fin de vie, ou presque, le secrétaire général démissionnaire (mais pas trop) du Parti Authenticité et Modernité ne lâche rien. Quitte à surfer sur les mauvaises vagues. Ce fut le cas en l'occurrence après la victoire de l'équipe nationale de football contre la Côte d'Ivoire.
S'il avait brillé par sa discrétion ces derniers mois, El Omari n'a pas hésité à s'accaparer cette prouesse en s'affichant fièrement avec les joueurs et le sélectionneur Hervé Renard et en montant à bord de l'avion qui a ramené l'équipe nationale d'Abidjan. Non content de cette indécence, il a en plus trouvé le moyen de descendre le premier de l'avion. Comme si cette victoire, c'est à lui que les Marocains la doivent. "C'est de la pure arrogance, si ce n'est la plus indigne des impostures", commentent les milieux politiques et sportifs de la capitale.
Si de nombreuses personnalités ont fait le déplacement à Abidjan, c'est pour soutenir les Lions. Un humoriste comme Hassan El Fad, malgré son immense popularité et ses millions d'adeptes, a su rester en retrait pour laisser les vainqueurs vivre ce moment unique. Ce jour était le leur et tous en étaient conscients. Pas Ilyas El Omari. Celui-ci a poussé l'audace jusqu'à inviter Hervé Renard et le brillant Achraf Bencherki au Parlement, suscitant l'ire de tous les autres partis, PJD et Istiqlal en tête.
Le chef du groupe de l'Istiqlal à la Chambre des représentants, Noureddine Moudiane, a jugé "scandaleux et irresponsable" le comportement du chef du PAM. S'exprimant mercredi devant la commission parlementaire des Finances, il a comparé cette attitude au "vol des godasses" des joueurs. Driss Azami, président du groupe parlementaire du PJD, a abondé dans le même sens.
Contacté par Le360, Ilyas El Omari est resté évasif. "Je ne veux pas polémiquer, je m'exprimerai sur ce sujet au moment opportun. Il y a des coups bas et des règlements de compte dans cette affaire", nous a-t-il déclaré.
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Une source proche a néanmoins indiqué qu'El Omari n'a bénéficié d'aucune faveur pour se retrouver dans l'avion des Lions de l'Atlas. Elle affirme détenir la preuve de l'achat par Ilyas El Omari de son billet d'avion, qui aurait coûté 17.000 dirhams aller/retour. "On ne monte pas comme on veut dans un avion à Abdijan", précisera toutefois cette source sous couvert d'anonymat. A la question de savoir pourquoi El Omari est apparu le premier sur la passerelle de l'avion, au point qu'un haut responsable de l'Intérieur (le wali de Rabat-Salé-Kénitra) lui a embrassé le front, la même source a expliqué qu'il était assis dans la première rangée de la classe affaires de l'appareil. Tout simplement. Cet argument ne convainc guère. C'est oublier qu'il s'agit d'un vol spécial affreté pour transporter l'équipe nationale et le staff qui l'accompagnait.
"L'avion transportait ce soir-là 170 personnes. Une cinquantaine de places étaient réservées à l'équipe nationale, le reste était dédié aux responsables des fédérations de football et aux dirigeants des clubs de la Botola. Il ne faut pas oublier qu'El Omari est président d'honneur du Chabab d'Al Hoceima", a ajouté cet ami intime du (toujours) chef du PAM. Il oublie toutefois de préciser que le titre de président d'honneur est honorifique et ne peut en aucun cas justifier la présence d'El Omari dans l'avion.
Au ministère de la Jeunesse et des sports, on parle d'un acte "grotesque" et d'un comportement "inacceptable", quels que soient "les arguments avancés". "On ne peut pas exploiter le bonheur et la joie d'un peuple de la même manière qu'il est condamnable de surfer sur ses souffrances", a-t-on souligné, tout en rappelant que même le ministre de tutelle, Rachid Talbi Alami, s'est abstenu de faire le voyage pour, justement, ne pas mêler fonction gouvernementale, appartenance politique à un match qui engageait tous les Marocains.