Grève: ce que dit la nouvelle loi

En parallèle avec la grève nationale, 4.000 infirmiers et techniciens de santé ont participé, ce jeudi 11 mai 2023, à un sit-in devant le parlement, afin de réclamer la justice salariale.

Revue de presseAprès des décennies de gestation, la loi organique fixant les conditions et modalités d’exercice du droit de grève entre finalement en vigueur. Élargissant son champ d’application tout en instaurant un cadre procédural strict, ce texte fondateur suscite autant d’espoirs que de réserves. Cet article est une revue de presse tirée d’Al Ahdath Al Maghribia.

Le 18/09/2025 à 20h32

Prévue dès la première Constitution du Royaume dans les années soixante, la loi organique fixant les modalités et les conditions d’exercice du droit de grève sort enfin de l’ombre. Publiée au Bulletin officiel le 24 mars 2025, elle entrera en vigueur la semaine prochaine, venant combler un vide juridique vieux de plusieurs décennies.

La loi 97-15 définit avec précision les procédures, les délais, les garanties, les sanctions et les interdictions encadrant ce droit fondamental, rapporte Al Ahdath Al Maghribia du vendredi 19 septembre.

Le gouvernement souligne que la disposition la plus significative de cette loi réside dans la clarification et l’élargissement de la définition même de la grève. Désormais, le droit de cesser le travail ne se limite plus à la défense d’intérêts professionnels directs et matériels.

Deux amendements substantiels l’étendent explicitement à la défense des intérêts indirects des travailleurs, légalisant ainsi clairement les grèves solidaires et politiques et à la défense des intérêts moraux (tels que la dignité ou les libertés syndicales). Du coup, cette loi aligne la législation marocaine sur les standards de l’Organisation internationale du travail (OIT).

Alors que les versions antérieures le restreignaient aux salariés du privé et aux fonctionnaires, il est désormais accordé aux professionnels de toutes catégories, aux travailleurs domestiques ainsi qu’aux travailleurs indépendants et non-salariés. De même, l’initiative de l’appel à la grève n’est plus l’apanage des seuls syndicats les plus représentatifs. Les syndicats moins représentatifs y sont aussi autorisés, à la condition expresse d’avoir participé aux élections des représentants du personnel.

Si le champ est élargi, l’exercice du droit est soumis à une procédure rigoureuse qui, selon certains observateurs, pourrait en complexifier la pratique. Dans le secteur privé, l’appel doit émaner d’une «commission de grève» devant recueillir l’accord préalable de 25% du personnel, puis être validé en assemblée générale par 35% des effectifs.

Des délais de préavis stricts sont imposés: 7 jours pour le privé (3 jours en cas de danger imminent) et 15 jours renouvelables pour le public. Les délais de notification pour ce dernier ont été réduits de 15 à 5 jours, excepté pour la grève générale.

La loi interdit strictement à l’employeur toute entrave au droit de grève, notamment le licenciement des grévistes ou leur remplacement par des sous-traitants. En contrepartie, elle confère au chef du gouvernement le pouvoir d’interdire ou de suspendre une grève en cas de catastrophe naturelle ou de crise nationale menaçant l’ordre public ou les droits des citoyens, relaie Al Ahdath Al Maghribia.

Malgré ces avancées, les syndicats dénoncent le rejet par le gouvernement d’amendements qu’ils jugent essentiels. Leurs principales critiques portent sur la criminalisation de l’occupation des lieux de travail, la possibilité de retenues sur salaire des grévistes – un point particulièrement sensible lorsque la grève porte sur le non-paiement des salaires – et d’autres modifications qu’ils estiment nécessaires pour garantir un exercice serein et effectif du droit de grève sans entraves.

Par Hassan Benadad
Le 18/09/2025 à 20h32