Alexandra Saviana, journaliste à l’hebdomadaire français L’Express, signe «Les scénarios noirs de l’armée française» (Robert Laffont), qui va sortir en France demain jeudi 16 mai. S’appuyant sur l’analyse et les prévisions de quelque 106 experts et géopolitologues qu’elle a abordés pendant un an, l’essayiste a dressé une liste de 11 des pires scénarios susceptibles d’ébranler la paix mondiale, parmi lesquels se trouve, en premier lieu, une guerre entre le Maroc et l’Algérie.
La guerre commencerait à l’initiative du régime d’Alger dont les troupes armées tenteraient, en vain, de s’incruster dans le sol marocain. «Le 17 août, des blindés algériens occupent l’oasis de Figuig. Le territoire, enclavé entre le Maroc et l’Algérie, est un haut lieu de tensions entre les deux pays. Des militaires bloquent désormais le passage des cultivateurs de dattes marocains, qui cheminent quotidiennement à cet endroit pour rejoindre leurs vergers. À l’inverse des crises précédentes – la frontière est fermée officiellement depuis 1994 mais un laissez-passer existe pour les agriculteurs –, l’armée algérienne n’aurait donné aucune indication avant son intervention», écrit Saviana.
«Le 22 août, une unité de 35 soldats algériens s’introduit en territoire marocain au petit matin. Des coups de feu sont échangés à la frontière. Le bilan est lourd: trois soldats marocains sont tués, et 11 blessés tandis que quatre morts et 18 blessés sont à dénombrer du côté algérien. À la mi-journée, en dépit du ballet diplomatique qui s’est mis en place ces derniers jours pour calmer les deux puissances régionales, l’escalade se poursuit: Rabat dénonce une “intrusion inadmissible” qui menace l’intégrité de son territoire». L’Algérie et le Maroc entrent en guerre», suppose-t-elle.
Bérézina totale de l’armée algérienne
De l’autre côté de la méditerranée, la France observe et redoute le pire: une exportation de la guerre sur le sol français. «Les services marocains ont été très actifs sur le sol français pour faire passer des messages ces derniers temps, note Elie Tenenbaum, directeur du Centre des études de sécurité de l’Institut français des relations internationales (Ifri). Il n’est pas exclu, dans la mesure où les familles des dignitaires des deux pays ont des maisons en France, des enfants qui vont à l’école en France, que des événements puissent avoir lieu dans l’Hexagone», fait remarquer l’auteure de ce livre de 240 pages.
Il suffirait de quelques jours pour que l’armée algérienne essuie une déroute totale. Alexandra Saviana prévoit dans ce sens: «Dix jours plus tard, le conflit devient sanglant et tourne court. Une incursion de blindés algériens près d’Oujda, capitale de l’est du Maroc, se solde par un échec retentissant. Les Marocains détruisent une quinzaine de chars de bataille algériens. Alger dénombre 30 morts dans ses rangs, quand les pertes de Rabat restent basses.»
«Un cessez-le-feu est établi entre les deux pays grâce à la médiation de l’Égypte. Mais le soulagement collectif est de courte durée. Conséquence de cette défaite, le régime algérien est fortement fragilisé», constate l’écrivaine. Elie Tenenbaum, qu’elle cite dans le même ordre d’idées, explique: «Après une telle conclusion du conflit, un régime comme celui en vigueur aujourd’hui en Algérie serait chancelant. Il y aurait le risque qu’il devienne aussi paranoïaque que fragile».
À bout de souffle, le régime algérien déciderait cette fois de jeter l’opprobre sur la France et l’attaquer militairement à son tour. «Fragilisé, le pouvoir est contesté par des factions politiques hostiles à la France, qui présentent Paris comme un ennemi à combattre pour parvenir à l’unification d’une nation algérienne fracturée. […] Le 16 novembre, le président algérien accuse la France de «malveillance» et assure être prêt à «défendre la patrie». Le lendemain, des missiles Iskander fournis par Moscou sont tirés en mer Méditerranée, dans le cadre d’un exercice impromptu», imagine-t-elle.
La ruée des Algériens vers la France
Par conséquent, les binationaux algériens décideraient de fuir le pays qui se disloque devant eux et une opération d’évacuation des Algériens détenteurs de la nationalité française sera par la suite organisée. «Environ 80.000 personnes appartiennent à la communauté française en Algérie, pointe Xavier Driencourt. Mais le problème de l’évacuation des ressortissants est que, sur ces 80.000, 78.000 sont des binationaux franco‐algériens. Ils sont donc considérés comme algériens par les autorités algériennes, ce qui impliquerait de fait des complications supplémentaires, alors que des gens avec la double nationalité chercheraient à partir en France».
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Les choses vont beaucoup plus empirer et la junte algérienne attaquerait à nouveau la France pour faire avorter l’opération d’évacuation. «En guise de représailles à ce qu’elle estime être une attaque, et contre l’avis du pouvoir encore sur place à Alger, la partie la plus radicale de la junte met la main sur une partie de l’équipement militaire algérien. Elle envoie des missiles visant les navires français. L’un d’eux atteint sa cible. Pendant plusieurs jours, les images affreuses d’un porte‐hélicoptères amphibie (PHA) français qui s’abîme en baie d’Alger, l’équipage fuyant pour éviter de couler, tournent en boucle sur toutes les chaînes de télévision. L’opération d’évacuation est globalement considérée comme un succès, mais quatre militaires sont morts», ajoute-t-elle.
«Alors qu’une cérémonie d’hommage aux soldats décédés a lieu aux Invalides, Emmanuel Macron apprend qu’un deuxième missile Iskander tiré par la junte a visé la base militaire de Toulon», écrit la jeune journaliste.
La riposte ne va pas tarder et les responsables de l’attaque vont être traqués et liquidés. «Dans la plus grande discrétion, une opération spéciale conjointe avec les militaires algériens fidèles au pouvoir est menée sur le sol algérien pour arrêter les responsables. Deux Rafale M s’envolent depuis le porte‐avions Charles-de-Gaulle. Guidés par les militaires algériens sur le terrain, ils effectuent plusieurs frappes ciblées. Dix jours plus tard, on apprend par voie de presse l’exécution des commanditaires. Malgré l’élimination d’une partie de la junte, l’Algérie s’enfonce dans le chaos», conçoit Saviana.