Le sondage donne cette première indication: les deux tiers des jeunes de 18 à 35 ans soutiennent et priorisent la démocratie à toute alternative autoritaire. Une position qui recoupe au passage celle de la moyenne en Afrique. Mais le Maroc, avec 66%, améliore son pourcentage de deux points par rapport à 2011. Tel n’est pas le cas d’une trentaine de pays sondés qui accusent, eux, un recul de sept points. La baisse est encore plus forte en Afrique du Sud (29 points) et au Mali (23 points).
Cette enquête donne d’autres éléments significatifs: le rejet par 74% des jeunes Marocains du régime à parti unique ou encore militaire. Au cours de la dernière décennie, l’évolution a été passablement contrastée: si le Maroc voit une forte augmentation de 12 points en la matière, les 30 pays africains retenus connaissent une baisse de 11 points. Pour ce qui est du rôle des forces armées, 65% des Marocains estiment que celles-ci doivent être en retrait dans le domaine politique et ne pas y interférer ni s’y ingérer. La moyenne dans les 29 autres pays sondés est de l’ordre de 42%. Le Maroc est au premier rang, devant l′Ouganda (64%) et le Zimbabwe (60%). À noter, par exemple, que ce rapport précise dans ce même registre que 53% des Africains ne seraient pas opposés à une intervention militaire dans le domaine politique en cas d’abus de pouvoir par les dirigeants élus.
Sur l’appréhension des normes et pratiques démocratiques, la responsabilité gouvernementale est diversement appréciée: 66% des Marocains estiment qu’elle supplante l’efficacité, et 46% se prononcent pour davantage de liberté des médias, sans contrôle de l’exécutif. Dans ce même sens, les jeunes Africains sont favorables à la responsabilité gouvernementale et à l’État de droit, majoritairement la responsabilité présidentielle devant le Parlement (66%), le multipartisme compétitif, la limitation des mandats présidentiels (72%) et la liberté des médias (65%).
Pour ce qui de l’état de la démocratie durant la dernière décennie, pèsent évidemment les hypothèques et les crises traversées, ici et là. L’on note l’insatisfaction majeure dans des pays comme le Bostwana (-40 points) ou l’Afrique du Sud (-35 points). Au total, seuls 37% d’Africains expriment leur satisfaction quant au fonctionnement de la démocratie. Au Maroc, l’on est dans un schéma inverse, avec 53% des jeunes globalement satisfaits. Le Royaume a ainsi gagné des points entre 2011 et 2023, dans le tiercé de premier rang, derrière le Zimbabwé (15 points) et le Togo (12 points). Quant à l’évaluation des élections, les jeunes Marocains, à hauteur de 46%, sont pratiquement au niveau des 45% de la moyenne continentale. Mais la perception est moins favorable sur le sens et la portée des élections. À la double question sur les dernières élections nationales -complètement libres et équitables, libres et équitables avec des problèmes mineurs- l’on ne relève que 39% de réponses des Marocains contre 59% d’Africains.
Autre indication, les élections comme moyen de choix des dirigeants: 66% pour les sondés marocains et 75% en Afrique. L’enquête du réseau Afrobarometer va plus loin à cet égard. Ainsi, la forte chute de 8 points dans pas moins de 30 pays, déclinée notamment comme suit: moins de 4 points dans 26 pays, chute de 24 points en Tunisie et de 15 points au Cameroun, au Mali, au Lesotho, et au Burkina Faso, sauf l’exception de La Sierra Leone (+13 points).
La liberté de vote est un autre aspect des conclusions de ce rapport. C’est la réponse de 65% des Africains, «complètement libres» d’apporter leurs voix au candidat choisi. Mais le pourcentage est plus élevé au Maroc avec le chiffre de 82%, 62% indiquant la liberté de leurs opinions. À ce tableau sur l’état de «La démocratie en Afrique, tendances de la satisfaction et soutien populaire» -la première partie-, le rapport examine dans la seconde ce thème: «Politique ou économie: quels sont les déterminants du soutien des Africains à la démocratie». Les jeunes Marocains apprécient la construction démocratique actuelle et ses avancées. Mais en creux, ils restent interrogatifs et préoccupés par d’autres faits: l’augmentation de la corruption (43%), la modestie, voire la médiocrité des résultats économiques, le déficit social (chômage, santé, éducation), sans oublier une gouvernance publique plus efficiente et plus équitable dans les territoires. Une enquête qui est une contribution utile. Elle est précieuse pour des inflexions nécessaires dans la définition et la mise en œuvre de politiques publiques, prenant en compte les besoins et les aspirations de la jeunesse marocaine.