Les services marocains avaient bel et bien alerté sur des binationaux espagnols, et particulièrement sur le "Molenbeek espagnol", Ripoll, localité où résidaient les membres de la cellule terroriste à l'origine de l'attaque au bélier de jeudi 17 juillet, sur les Ramblas, au centre de Barcelone (13 morts et plus de 120 blessés), et l'attentat de Cambrils, province de la Tarragone, qui a fait un mort. C'est ce que vient de dévoiler le président de l'Institut prospective et sécurité en Europe (IPSE), Emmanuel Dupuy, dans une interview à nos confrères français de la "Nouvelle République".
Le spécialiste français en questions de sécurité ne manque pas de planter au passage une pique à la Catalogne qui, du fait de son "autonomisme", avait justement refusé de collaborer, en déclinant l'offre de "participer au pacte national espagnol d'échange d'informations sur le terrorisme islamiste". Ceci, "alors que 30% des fichés S espagnols vivent en Catalogne".
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"On sait aujourd'hui que la plupart des membres de la cellule démantelée en Catalogne sont marocains ou binationaux", souligne le président de l'IPSE. "La coopération existe déjà, notamment entre le Maroc, l'Espagne, le Portugal et la France (G4)", relève-t-il encore. Seulement voilà, "il manque à cette coopération une dimension que, justement, seul le Maroc a mise en place: la dimension judiciaire".
"En 2015, le Maroc a, en effet, créé un Bureau central d'investigations judiciaires, qui regroupe tout le renseignement venant aussi de la criminalité, des trafics, des financements suspects, etc", rappelle-t-il. "Depuis 2015, ce bureau (Bureau central des investigations judiciaires) a empêché une cinquantaine d'attentats, démantelé 300 cellules, fait arrêter et incarcérer plus de 2.000 +revenants+ d'Irak ou Syrie", fait-il valoir.
Autre grief fait par l'expert, il concerne la France elle-même, accusée de ne pas avoir suivi l'exemple du Maroc en créant un équivalent français du Bureau central des investigations judiciaires (surnommé "le FBI marocain"). "Le rapport Fenech, post attentat 2015, avait préconisé la création d'un tel bureau en France, mais cela n'a pas été suivi d'effet", déplore-t-il.
L'expert français estime néanmoins que "l'attentat barcelonais pourrait remettre ce sujet (création d'un bureau central des investigations judiciaires) à l'ordre du jour".
"Une coopération plus serrée encore entre des pays cibles et le Maghreb" s'imposerait aujourd'hui plus que tout autre temps, exhorte l'expert français, en plaidant pour l'élargissement de cette coopération au-delà de la France, l'Espagne, le Portugal et le Maroc, pour inclure aussi l'Italie.