Yémen: La population en première ligne

Victime des raids et des tirs aveugles, la population souffre également de pénuries.

Victime des raids et des tirs aveugles, la population souffre également de pénuries. . DR

Ecoles et entreprises fermées, pénuries, exode: la situation devient intenable à Aden, la grande ville du sud du Yémen où raids aériens et combats de rue n'ont pas faibli au 19ème jour de l'intervention menée par l'Arabie saoudite. Les habitants se terrent chez eux pour éviter les snippers.

Le 13/04/2015 à 21h33

A Ryad, le Premier ministre yéménite Khaled Bahah a prêté serment ce lundi 13 avril comme vice-président devant le président Abd Rabbo Mansour Hadi, réfugié comme lui en Arabie saoudite. La promotion de Bahah, 49 ans, a été saluée par le Conseil des ministres saoudien et par le Conseil de coopération du Golfe, qui comprend outre l'Arabie, ses cinq voisins arabes du Golfe. Perçu comme un homme de consensus, Bahah avait été nommé Premier ministre en octobre. Il cumulera les deux fonctions.

Loin du calme de Ryad, Aden a émergé lundi d'une longue nuit de violences entre partisans du président Hadi et leurs adversaires, les rebelles chiites Houthis et leurs alliés. Au moins trente personnes, dont treize civils, onze Houthis et six combattants pro-Hadi, ont péri dans ces combats qui ont touché différents quartiers, selon des sources médicales et militaires. Les frappes de la coalition arabe, dirigée par Ryad, ont visé des barrages et des positions rebelles aux entrées de la cité portuaire, deuxième ville du pays.

A l'aube, des avions ont bombardé le complexe présidentiel tenu par les rebelles et qui était le dernier refuge de M. Hadi avant qu'il ne s'enfuie vers l'Arabie saoudite à la veille de l'intervention militaire le 26 mars. Selon un militant pro-Hadi, Metaz al-Maisouri, qui réside à Aden, il y a eu ces dernières semaines un "exode massif" de familles. "Les écoles, les universités et des entreprises publiques et privées ont fermé", a-t-il dit. "De nombreux ouvriers et employés ont été licenciés par leurs patrons qui ne pouvaient plus les payer". La population manque de tout, en premier lieu de nourriture, selon des organisations humanitaires. En outre, a expliqué Adwaa Mubarak, une femme de 48 ans, "nous ne pouvons pas quitter notre domicile en raison des snipers".

"Il y a des combats à tous les coins de rue et j'ai forcé mes enfants à rester à la maison car plusieurs de mes voisins ont été tués par des tireurs Houthis, alors qu'ils n'ont rien à voir" avec cette guerre, a-t-elle ajouté. Dans ce contexte, le personnel de Médecins sans frontières (MSF) connait des difficultés pour se déplacer et accéder aux habitants ayant besoin d'assistance médicale.

Partis en septembre de leur bastion de Saada (nord du Yémen), les rebelles Houthis ont pris le contrôle de Sanaa, de régions du centre et de l'ouest, ainsi que de portions du sud, ce qui a provoqué l'intervention arabo-sunnite. Ryad accuse l'Iran chiite d'envoyer des armes aux rebelles, ce que Téhéran dément. Le président Hadi a réitéré ses accusations contre les rebelles dans une tribune publiée lundi par le New York Times, les qualifiant de "marionettes" de l'Iran.

Les pertes des Houthis et de leurs alliés, des militaires restés fidèles à l'ex-président Ali Abdallah Saleh, restent largement inconnues, mais les images des frappes, diffusées par la coalition, laissent supposer un grand nombre de tués et de blessés. Les déplacés eux, se comptent par dizaines de milliers.

Par Driss Douad (avec AFP)
Le 13/04/2015 à 21h33