Tebboune nous a habitués à des sorties médiatiques ubuesques. L’Algérie disposant du meilleur système hospitalier en Afrique, l’Algérie le meilleur pays de-ci, de-là... On pensait, en toute raison, que ses conseillers allaient lui apprendre le sens de la mesure et, surtout, s’élever à la hauteur de la parole présidentielle. Son dernier entretien plaide en faveur de l'exact contraire, et donne la pleine mesure d’un président dont les propos sont indignes, même des ragots clamés au comptoir du café du commerce.
Peine perdue: il n’a pas hésité pas à déformer l’histoire, quand il a affirmé, face caméra, que c'était l’Algérie qui avait introduit la Chine, ce pays à l'histoire pluri-millénaire, cette puissance mondiale aujourd'hui, au sein de l’Organisation des Nations Unies. Ben voyons.
En réalité, la République populaire de Chine refusait, depuis 1950, que ce soit la République nationaliste de Chine (l'île de Taïwan, de nos jours) qui représente les deux Chines à l’ONU, avec un siège de membre permanent au Conseil de sécurité.
Alors que la Chine communiste, devenue puissance nucléaire dès le 17 juin 1967, et dès lors première puissance démographique mondiale, n’a jamais accepté d’être représentée par Taïwan, qu’elle revendique comme faisant partie intégrante de son territoire, il a fallu attendre le 25 octobre 1971 pour que la Chine nationaliste soit expulsée de l’ONU, et que le siège de membre permanent du Conseil de sécurité soit attribué à la seule Chine continentale.
Deux pays ont contribué au changement de cette donne. Les Etats-Unis d’Amérique d’abord, qui ont levé leur veto protégeant Taïwan, en amorçant à l’époque un dégel avec la Chine de Mao Zedong, matérialisé par la visite de Richard Nixon en 1972 à Pékin.
L’Albanie, ensuite, mandatée depuis plusieurs années par le bloc des pays l’Est et le Mouvement des Non-Alignés pour parrainer la résolution onusienne qui a finalement permis à la République populaire de Chine d’intégrer pleinement les instances onusiennes, en reprenant le siège jusqu’ici occupé par Taïwan.
Nulle trace, donc, d’un quelconque rôle de l'Algérie dans ce dossier, mis à part peut-être, un vote favorable à l’instar de l’écrasante majorité des pays membres de l’ONU au profit de Pékin. Comment l’ambassade de Chine en Algérie va-t-elle considérer ces propos inconséquents du président désigné par les militaires pour servir de façade civile en Algérie?
On ose à peine imaginer la teneur de la note que l'ambassadeur de Chine, accrédité en Algérie, a remontée à sa hiérarchie et les réactions d’incrédulité qu’elle a dû susciter. On ose à peine imaginer, aussi, les réactions des chancelleries étrangères devant les propos ubuesques d’un président décalé, dépassé, et dont le périmètre d’action ressemble davantage à une scène, décidément taillée sur mesure pour le burlesque.
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Et comme si ces prétentions «diplomatiques» démesurées, et démenties par les faits historiques, ne suffisaient pas, Tebboune en a rajouté une nouvelle couche. En déclarant ensuite, cette fois-ci que les Egyptiens, les Soudanais et les Ethiopiens allaient régler leur différend relatif au partage des eaux du Nil, et ce, du simple fait des bons offices de l’Algérie, à laquelle, a-t-il asséné avec assurance, ces trois pays vouent un «respect inimaginable».
Compte tenu de la complexité du différend entre ces trois pays, lié au débit du fleuve du Nil, l’assurance d'Abdelmadjid Tebboune sur la médiation miraculeuse de l’Algérie doit bien faire rire sous cape.
Même dans le conflit factice du Sahara, intégralement créé et alimenté par l’Algérie, qui en est la principale partie prenante, Tebboune s’érige en faux diplomate et en arrive à proposer au Maroc de négocier à Alger même avec la prétendue «république sahraouie», une wilaya algérienne, qui n’est autre que la pire «zone d’ombre» de ce pays, dont les dirigeants paraissent avoir perdu la raison.
Tout ce bavardage vise à faire croire que son «ancien-nouveau» ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, est un «Superman», un «Zorro» qui va réussir à sortir la diplomatie algérienne de la profonde léthargie dans laquelle elle est plongée.
Sauf que plus personne ne donne le moindre crédit à ce que dit Tebboune, qui semble parler d’une Algérie imaginaire. Une Algérie, dont il prétend qu’elle disposerait de la meilleure constitution du monde, garantissant toutes les libertés individuelles et collectives aux Algériens, une constitution estampillée «Tebboune», et pourtant boycottée par 77% du corps électoral, selon les chiffres officiels.
Une Algérie qui, aussi, et selon les chiffres officiels, a vacciné 3 millions de personnes pour une population de quelque 45 millions d’âmes, ce qui n’empêche pas Tebboune de déclarer, sans sourciller, que 20% de la population algérienne a été déjà vaccinée. Cherchez l'erreur...
Autant de déclarations totalement en déphasage avec la réalité, lesquelles déconsidèrent la parole d’un chef d’Etat qui tient des propos qui ont un seul mérite: celui de faire rire.
Le peuple algérien, durement éprouvé par l’incompétence et l’impéritie de la junte au pouvoir, n’a toutefois vraiment pas le cœur à rire. Les récents propos de Tebboune risquent de rallumer la colère populaire dans un pays… qui brûle.