Ces premières poursuites pénales lancées par Robert Mueller marquent une accélération de ces investigations qui empoisonnent la Maison-Blanche, à quelques jours de l'anniversaire de l'élection du milliardaire républicain.
Le soupçon fondamental de savoir si, oui ou non, l'équipe de Trump s'est concertée avec Moscou pour influer sur le résultat du scrutin, s'est trouvé à la fois renforcé et affaibli par les développements de lundi.
Le procureur Mueller a inculpé Paul Manafort et son associé Richard Gates, contre lesquels il a retenu douze chefs d'accusation dont complot contre les Etats-Unis, blanchiment, fausses déclarations et non-déclaration de comptes détenus à l'étranger.
Mais l'acte d'inculpation de 31 pages ne suggère pas de collusion entre l'équipe du candidat républicain et les autorités russes.
Nettement plus embarrassantes pour M. Trump sont les révélations concernant un de ses anciens conseillers subalternes, jusqu'à maintenant resté dans l'ombre: George Papadopoulos a plaidé coupable d'avoir menti aux enquêteurs de la police fédérale (FBI).
Cet homme chargé des questions de politique étrangère au sein de l'équipe de campagne a tenté de cacher ses contacts approfondis avec des intermédiaires russes auprès desquels il avait appris que Moscou détenait "de quoi salir" Hillary Clinton, sous la forme de milliers d'emails.
Mme Clinton assure que l'un des facteurs de sa défaite a été la fuite d'emails du parti démocrate et de ses proches piratés par les Russes.
La Russie dément régulièrement et catégoriquement toute ingérence de sa part dans la campagne présidentielle américaine de 2016.
M. Papadopoulos a, par ses fausses déclarations, "entravé l'enquête en cours du FBI sur l'existence de liens ou de coordination éventuels entre des personnes associées à la campagne et le gouvernement russe", a souligné le procureur Mueller.
Après s'être rendus lundi matin au FBI, MM. Manafort et Gates ont dans l'après-midi plaidé non coupables devant une juge fédérale à Washington.
La magistrate Deborah Robinson a assigné les deux hommes à résidence, en attendant une prochaine audience jeudi consacrée à leur régime de liberté.
Réagissant sur Twitter, M. Trump a affirmé que les faits reprochés à M. Manafort remontaient à "des années". "Il n'y a AUCUNE COLLUSION!", a-t-il également écrit.
M. Manafort avait rejoint l'équipe de campagne du milliardaire républicain en mars 2016, avant d'être contraint de démissionner quelques mois après.
"Pourquoi Hillary la crapule et les démocrates ne sont-ils pas visés?????", a ajouté le président américain.
Ces poursuites annoncées publiquement offrent un vif contraste avec le secret qui entoure depuis six mois la tentaculaire enquête menée par Robert Mueller, un ancien patron de la police fédérale américaine.
Contrairement à un simple procureur fédéral, M. Mueller dispose d'une plus grande latitude d'action et d'une indépendance renforcée.
MM. Manafort et Gates se voient principalement reprocher des activités non déclarées de lobbyiste en faveur de l'ancien président ukrainien pro-russe, Viktor Ianoukovitch.
Plus de 75 millions de dollars ont transité par des comptes offshore gérés par les deux hommes, Paul Manafort étant accusé d'avoir blanchi à lui seul 18 millions de dollars.
Ces opérations lui ont permis de "mener grand train" aux États-Unis, acquérant notamment diverses propriétés luxueuses, selon l'acte d'accusation.
L'avocat de M. Manafort, Kevin Downing, a dénoncé une inculpation "ridicule", concernant des activités liées à l'Ukraine auxquelles son client a mis un terme "deux ans avant de travailler pour l'équipe de campagne de Trump".
Les inculpations n'ont "rien à voir avec le président et rien à voir avec la campagne", a affirmé lundi Sarah Huckabee-Sanders, porte-parole de la Maison-Blanche.
Elle s'est employée à relativiser le rôle "extrêmement limité" de George Papadopoulos, qu'elle a présenté comme un "bénévole" faisant partie d'un petit comité consultatif.
La porte-parole a par ailleurs dit s'attendre à ce que le procureur spécial boucle rapidement son enquête, sans préciser sur quoi elle fondait cette conviction.
Au Congrès, le sénateur démocrate Mark Warner a averti Donald Trump qu'il serait "inacceptable" qu'il fasse usage de son droit de grâce, comme le permet la Constitution.
Cette accélération des investigations intervient à l'approche du premier anniversaire de l'élection de M. Trump, le 8 novembre 2016. Et à la veille du coup d'envoi mardi au Congrès d'auditions de responsables de Facebook, Twitter et Google devant les commissions parlementaires qui enquêtent sur l'affaire russe.
Or ces derniers devraient révéler que les tentatives de manipulation politique par des intérêts liés à Moscou sur ces réseaux sociaux pendant la campagne américaine de 2016 ont été beaucoup plus vastes que ce qui avait été avancé jusqu'ici, ont indiqué lundi plusieurs sources.