La capsule contenant l’échantillon, prélevé en 2020 sur l’astéroïde Bennu, a atterri dimanche dans le désert de l’Utah aux Etats-Unis, au terme d’une vertigineuse descente finale à travers l’atmosphère terrestre, entamée à 44.000 km/h.
La chute, observée par des capteurs de l’armée, devait être freinée par deux parachutes successifs. La Nasa n’a pas confirmé si le premier avait fonctionné, mais le second s’est bien déployé, permettant un atterrissage en douceur.
«Nous avons entendu “parachute principal déployé”, et j’ai fondu en larmes», a raconté lors d’une conférence de presse Dante Lauretta, responsable scientifique de la mission. «C’est le moment où j’ai su que nous avions réussi à rentrer à la maison.»
«Pour moi, la science ne fait que commencer», a ajouté le chercheur.
L’échantillon contient environ 250 grammes de matière, selon l’estimation de l’agence spatiale américaine -- soit bien plus que les deux précédents échantillons d’astéroïdes rapportés par des missions japonaises.
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L’analyse de Bennu doit permettre de mieux comprendre la formation du système solaire, et comment la Terre est devenue habitable.
Après l’atterrissage, une équipe a d’abord analysé la capsule au sol, afin de s’assurer de son état. Aucune brèche n’a été constatée.
Elle a ensuite été enveloppée et placée dans un filet, qui a été soulevé par un hélicoptère pour être emporté jusqu’à une «salle blanche» temporaire.
L’enjeu était d’exposer la capsule le moins longtemps possible au sable du désert américain, afin d’éviter toute contamination de l’échantillon qui pourrait fausser les analyses ultérieures.
La zone visée au sol pour l’atterrissage faisait 58 km de long sur 14 km de large, sur une base militaire d’habitude utilisée pour tester des missiles.
Environ quatre heures avant l’atterrissage, la sonde Osiris-Rex avait relâché la capsule contenant l’échantillon, à plus de 100.000 km de la Terre. Cette sonde s’est ensuite mise en route pour rendre visite à un autre astéroïde.
Deux échantillons japonais
«Le retour de cet échantillon est vraiment historique», avait déclaré cette semaine à l’AFP Amy Simon, scientifique à la Nasa. Il s’agit du «plus gros échantillon que nous rapportons depuis les roches lunaires» du programme Apollo, conclu en 1972.
Lundi, le précieux paquet sera envoyé par avion vers le centre spatial Johnson à Houston, au Texas. C’est là que la boîte sera ouverte, dans une autre salle hermétique. La Nasa prévoit une conférence de presse le 11 octobre pour dévoiler de premiers résultats.
La majorité de l’échantillon sera conservée pour être étudiée par des générations futures. Environ 25% seront immédiatement utilisés pour des expériences, et une petite partie sera partagée avec le Japon et le Canada, partenaires.
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Le Japon avait lui-même donné à la Nasa quelques grains de l’astéroïde Ryugu, dont il avait rapporté 5,4 grammes en 2020, lors de la mission Hayabusa-2. En 2010, il avait rapporté une quantité microscopique d’un autre astéroïde.
Cette fois, l’échantillon de Bennu est bien plus gros, donc davantage d’analyses seront possibles. Il s’agit d’«un trésor pour les analyses scientifiques, durant les années à venir, pour nos enfants et nos petits-enfants, et des personnes n’étant pas même encore nées», a souligné Lori Glaze, directrice des sciences planétaires à la Nasa.
Histoire de notre origine
Les astéroïdes sont composés des matériaux originels du système solaire, il y a 4,5 milliards d’années. Contrairement à la Terre, ils sont restés intacts. Ils détiennent donc des indices sur la façon dont le système solaire s’est formé.
Les scientifiques pensent que Bennu (500 mètres de diamètre) est riche en carbone, et contient des molécules d’eau enfermées dans des minéraux. «L’objectif principal pour moi (...) est d’essayer de comprendre si ces astéroïdes riches en carbone comme Bennu ont apporté les composés qui ont pu conduire à la naissance de la vie sur notre planète», a déclaré Dante Lauretta.
Durant la mission, l’astéroïde a déjà surpris les scientifiques: sa surface s’était révélée moins dense que prévue durant la collecte de l’échantillon. Le bras de la sonde s’était enfoncé, un peu comme dans une piscine à boules. Or mieux comprendre sa composition pourrait se révéler utile à l’avenir.
Il existe un faible risque (1 chance sur 2.700) que Bennu frappe la Terre en 2182, une collision qui serait catastrophique. Mais la Nasa a réussi l’année dernière à dévier la trajectoire d’un astéroïde en le percutant.