Les États-Unis et l’Arabie saoudite se félicitent du «début des discussions pré-négociations» à Jeddah entre les représentants de l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane et ceux des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo. «Le royaume d’Arabie saoudite et les États-Unis exhortent les deux parties à prendre en considération les intérêts de la nation soudanaise et de son peuple, et à s’impliquer activement dans les discussions vers un cessez-le-feu et une fin au conflit», déclarent Ryad et Washington.
Alors que les frappes aériennes et les explosions ont continué à secouer toute la journée de vendredi différents quartiers de Khartoum, l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane avait déjà annoncé dans la soirée avoir dépêché des négociateurs en Arabie saoudite, après 21 jours de combats ayant fait 700 morts, 5.000 blessés, 335.000 déplacés et 115.000 réfugiés.
Ces émissaires vont se retrouver à Jeddah pour «discuter des détails de la trêve» plusieurs fois renouvelée mais jamais respectée, a-t-elle expliqué, sans que l’autre camp, celui des FSR, ne commente dans l’immédiat.
Le spectre de la faim
Depuis plusieurs jours, l’émissaire de l’ONU au Soudan, Volker Perthes, explique que les deux belligérants s’étaient dits «prêts à entamer des discussions techniques» portant uniquement sur les modalités d’un cessez-le-feu, citant l’Arabie saoudite comme un lieu de rencontre possible. Un retour à des négociations politiques ne sera envisageable qu’après une véritable trêve, avait-il martelé.
Au-delà des victimes directes, cette nouvelle guerre fait progresser la faim, un fléau qui touchait déjà un Soudanais sur trois. Selon l’ONU, entre 2 et 2,5 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de malnutrition aiguë d’ici six mois si le conflit se poursuit.
Face à la «catastrophe» dénoncée par les humanitaires, la communauté internationale peine à agir en rangs organisés. Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU tiendra une session spéciale le 11 mai, soit près d’un mois après le début des hostilités.
Dimanche, ce sont les ministres des pays de la Ligue arabe qui doivent examiner «le dossier soudanais» sur lequel ils sont profondément divisés, après plusieurs discussions entre dirigeants de l’Union africaine (UA) et de l’Igad, l’organisation régionale de l’Afrique de l’Est. La médiation américano-saoudienne ne semble ne pas toujours converger avec les autres efforts régionaux en vue de faire taire les armes.
Conflit «prolongé»
Pour le renseignement américain, il faut s’attendre à un conflit «prolongé» parce que «les deux camps pensent pouvoir l’emporter militairement et ont peu de raisons de venir à la table des négociations» pour discuter de leur avenir politique.
L’ONU prévient que 860.000 personnes, des Soudanais mais également de nombreux Sud- Soudanais retournant dans leur pays, pourraient traverser les frontières ces prochains mois et réclame 402 millions d’euros pour aider le pays, l’un des plus pauvres au monde. «Plus de 56.000 personnes» sont arrivées en Égypte, selon l’ONU, «30.000 au Tchad», « plus de 12.000» en Ethiopie et 10.000 en Centrafrique.
Afdal Abdel Rahim, elle, attend de passer en Égypte. «Quand la guerre a commencé, avec des bombardements et des frappes aériennes», raconte-t-elle à l’AFP, «nous avons quitté nos maisons et nous nous sommes enfuis à Wadi Halfa», la dernière ville avant l’Égypte où des milliers de Soudanais fuyant la guerre se pressent.
Civils armés au Darfour
Au Darfour, dans l’ouest frontalier du Tchad, des civils ont été armés pour participer aux affrontements mêlant militaires, paramilitaires et combattants tribaux ou rebelles, selon l’ONU. L’ONG Norwegian Refugee Council (NRC), dont les locaux ont été pillés, dénombre «au moins 191 morts, des dizaines d’habitations incendiées et des milliers de déplacés» dans cette région ravagée dans les années 2000 par un conflit sanglant.
Des témoins ont aussi rapporté jeudi des combats à El-Obeid, à 300 km au sud de la capitale. Dans la ville côtière de Port-Soudan, épargnée par les violences, l’ONU et de plus en plus d’ONG tentent de négocier l’acheminement de ces cargaisons vers Khartoum et le Darfour où hôpitaux et stocks humanitaires ont été pillés et bombardés.