Le vainqueur, quel qu'il soit dimanche à l'issue du second tour, arriverait en queue de peloton au premier tour de l'élection présidentielle, loin derrière la candidate de l'extrême droite Marine Le Pen et le conservateur François Fillon, mais aussi derrière l'électron libre positionné au centre Emmanuel Macron et le tribun de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, selon les récents sondages.
Pour la primaire, l'ancien Premier ministre Manuel Valls, qui incarne l'aile droite du PS, part avec un net désavantage face à son ancien -et éphémère- ministre de l'Education: cet outsider issu de l'aile gauche du parti, très critique sur sa politique libérale, l'a devancé de cinq points (36% contre 31% des voix) au premier tour de la primaire dimanche dernier. Son avance est confortée par de nombreux ralliements.
Depuis, le ton ne cesse de monter entre les deux prétendants, aggravant la fracture au sein d'un parti qui sort affaibli du mandat de l'impopulaire François Hollande, avec un chômage endémique et un durcissement sécuritaire après une vague d'attentats sans précédent.
"Il faut en finir avec les vieilles recettes et les vieilles politiques", plaide Benoît Hamon, 49 ans, tandis que Manuel Valls, 54 ans, appelle les électeurs à choisir entre "la défaite assurée" s'ils désignent son concurrent et "la victoire possible" avec lui.
L'ex-Premier ministre, qui met en avant son expérience du pouvoir, critique en particulier la proposition novatrice de son adversaire d'instaurer à terme un revenu universel de 750 euros, qui signerait selon lui "la ruine de notre budget".
"Quand on propose (de dépenser) 350 milliards d'euros, même à l'horizon d'un quinquennat, c'est irréaliste", a-t-il insisté mardi, en qualifiant son rival de "marchand d'illusion".
Une dizaine d'économistes français, dont l'influent Thomas Piketty, marqué à gauche, ont riposté mercredi en défendant l'idée de revenu universel de Benoît Hamon, jugeant qu'il "peut être économiquement crédible et socialement audacieux", dans une tribune dans le journal Le Monde.
Mercredi, Manuel Valls a attaqué son rival sur la question de la laïcité, en lui reprochant son "ambiguïté" vis-à-vis d'un communautarisme qu'il se targue de fermement combattre. "Il y a un débat à gauche sur la conception de la laïcité", a-t-il assuré.
"On distille un poison" qui n'est "fondé sur rien", a rétorqué Benoît Hamon. "Il faut bien sûr lutter contre l'islam radical mais arrêtons de faire de l'islam un problème de la République", avait-il insisté mardi.
Les thèmes du débat télévisé diffusé à partir de 20H00 GMT, promettent d'autres échanges frontaux: travail, environnement, transition énergétique, sécurité, terrorisme et questions internationales.
Leurs différences de vue, qui reflètent deux gauches, l'une "hyperréaliste", l'autre "utopiste" selon la presse, rendent très aléatoire un rassemblement de leurs partisans à l'issue de la primaire, même si les deux candidats se sont chacun engagés à soutenir le vainqueur du scrutin.
Certains socialistes ont déjà fait savoir qu'ils n'excluaient pas de voter pour l'un ou l'autre des candidats partis en cavalier seul à la présidentielle sans passer par la case primaire du PS: Emmanuel Macron, positionné au centre, ou Jean-Luc Mélenchon, à l'extrême gauche.
Ajoutant aux tensions qui minent le PS et le menacent d'implosion, les résultats du premier tour de la primaire ont suscité la polémique: le comité organisateur n'a toujours pas publié les chiffres définitifs et reste soupçonné d'avoir gonflé la participation, considérée comme un indice-clef de crédibilité du processus. Et un argument pour se positionnier ensuite face à Emmanuel Macron et Jean-Luc Melenchon.