Pays-Bas: peur, colère, et parfois soutien à Geert Wilders parmi les musulmans néerlandais

Geert Wilders, président du PVV, parti d'extrême droite arrivé en tête aux élections législatives aux Pays-Bas.

Les dirigeants de la communauté musulmane néerlandaise ont exprimé leur colère et leur crainte après la victoire électorale de Geert Wilders, un fervent opposant à l’islam, mais des musulmans se montrent aussi pragmatiques et sont même prêts à lui donner « sa chance ».

Le 24/11/2023 à 08h12

Ni mosquées, ni foulards, ni corans: le manifeste du parti PVV de Geert Wilders est ouvertement islamophobe. «Nous voulons moins d’islam aux Pays-Bas», peut-on ainsi lire dans le programme de la formation arrivée, à la surprise générale, en tête aux élections législatives tenues le mercredi 22 novembre.

Muhsin Koktas, dirigeant de l’association musulmane CMO, se dit «inquiet pour ce pays». «Je ne sais pas si les musulmans sont encore en sécurité aux Pays-Bas», dit-il. «Certains ont peur, d’autres s’inquiètent pour leur avenir, se demandant ce que le résultat signifie pour leur citoyenneté et leur place dans la société néerlandaise», affirme à l’AFP Habib el Kaddouri, de l’association SMN des Marocains néerlandais. «En même temps, j’ai remarqué que les gens sont aussi combatifs. Nous ne nous laisserons pas chasser par M. Wilders ou par un gouvernement de droite», fait-il valoir.

Mais Wilders, qui avait traité les Marocains de «racaille», avait comparé le Coran à «Mein Kampf» et menacé d’organiser un concours de caricatures du Prophète Mohammed, a en partie mis sa rhétorique anti-islam en sourdine pendant la campagne électorale, se concentrant davantage sur des questions plus terre-à-terre comme l’augmentation du coût de la vie.

«Il mérite d’avoir sa chance»

Des musulmans interrogés par l’AFP à Amsterdam et à Venlo (est), ville natale de Wilders, ont brossé cependant un tableau plus nuancé, certains attachant plus d’importance aux questions économiques qu’à ses commentaires passés sur l’islam.

«Je suis d’origine turque et musulman. Pourtant, j’ai voté pour Geert Wilders. Toutes ces déclarations sur la fermeture des mosquées ne sont que de la politique», a déclaré un habitant de Venlo sous couvert d’anonymat. «Nous sommes tous pauvres et que nous pensons qu’il peut changer les choses», explique l’homme de 41 et sans emploi.

Burak Cen, un chauffeur de taxi de 40 ans, n’a pas voté. Mais s’il l’avait fait, il aurait également voté pour Wilders, assure-t-il dans un café d’Amsterdam. «Je pense qu’il mérite d’avoir sa chance. Il essaie juste de récolter des voix avec sa propagande sur les mosquées et les musulmans. Mais pour le reste, ce qu’il dit sur les Néerlandais et la pauvreté est juste», dit-il.

«Jan, Piet, Mustafa, Ahmed»

Cherchant à apaiser les craintes des minorités après le vote, et rassurer de possibles partenaires de droite pour former un gouvernement, Geert Wilders a souligné qu’il voulait être «le Premier ministre de tous les Néerlandais, indépendamment de leur religion, de leur sexualité, de leur couleur, de leur sexe ou de quoi que ce soit d’autre». «Lorsque vous êtes Premier ministre, votre rôle est différent de celui du chef de l’opposition», a-t-il plaidé.

Pour Mustafa Ayranci, de l’association des travailleurs turcs HTIB, sa communauté doit respecter la décision des électeurs, même si elle est décevante. Il veut prendre au mot Geert Wilders quand il parle d’être le Premier ministre de tous les Néerlandais. «Il ne sera pas seulement le Premier ministre de Jan et Piet, dit-il, mais aussi celui de Mustafa et Ahmed».

Par Le360 (avec AFP)
Le 24/11/2023 à 08h12