"L'Iran a achevé les étapes préparatoires nécessaires au démarrage de la mise en oeuvre" de l'accord conclu le 14 juillet 2015, a déclaré le secrétaire général de l'agence onusienne, Yukiya Amano, dans un communiqué publié à Vienne, où les chefs de la diplomatie iranienne, européenne et américaine étaient réunis pour d'ultimes discussions. "La mise en œuvre, c'est parti", a confirmé à l'AFP un responsable américain.
Dans la foulée, l'Union européenne a levé les sanctions économiques contre l'Iran, selon une source europénne, ainsi que les Etats-Unis, avant une annonce similaire attendue de l'ONU. La levée des sanctions internationales qui brident l'économie de l'Iran, un pays de 77 millions d'habitants aux riches ressources pétrolières et gazières, sera progressive et contrôlée.
Ce tournant diplomatique marque aussi l'amorce d'un rapprochement entre les Etats-Unis et l'Iran qui s'est précisé samedi par l'annonce d'un échange de prisonniers sans précédent entre les deux pays, qui ont rompu leurs relations diplomatiques en 1980.
Les chefs de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, et américaine, John Kerry, ont mené samedi d'intenses discussions à Vienne, dans le palais Cobourg où avait été conclu l'accord sur le nucléaire du 14 juillet 2015.
Avant son homologue américain, M. Zarif a vu la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini "pour finaliser le travail" sur l'entrée en vigueur de ce texte destiné à empêcher l'Iran de se doter de la bombe atomique, un contentieux de plus de treize ans.
Un "bon jour" pour le monde
"C'est une bonne journée pour le peuple iranien et les sanctions seront levées", avait déclaré M. Zarif à son arrivée à Vienne, ajoutant qu'il s'agissait aussi d'un bon jour "pour la région" et "pour le monde". Le président iranien modéré Hassan Rohani avait déjà estimé que son pays était sur le point d'entamer "une année de prospérité économique" avec cette levée.
Les milieux économiques se tiennent prêts depuis plusieurs mois à revenir dans le pays, qui dispose des quatrièmes réserves de brut au monde, et des deuxièmes de gaz. L'Iran, un pays de l'Opep, pourra notamment exporter à nouveau librement son pétrole.
Dans ce contexte, le brut est passé sous les 30 dollars le baril vendredi, les marchés anticipant un prochain afflux de pétrole iranien sur un marché déjà en surabondance d'offre.
L'AIEA a attesté samedi que Téhéran a réduit comme convenu le nombre de ses centrifugeuses permettant d'enrichir de l'uranium, et envoyé à l'étranger la quasi totalité de son stock d'uranium faiblement enrichi.
En outre, l'agence a établi que l'Iran a bien, comme il s'y est engagé, retiré le coeur de son réacteur à eau lourde d'Arak et bétonné une partie de l'installation, de façon à ne plus pouvoir y fabriquer de plutonium de qualité militaire.
La levée de l'intégralité des sanctions sera échelonnée sur dix ans, et durant 15 ans les mesures pourront être automatiquement rétablies en cas de manquements de Téhéran. L'Iran a accepté de se soumettre à des inspections renforcées de l'AIEA.
Les embargos de l'ONU sur les armes conventionnelles et sur les missiles balistiques sont maintenus jusqu'en 2020 et 2023 respectivement.
Echanges de prisonniers
L'accord de Vienne, négocié par l'Iran et le groupe 5+1 (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Chine et Allemagne), est considéré comme un succès majeur de politique étrangère pour le président américain Barack Obama ainsi que pour son homologue iranien.
L'échange de prisonniers entre les deux pays est un marqueur supplémentaire de cette nouvelle ère entre deux diplomaties longtemps irréconciliables.
Téhéran libère quatre Américano-Iraniens détenus en Iran, dont le journaliste du Washington Post Jason Rezaian, et Washington accorde sa clémence à sept Iraniens, dont six ont la double nationalité. Washington a également annoncé avoir abandonné ses poursuites contre 14 Iraniens.
La levée des sanctions conclue une intense semaine sur le front des relations entre Iran et Etats-Unis qui ont évité une crise avec la libération rapide, mercredi, de marins américains brièvement détenus par Téhéran
Ce possible rapprochement américano-iranien met en rage les alliés traditionnels de l'Amérique dans la région - Arabie saoudite et Israël en tête - qui redoutent l'influence de la puissance chiite.
La République islamique d'Iran a toujours nié vouloir se doter de l'arme atomique, tout en revendiquant son droit à exploiter une filière nucléaire complète.
L'AIEA a cependant établi en décembre que Téhéran avait bel et bien mené jusqu'en 2009 des recherches pour avoir la bombe. Washington a fait valoir que ce constat ne devait pas empêcher d'"aller de l'avant" dans ce dossier.