Tensions commerciales
Redresser l’économie sud-coréenne, la quatrième d’Asie, s’impose comme une priorité pour le nouveau chef de l’Etat. Fortement dépendante des exportations, elle pâtit des turbulences commerciales provoquées par le président américain Donald Trump.
«L’un des principaux produits d’exportation de la Corée du Sud est l’aluminium et l’acier», a déclaré à l’AFP Kim Dae-jong, professeur à l’Université Sejong, ajoutant que les droits de douane pourraient affaiblir «l’économie nationale déjà morose».
L’an dernier, la Corée du Sud était le quatrième exportateur d’acier vers les Etats-Unis, représentant 13% de leurs importations totales d’acier.
Alors que Washington a porté mercredi ses droits de douane à 50% sur les importations d’acier et d’aluminium, Séoul devra agir rapidement pour protéger son économie des vents contraires.
«Le leadership politique est crucial dans des moments comme celui-ci. Et avec un président élu, un appel téléphonique avec Trump pourrait améliorer considérablement la situation», a ajouté M. Kim.
Durant sa campagne, M. Lee a déclaré que Séoul devait «entamer immédiatement des négociations douanières» avec l’administration Trump, et promis de faire passer «l’intérêt national en premier».
Il a toutefois souligné «qu’il n’y a pas lieu de se précipiter pour conclure un accord».
Voisin belliqueux
Historiquement, le Parti démocrate de M. Lee a adopté une approche relativement conciliante envers la Corée du Nord. L’ancien président démocrate Moon Jae-in a même rencontré plusieurs fois son dirigeant, Kim Jong Un.
Mais ces efforts pour normaliser les relations inter-coréennes ont échoué et, durant le mandat de Yoon Suk Yeol, l’hostilité a atteint des sommets.
La Corée du Nord a renforcé ses liens avec la Russie, envoyant au moins 14.000 soldats combattre sur le front ukrainien, et considère à présent le Sud comme son «ennemi principal» avec qui toute réunification est à jamais impossible.
Séoul et Pyongyang ont aussi rompu un accord militaire conclu en 2018 pour prévenir les accrochages à la frontière. Pyongyang a poursuivi ses essais de missiles et ne répond plus aux appels sur les lignes de liaison inter-coréennes.
M. Lee a laissé entendre qu’il adopterait une approche différente de celle de M. Yoon. Durant la campagne, il l’a accusé d’avoir délibérément provoqué le Nord pour déclencher un incident armé qui aurait justifié la loi martiale. Les conservateurs ont vigoureusement démenti.
Duel de superpuissances
Le nouveau président devra trouver la place de la Corée du Sud au milieu de la confrontation grandissante entre les Etats-Unis, traditionnel garant de la sécurité de son pays, et la Chine, son premier partenaire commercial.
En mai, le ministre américain de la Défense Pete Hegseth a averti que Pékin se préparait «à potentiellement utiliser la force militaire pour modifier l’équilibre des pouvoirs dans l’Indo-Pacifique», et a appelé les alliés des Etats-Unis, comme Séoul, à renforcer leur défense.
M. Lee, cependant, a suggéré que Séoul entretienne des relations plus amicales avec Pékin.
Il a déclenché une polémique l’an dernier en déclarant qu’en cas de guerre entre la Chine et Taïwan, il dirait «xiexie» – «merci» en mandarin – aux deux parties.
Interrogé par le magazine Time pendant la campagne sur la possibilité d’aider Taïwan en cas d’invasion chinoise, M. Lee a répondu: «Je réfléchirai à cette réponse quand les extraterrestres seront sur le point d’envahir la Terre».
Polarisation
M. Lee va diriger un pays encore ébranlé par l’épisode de la loi martiale, et dont la vie politique atteint des sommets de polarisation.
Si le nouveau pouvoir de centre-gauche s’attaque trop agressivement aux conservateurs, cela « ne fera que galvaniser l’extrême droite, compromettant les efforts pour réduire la polarisation », avertit Gi-Wook Shin, professeur de sociologie à l’Université de Stanford.
Pendant sa campagne, M. Lee a promis de lancer une enquête spéciale pour démasquer tous les éventuels complices du coup de force de M. Yoon.
Bombe démographique
Le nouveau gouvernement devra s’employer d’urgence à désamorcer la bombe démographique qui menace le pays. En 2024, le taux de fertilité en Corée du Sud a été de seulement 0,75 enfant par femme, le plus bas du monde. Au rythme actuel, la population sud-coréenne (52 millions d’habitants) aura diminué de plus de moitié en 2100.
Pendant la campagne, M. Lee a estimé que le «sentiment de désespoir» des jeunes générations et les inégalités sont les principales raisons pour lesquelles les Sud-Coréens ne font plus d’enfants.
Selon lui, beaucoup de jeunes Coréens se demandent: «Que va-t-il m’arriver quand je serai vieux, après avoir tout sacrifié pour élever mes enfants?». Ils craignent que leurs enfants, s’ils en ont, «ne puissent pas les soutenir plus tard dans la vie, et ils ne sont même pas certains que la vie de leurs enfants sera meilleure que la leur».
M. Lee s’est engagé à réduire le temps de travail, à étendre les services publics d’aide à l’enfance et aux familles, aux handicapés et aux personnes âgées, et à élargir les aides au logement.








