L'Egypte pleure ses 305 morts dans la pire attaque sur son sol

Des Egyptiens transportent des blessés sur des brancards après l'attaque meurtrière contre une mosquée dans le Sinaï, le 24 novembre 2017.

Des Egyptiens transportent des blessés sur des brancards après l'attaque meurtrière contre une mosquée dans le Sinaï, le 24 novembre 2017. . AFP

Funérailles, prières, bandeaux noirs dans les médias: l'Egypte a pleuré samedi 25 novembre les 305 personnes, dont de nombreux enfants, tuées dans une mosquée du Sinaï, l'attentat le plus sanglant dans l'histoire récente du pays.

Le 29/12/2017 à 12h23

Une trentaine d'hommes armés portant la bannière noire du groupe jihadiste Etat islamique (EI) ont lancé un assaut vendredi contre le lieu de culte à 40 km à l'ouest d'Al-Arich, capitale de la province du Nord-Sinaï (est), a indiqué le Parquet.

Rarissime dans une mosquée en Egypte, le carnage a laissé le pays en état de choc. C'est l'une des attaques les plus meurtrières dans le monde depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

L'attentat n'a pas été revendiqué mais l'EI est le principal suspect, la mosquée étant fréquentée par des adeptes du soufisme, un courant mystique de l'islam honni par le groupe jihadiste qui considère les soufis comme des hérétiques et polythéistes.

Toutes les victimes ont été inhumées samedi. L'attentat survenu lors de la prière à la mosquée al-Rawda dans le village de Bir al-Abd, s'est soldé par au moins 305 morts, dont 27 enfants, et 128 blessés, selon un dernier bilan officiel.

Le président Abdel Fattah al-Sissi a promis de "venger les martyrs", au moment où le pays est soumis depuis avril au régime d'état d'urgence, décrété après des attentats anticoptes.

L'armée de l'air a ensuite procédé à des raids nocturnes dans la zone de l'attaque, où est implantée la branche égyptienne de l'EI. Les avions ont visé "des véhicules utilisés dans l'attaque terroriste, tuant leurs occupants", selon un porte-parole.

A l'aube, des milliers d'habitants de Mit Habib, un village voisin du lieu de l'attaque, ont assisté aux funérailles du directeur de l'école de Bir al-Abd, Al-Said Abou Eitta, et de son fils Ahmed, tués dans la mosquée. Les corps portés sur les épaules, ils ont scandé en larmes: "Il n'y a de Dieu qu'Allah, le martyr est l'aimé de Dieu". Des funérailles ont eu lieu dans toute la région.

A Ismaïlia, ville proche du canal de Suez dans le nord-est du pays, où les blessés ont été hospitalisés, les proches se pressaient aux abords de l'hôpital, attendant désespérément des nouvelles.

"Le terrorisme dans la maison de Dieu", ont déploré les médias qui arboraient des bandeaux noirs en signe de deuil.

Toutes les mosquées du pays ont dédié leurs prières aux "martyrs", alors que M. Sissi a appelé les forces armées à édifier un mémorial en leur hommage selon les médias d'Etat.

D'après des témoins, les assaillants ont encerclé la mosquée avec des véhicules tout-terrain avant de poser une bombe à l'extérieur du bâtiment. Après l'explosion de la bombe, ils ont tiré sur les fidèles paniqués qui tentaient de fuir et mis le feu aux véhicules de ces derniers afin de bloquer les routes.

Les hommes armés "portaient des masques et des uniformes militaires", a raconté à l'AFP Magdy Rizk, blessé dans l'attaque, ajoutant que les familles vivant dans cette zone majoritairement soufie avaient déjà subi des menaces de groupes extrémistes.

"C'est la plus grande mosquée du village et vendredi entre 600 à 800 fidèles étaient à l'intérieur, dont des hommes, des enfants et des personnes âgées", a raconté à l'AFP Ahmed Swailem dont des cousins vivent dans le village.

L'attaque a été condamnée par de nombreux pays dont les Etats-Unis, la Russie, la France, la Grande-Bretagne, Israël, l'Iran ou l'Arabie saoudite.

Le grand imam d'Al-Azhar, principale institution de l'islam sunnite, le cheikh Ahmed el-Tayeb, lui-même d'obédience soufie, a condamné "l'attaque terroriste barbare", et le pape François s'est dit "profondément attristé par les pertes humaines".

Depuis que l'armée, alors dirigée par le général Sissi, a destitué en 2013 le président démocratiquement élu Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, les groupes extrémistes, dont l'EI, ont multiplié les attentats meurtriers en Egypte.

Les attaques frappent surtout le Sinaï, une péninsule désertique en proie à l'insécurité depuis de nombreuses années, où sont visés forces sécurité, minorités chrétienne et soufie et des bédouins accusés de collaborer avec l'armée.

La fréquence des attentats de l'EI dans cette région, qui borde Israël et la bande de Gaza palestinienne, avait diminué ces derniers mois.

La précédente attaque la plus meurtrière en Egypte remonte à octobre 2015, lorsqu'un attentat à la bombe revendiqué par la branche égyptienne de l'EI a coûté la vie aux 224 occupants d'un avion russe après son décollage de Charm el-Cheikh, station balnéaire du Sinaï.

Le 29/12/2017 à 12h23