La cour d'appel de Mons confirme ainsi la décision rendue en première instance par le tribunal de Tournai le 21 octobre dernier. «La cour considère que les faits à la base du mandat d'arrêt européen (MAE) décerné le 31 août 2022 ne sont pas constitutifs d'une infraction en droit belge», a précisé à l'AFP François Demoulin, substitut du procureur général.
«En conséquence, le mandat d'arrêt européen n'est pas exécuté, comme l'avait déjà décidé le tribunal», en première instance, a-t-il ajouté.
«C'est une victoire pour le droit», ont réagi Lucie Simon et Nicolas Cohen, les avocats de l'imam. «La France ne peut ériger n'importe quel comportement en infraction et exiger des autres Etats européens qu'ils soient ses supplétifs», a ajouté dans un tweet Me Simon.
«Discours prosélyte»Sollicité par l'AFP, l'entourage de Gérald Darmanin, qui avait annoncé fin juillet l'expulsion de ce prédicateur fiché S (pour sûreté de l’Etat) par les services de renseignement, n'a pas souhaité commenter la décision de la justice belge.
En appel comme en première instance, le parquet belge s'était dit favorable à la remise de l'imam à la France et l'arrêt rendu mardi est susceptible d'être contesté devant la Cour de cassation. Le parquet général de Mons, qui ne s'est pas immédiatement exprimé, dispose de 24 heures pour décider d'un pourvoi.
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Hassan Iquioussen, arrêté le 30 septembre dans la région de Mons, en Belgique francophone, et désormais assigné à résidence sous surveillance électronique, a été au cœur d'un imbroglio politico-juridique cet été en France.
L'arrêté signé de la main de Gérald Darmanin lui reproche «un discours prosélyte émaillé de propos incitant à la haine et à la discrimination et porteur d'une vision de l'islam contraire aux valeurs de la République».
Mais Hassan Iquioussen était introuvable au moment où cet arrêté, qu'il avait contesté devant la justice, avait été définitivement validé par le Conseil d’Etat le 31 août.
Selon Me Simon, son client a «respecté purement et simplement la loi française en quittant l'Hexagone pour la Wallonie».
«Mea culpa»Une audience à huis clos s'était tenue jeudi dernier devant la chambre des mises en accusation de la cour d'appel de Mons, au cours de laquelle l'imam et ses avocats avaient répété leurs arguments.
Selon eux, l'infraction reprochée en France («soustraction à l'exécution d'une mesure d'éloignement») «n'existe pas dans le droit belge», ce qui est censé être le cas pour qu'un MAE puisse être exécuté.
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En outre, un mandat d'arrêt européen n'est valide «que lorsqu'une peine d'emprisonnement est encourue», a ajouté l'avocat belge Nicolas Cohen. Or, «en droit européen, il est interdit de prévoir une peine d'emprisonnement pour un comportement lié à un séjour illégal ou un refus d'expulsion», a-t-il poursuivi, citant une jurisprudence de la Cour de justice de l'UE.
Faisant son «mea culpa» dans une interview diffusée mardi sur le site du quotidien français Le Parisien, l'imam y admet qu'il a pu tenir par le passé des «propos déplacés et certaines expressions qui trompent (s)a pensée».
«Je suis disposé à accepter des reproches, un procès. Je veux bien qu’on me condamne parce qu’il est sûr et certain que j’ai dit des choses condamnables. Mais m’expulser de l’endroit où je suis né, là où j’ai toujours vécu, c’est comme déraciner un chêne», a-t-il ajouté.
Né en France, Hassan Iquioussen avait décidé à sa majorité de ne pas opter pour la nationalité française. Lui affirme y avoir renoncé à 17 ans sous l'influence de son père et avoir ensuite tenté en vain de la recouvrer. Ses cinq enfants et ses 15 petits-enfants sont eux Français et implantés en France, dans le département du Nord: un de ses fils est imam à Raismes, un autre ex-élu PS à Lourches.