Gaza: les combats s’intensifient à Khan Younès, appels à sauver l’UNRWA

La fumée des bombardements s'élève en arrière-plan alors que les Palestiniens déplacés fuient Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 30 janvier 2024.. AFP or licensors

Un centre-ville ravagé, des tirs près des hôpitaux et une population en fuite: Khan Younès est le théâtre mercredi de combats acharnés sur fond d’appels de l’ONU à maintenir l’aide à Gaza de son agence pour les réfugiés palestiniens.

Le 31/01/2024 à 06h39

Dans la nuit, des témoins ont fait état de frappes nourries sur Khan Younès, principale ville du sud de la bande de Gaza où les forces israéliennes au sol tentent de défaire les combattants du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Le ministère de la Santé du Hamas a dénombré 125 morts dans des violences à Gaza de mardi en fin de journée à mercredi matin.

Les équipes de l’hôpital Al-Amal, un des plus importants de la ville avec le centre médical Nasser, ont rapporté des combats non loin de l’établissement et une pénurie de nourriture.

«Nous avons quitté l’hôpital Nasser sans matelas, sous les bombardements et frappes aériennes. Nous ne savions pas où aller, on ne nous a pas donné d’endroit précis où aller. Nous sommes dans le froid, livrés à nous-mêmes, sans tentes et sans rien pour survivre», a dit une Palestinienne ayant fui pour Rafah, plus au sud.

A Khan Younès, un reporter de l’AFP se déplaçant avec les forces israéliennes a témoigné d’un centre-ville détruit, avec des immeubles éventrés sur un sol boueux et de soldats qui s’enfoncent dans des tunnels.

«Chaque guerre a ses propres caractéristiques et je pense que cette guerre, son caractère fondamental réside dans les manœuvres terrestres et souterraines. C’est le caractère de cette guerre», a déclaré sur place Dan Goldfus, commandant de la 98ème division de parachutistes de l’armée israélienne.

«Catastrophique»

Dans le territoire dévasté et assiégé par Israël, en proie à une crise humanitaire majeure, les bombardements ont poussé 1,7 million de Palestiniens, selon l’ONU, sur un total de 2,4 millions d’habitants, à fuir leur foyer.

Ajoutant à la détresse de la population, les opérations d’aide aux civils de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) sont menacées après qu’Israël a accusé 12 des 30.000 employés régionaux de l’agence onusienne d’implication dans l’attaque du 7 octobre.

Ce jour-là, des commandos du Hamas venus de Gaza ont mené une attaque sans précédent en sol israélien, qui a fait environ 1.140 morts, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de chiffres officiels israéliens.

Quelque 250 personnes ont été enlevées et emmenées dans la bande de Gaza, dont une centaine ont été libérées fin novembre à la faveur d’une trêve, en échange de prisonniers palestiniens.

En riposte, Israël a juré d’«anéantir» le Hamas et lancé une vaste opération militaire qui a fait 26.751 morts, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement palestinien.

À la suite des accusations contre des employés de l’UNRWA, treize pays, dont les États-Unis, le premier bailleur, ont suspendu leur contribution en attendant que l’agence fasse toute la lumière sur l’implication présumée de ses employés dans les attaques du 7 octobre.

«Ces décisions (...) vont avoir des conséquences catastrophiques pour la population de Gaza. Aucune autre entité n’a la capacité de fournir une aide de cette ampleur» à une population qui en a «si urgemment besoin», ont fait valoir dans la nuit des chefs d’agences de l’ONU.

Aucune autre organisation n’est «capable de remplacer ou de se substituer à la capacité énorme et au tissu de l’UNRWA», a déclaré de son côté la coordinatrice humanitaire de l’ONU pour les Territoires palestiniens, Sigrid Kaag, après une réunion à huis clos du Conseil de sécurité.

Pour le gouvernement israélien, l’UNRWA s’est «fondamentalement compromise» en laissant le Hamas «utiliser ses infrastructures» pour mener ses activités militaires et «cacher des terroristes». Et cette agence, ont répété de nombreux responsables politiques israéliens, ne fait plus partie du «futur» de Gaza.

Alliés clés d’Israël, les États-Unis ont jugé que des mesures doivent être prises à l’UNRWA «pour que ce genre de choses ne se reproduise plus», tout en reconnaissant le travail «crucial» de cette agence.

Le Hamas en Égypte?

En parallèle de cette polémique, les États-Unis, l’Égypte et le Qatar s’activent en coulisses pour tenter de convaincre Israël et le Hamas de s’engager dans une nouvelle trêve, après celle d’une semaine en novembre qui avait permis la libération d’otages à Gaza en échange entre autres de prisonniers palestiniens écroués en Israël.

Le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a confirmé mardi que son mouvement avait reçu une proposition de trêve, résultat d’une réunion à Paris entre le directeur de la CIA, William Burns, et de responsables égyptiens, israéliens et qataris.

«Le Hamas examine la proposition» et prépare sa réponse, a-t-il indiqué, en ajoutant que des dirigeants du mouvement avaient été invités à se rendre en Égypte «pour discuter de l’accord-cadre issu de la réunion de Paris» et de sa «mise en oeuvre».

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a cependant affirmé mardi qu’Israël ne «retirerait pas l’armée de la bande de Gaza» et ne libèrerait pas «des milliers de terroristes» palestiniens en échange d’otages.

Un influent ministre d’extrême droite, Itamar Ben Gvir, a menacé mardi de quitter le gouvernement si M. Netanyahu donnait son feu vert à un accord «imprudent» pour libérer la centaine d’otages à Gaza.

Dans les pages du Foreign Affairs, le chef de la CIA, William Burns, écrit: «J’ai passé une grande partie des quatre dernières décennies à travailler au et sur le Moyen-Orient et j’ai rarement vu une situation aussi complexe et explosive».

Par Le360 (avec AFP)
Le 31/01/2024 à 06h39