Dairo Antonio Usuga David, alias Otoniel, 50 ans, a notamment été inculpé de direction d'entreprise criminelle entre juin 2003 et octobre 2021, et d'association internationale de malfaiteurs en vue de fabriquer et distribuer de la cocaïne avec l'intention de l'exporter illégalement aux Etats-Unis, avait indiqué un peu plus tôt le procureur fédéral de Brooklyn, Breon Peace.
S'il est déclaré coupable, il encourt la prison à vie.
Il a comparu devant la juge fédérale Vera Scanlon, menotté et vêtu de la combinaison orange des détenus américains.
La magistrate a décidé de le placer en détention provisoire, ce qu'il n'a pas contesté hier, jeudi, et la prochaine audience a été fixée au 2 juin.
Nouvel EscobarLors d'une conférence de presse qui se déroulait peu avant l'audience, le procureur a évoqué «l'un des caïds de la drogue les plus dangereux et les plus recherchés au monde», faisant écho au président colombien, Ivan Duque, qui l'a comparé mercredi à Pablo Escobar, le fondateur du cartel de Medellin abattu par la police en 1993.
Les autorités colombiennes ont affirmé que le Clan du Golfe a, en représailles, lancé une opération visant à assassiner des policiers et militaires.
Aucune victime n'a été signalée jusqu'à présent, mais dans le nord-ouest de la Colombie, où le cartel est influent, les hommes d'Otoniel ont imposé une «grève armée» jusqu'à mardi prochain, selon un avis publié sur les réseaux sociaux.
Dans le Bajo Cauca, six municipalités sont en état d'alerte en raison de la «présence évidente» de membres du cartel, selon Luis Fernando Suárez, secrétaire du gouvernement de ce département colombien.
Dans d'autres municipalités, des véhicules ont été incendiés et des écoles ont été fermées après que des individus ont tiré en l'air à proximité des établissements.
«Otoniel» avait été arrêté le 23 octobre dans le nord-ouest de la Colombie lors d'une vaste opération militaire. Il est poursuivi pour trafic de drogue depuis 2009 devant un tribunal de New York et sa tête était mise à prix pour 5 millions de dollars par les Etats-Unis.
La justice américaine considère qu'il a été le «leader suprême» de 2012 à 2021 du Clan du Golfe, une organisation criminelle ayant pu compter jusqu'à 6.000 hommes selon les périodes, et contrôlant une partie du département côtier d'Antioquia.
Pour contrôler ce territoire, «il supervisait une armée de sbires qui assassinaient, enlevaient et torturaient des victimes, y compris des membres des forces de l'ordre et de l'armée colombiennes», a accusé le procureur Breon Peace.
Epidémie d'overdosesMercredi après-midi, un convoi de cinq véhicules de police blindés avait transporté Otoniel d'une prison de la capitale Bogota à un aéroport militaire, où il a été remis à des agents de la lutte antidrogue américaine (DEA). Il avait atterri tard dans la soirée à New York.
Les Etats-Unis accusent Otoniel et le Clan du Golfe d'avoir introduit illégalement plusieurs dizaines de tonnes de cocaïne sur le sol américain.
Selon l'acte d'inculpation, entre 2003 et 2021 «son clan a tenté d'exporter plus de 90.000 kg de cocaïne aux Etats-Unis», a souligné la patronne de la DEA, Anne Milgram, soit selon elle 2 milliards de dollars de valeur une fois vendue dans la rue.
«Les Etats-Unis sont aujourd'hui au milieu d'une épidémie d'overdoses sans précédent», avec «un Américain mourant toutes les cinq minutes dans notre pays», a-t-elle rappelé, en pointant du doigt les cartels internationaux de la drogue.
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L'extradition d'Otoniel a été présentée comme un succès par la Colombie, mais des proches de ses victimes avaient demandé une «suspension» de l'extradition, estimant que cette procédure allait «soustraire à la justice (colombienne) un chef paramilitaire qui a commis des crimes contre l'humanité dans notre pays».
Ils invoquaient leur droit de connaître la vérité et de recevoir des réparations.
Issu d'une famille paysanne du nord-ouest de la Colombie, Dairo Antonio Usuga David a été guérillero d'extrême gauche, puis un paramilitaire d'extrême droite, avant de prendre la tête du Clan du Golfe. Il avait succédé à son frère Juan de Dios, dit «Giovanni», tué par la police en 2012.