Etats-Unis: Clinton joue l’expérience contre la "révolution" Sanders

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Hillary Clinton s'est présentée dimanche aux Américains comme la candidate la mieux armée pour succéder à Barack Obama, lors d'un débat télévisé où elle a dû repousser de multiples attaques lancées depuis sa gauche par un Bernie Sanders pugnace.

Le 18/01/2016 à 09h00

C'était la dernière fois que les candidats démocrates se retrouvaient sur la même scène, avant le début des primaires, le 1er février dans l'Iowa puis le 9 février dans le New Hampshire, et au moment où le sénateur du Vermont a rattrapé l'ex-secrétaire d'Etat dans ces deux Etats, selon les sondages publiés depuis une semaine, même si elle conserve l'avantage au niveau national.

L'ascension de Bernie Sanders a surpris le camp Clinton après un automne très favorable, et a mis fin à la relative amabilité entre les deux candidats.

La stratégie d'Hillary Clinton consiste à se présenter comme la candidate la plus capable de gérer un pays polarisé. En substance, elle relègue Bernie Sanders au rang des idéalistes néophytes, à un moment où les républicains sont particulièrement agressifs et déterminés à annuler les acquis des années Obama dans la santé, l'immigration, l'environnement et le droit à l'avortement.

"Nous avons besoin d'une présidente qui sache faire tous les aspects du travail. Je comprends à quel point c'est le travail le plus difficile du monde, je suis préparée et prête à m'y atteler", a déclaré Hillary Clinton.

La démocrate a volé dans les plumes du sénateur de 74 ans sur un sujet a priori consensuel chez les démocrates: sa proposition de créer une assurance-maladie publique et universelle, en excluant les assurances privées du marché. Hillary Clinton a argué qu'il serait dangereux de "mettre en pièces" la réforme signée Barack Obama et de rouvrir un débat aussi sensible.

"L'assurance maladie devrait être un droit pour chaque homme, femme et enfant", a martelé Bernie Sanders, en affirmant épouser la vision de Franklin Roosevelt et Harry Truman, deux illustres présidents démocrates. "Pourquoi dépensons-nous trois fois plus que les Britanniques, qui ont une couverture universelle, ou 50% de plus que les Français?"

Mais sa proposition a un coût très élevé, qui doublerait le budget fédéral, et que le "socialiste démocrate" financerait par de nouveaux impôts, notamment sur les très riches. Hillary Clinton a critiqué l'irresponsabilité budgétaire d'une telle refonte.

"Je suis la seule candidate à avoir promis de ne pas augmenter les impôts sur la classe moyenne", a répété la candidate.

Sanders et Wall StreetMais c'est justement l'ambitieuse "révolution politique" de Bernie Sanders qui galvanise ses partisans --il a promis d'avoir "les tripes" de s'opposer à l'industrie pharmaceutique et aux compagnies d'assurances.

Il dénonce un système économique "truqué", manipulé par Wall Street et les lobbies. Il condamne la collusion des hommes politiques avec le secteur financier, visant Hillary Clinton et ses réseaux new-yorkais. Avant 2015, elle a prononcé des discours rémunérés par des entreprises... dont la banque d'affaires Goldman Sachs.

"Je n'ai jamais été payé pour donner des discours chez Goldman Sachs", a lâché Bernie Sanders, rejoint par Martin O'Malley, le troisième candidat, pour reprocher à Hillary Clinton sa timidité supposée contre les banques.

Pour le sénateur, "le vrai problème, c'est que le Congrès appartient aux puissances de l'argent" --une antienne scandée avec efficacité tout au long de la soirée.

Mais Hillary Clinton a su faire porter ses coups, solide comme lors des trois précédentes émissions. Sur la finance, elle a noté que son programme s'attaquerait à tout le secteur financier, pas seulement les banques, ce qu'a salué l'économiste de gauche Paul Krugman.

Elle a rappelé que Bernie Sanders avait voté pour donner une immunité judiciaire aux fabricants d'armes en 2005. Sous pression, il a dû désavouer ce vote samedi.

"Il a voté pour la NRA et le lobby des armes à de nombreuses reprises", a-t-elle dit.

Et sur les questions de politique étrangère, elle a démontré son aisance, forte de ses quatre années à la tête de la diplomatie américaine. Elle a multiplié les expressions d'admiration à Barack Obama.

Le 18/01/2016 à 09h00