Avec 31,2% des voix, le parti de Mme Kallas améliore son score par rapport aux précédentes élections. Mais il devra, tout comme lors de la législature qui s’achève, former une coalition avec une ou plusieurs autres formations au Parlement. «C’est beaucoup mieux que ce que nous attendions», a déclaré Mme Kallas à la presse, tout en excluant de s’allier avec le parti d’extrême droite EKRE, arrivé deuxième avec 16,1% des voix alors que certains sondages lui donnaient jusqu’à 25% d’intentions de vote. «Nous avons exclu toute coalition avec EKRE et je maintiens mes propos comme je l’ai fait en 2019», a-t-elle souligné.
Un des leaders d’EKRE, Mart Helme, a accusé lors de la soirée électorale le Parti de la Réforme d’avoir « volé » la victoire électorale. «Nous n’avons rien fait de mal. Nous avons tout fait correctement et avec honnêteté, contrairement à ceux qui ont volé notre victoire bien méritée », a-t-il dit, en faisant remarquer qu’EKRE menait la course lors du décompte des bulletins sur papier mais que la situation s’était inversée lors du décompte des voix électroniques.
Lors de la campagne électorale, EKRE a plaidé contre les livraisons supplémentaires d’armes à Kiev, affirmant que l’Estonie ne devait pas nuire à ses relations avec Moscou. Il a aussi milité pour «la protection» des travailleurs estoniens contre l’afflux des réfugiés ukrainiens et d’autres migrants.
À l’issue du scrutin de dimanche, quatre autres partis seront présents dans le nouveau Parlement estonien. Le Parti du centre (centre-gauche) a remporté 15,3% des voix, Eesti 200 (libéral) 13,3%, le Parti social-démocrate 9,3% et Isamaa (conservateur) 8,2%, après un décompte provisoire de 100% des voix.
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Le taux de participation a été de 63,5%, selon la Commission électorale. Celle-ci doit encore procéder à un nouveau décompte dans la nuit, puis à un troisième mardi. Si les résultats se confirment, le Parti de la réforme dépassera son résultat d’il y a quatre ans (28,9%) et obtiendra 37 sièges, soit trois de plus que lors de la précédente législature.
Augmenter les dépenses militaires
Populaire parmi les entrepreneurs et les jeunes professionnels, le Parti de la réforme a promis de porter les dépenses militaires à au moins 3% du PIB et d’alléger la fiscalité des entreprises. «Les réformistes peuvent former un gouvernement avec tous ces partis à l’exception d’EKRE, car la position d’EKRE est maintenant devenue si faible qu’elle peut être facilement ignorée», a déclaré à l’AFP Rein Toomla, de l’Institut d’études politiques Johan Skytte.
L’Estonie, pays de 1,3 million d’habitants limitrophe de la Russie, dispose d’un parlement monocaméral de 101 sièges. Membre de l’Union européenne et de l’OTAN, ce pays balte a pris la tête des appels internationaux lancés l’année dernière en faveur d’une aide militaire accrue à l’Ukraine face à l’invasion de la Russie.
L’aide militaire estonienne à l’Ukraine représente actuellement plus de 1% de son PIB, soit la contribution la plus importante de tous les pays par rapport à la taille de leur économie. «Je pense qu’avec un mandat aussi fort, cela ne changera pas», a déclaré Mme Kallas dimanche. «Les autres partis - à l’exception d’EKRE et peut-être du Centre - sont sur la même ligne. Je pense donc que nous pouvons trouver un terrain d’entente ici», a-t-elle ajouté.
Une situation économique difficile
Ces élections ont eu lieu alors que l’économie estonienne traverse une situation difficile, avec un des taux d’inflation les plus élevés de l’UE (+18,6% sur un an en 2022). «Nous devons faire des réformes majeures concernant la transition écologique par exemple, mais nous devons aussi investir dans notre sécurité», a déclaré Mme Kallas dimanche. «Notre voisin agressif n’a pas disparu et ne disparaîtra pas. Nous devons donc travailler avec cela», a-t-elle ajouté en faisant allusion à la Russie.
Le président estonien dispose de 14 jours pour désigner un candidat au poste de Premier ministre, lequel aura également 14 jours pour présenter son nouveau gouvernement au Parlement pour approbation. Pour rappel, l’Estonie figure parmi les pays européens soutenant le Plan d’autonomie proposé par le Maroc comme solution pour le conflit du Sahara marocain.