Espagne: le Premier ministre Pedro Sánchez devant le juge dans une enquête visant son épouse

Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez et son épouse Begoña Gómez.

Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez doit témoigner mardi , dans le cadre d’une enquête pour corruption et trafic d’influence visant son épouse Begoña Gómez. Le responsable socialiste dénonce une «stratégie de harcèlement» soutenue selon lui par les partis d’opposition, à commencer par le parti d’extrême droite Vox.

Le 30/07/2024 à 07h33

Convoqué comme témoin, le chef du gouvernement espagnol Pedro Sánchez doit être entendu à 11H00 (09H00 GMT) au palais de la Moncloa, résidence officielle du Premier ministre, par le juge Juan Carlos Peinado, dans le cadre d’une enquête pour corruption et trafic d’influence visant son épouse Begoña Gómez.

L’audition, que le magistrat veut filmer, sera la deuxième d’un Premier ministre espagnol en exercice, après celle du conservateur Mariano Rajoy, entendu comme témoin lors d’un procès sur le financement illégal du Parti populaire (PP, droite) en 2017.

Elle pourrait cependant être extrêmement rapide: Pedro Sánchez, convoqué sur le seul volet «trafic d’influence» de l’affaire, a en effet le droit de ne pas répondre aux questions, la loi espagnole autorisant les citoyens au silence quand une enquête porte sur leur conjoint.

Le dirigeant socialiste, qui a toujours défendu la probité de sa femme, s’était dit mercredi prêt à témoigner, mais uniquement par écrit, afin selon lui de «préserver» sa fonction. Mais le juge Peinado a refusé cette requête et maintenu sa convocation, en tant qu’époux de Begoña Gómez, malgré un appel du parquet.

Begoña Gómez, qui dirige un master de management à l’université Complutense de Madrid, est soupçonnée d’avoir utilisé les fonctions de son mari dans le cadre de ses relations professionnelles -notamment avec Juan Carlos Barrabés, un homme d’affaires espagnol.

L’enquête la visant a été ouverte après une plainte de Manos limpias («Mains propres»), un collectif proche de l’extrême droite qui a dit se fonder sur des articles de presse. Une deuxième association, Hazte oír («Fais-toi entendre»), ainsi que le parti d’extrême droite Vox, se sont depuis joints au dossier.

Entendu mi-juillet par le juge Peinado, M. Barrabés, qui enseigne dans le master dirigé par Mme Gómez, a reconnu l’avoir rencontrée à cinq ou six reprises à la Moncloa, dont deux fois en présence de Pedro Sánchez. Cet entrepreneur, qui aurait reçu des lettres de recommandation de Mme Gómez pour des appels d’offres de plusieurs millions d’euros, a toutefois assuré que ces réunions se limitaient à des questions sur l’innovation.

Une «stratégie de harcèlement»

Convoquée elle aussi par Juan Carlos Peinado, un magistrat de 69 ans dont plusieurs enquêtes ont déjà fait polémique, Mme Gómez avait choisi de garder le silence, son avocat Antonio Camacho assurant que cette procédure n’avait «pas de raison d’être».

Pedro Sánchez dénonce une «stratégie de harcèlement» émanant de «médias fortement marqués à droite» et soutenue selon lui par les partis d’opposition, à commencer par Vox. Le parti d’extrême droite, qui a obtenu le statut d’«accusation particulière» dans ce dossier, lui permettant d’avoir accès aux actes d’enquête, sera présent, via son avocate, à l’audition du responsable socialiste.

Juan Carlos Peinado, le juge qui doit entendre Pedro Sánchez comme témoin dans l’enquête visant son épouse Begoña Gómez, est devenu magistrat sur le tard après une carrière dans des administrations locales et a déjà mené des enquêtes ayant fait polémique.

Un juge qui fait polémique?

Le juge Juan Carlos Peinado, 69 ans, poursuit cette affaire malgré deux rapports de la Garde civile ayant conclu à l’absence d’infractions et malgré la demande de classement émanant du parquet fin avril. Ce magistrat du tribunal d’instruction N.41 de Madrid, père d’une conseillère municipale du Parti populaire (PP, droite) dans une commune proche de Madrid, a déjà mené des enquêtes ayant fait polémique.

En novembre 2019, il avait notamment mis en examen 12 journalistes pour des articles sur une affaire de terrorisme présumé -et classée confidentielle- visant sept militants de groupes indépendantistes catalans, une mis en examen annulée quelques jours plus tard à la demande du parquet.

En 2022, il accepte d’instruire une plainte du parti d’extrême droite Vox visant un éditeur, que le parti accuse de l’avoir présenté comme étant «héritier du nazisme» dans un livre éducatif -une phrase pourtant absente du livre en question, assure la défense, qui réclame en mai 2024 le classement de l’affaire.

Par Le360 (avec AFP)
Le 30/07/2024 à 07h33