Lors de sa visite, Mahmoud Abbas va demander à Bruxelles de "reconnaître l'Etat de Palestine", a affirmé dimanche à l'AFP le ministre palestinien des Affaires étrangères Ryad al-Malki, qui y voit "une façon de répondre" à la décision de Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d'Israël.
Le président de l'Autorité palestinienne (AP) sera reçu à la mi-journée par la cheffe de la diplomatie de l'UE, Federica Mogherini, et les 28 ministres des Affaires étrangères, en marge de leur réunion mensuelle, comme l'avait été le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu le 11 décembre. "Nous allons discuter avec lui des façons dont l'UE peut soutenir le redémarrage du processus de paix", au point mort depuis 2014, a expliqué Federica Mogherini avant le début de la réunion.
La venue de Mahmoud Abbas à Bruxelles coïncide avec une tournée sous tension du vice-président américain Mike Pence au Proche-Orient (Egypte, Jordanie et Israël), boycottée par les dirigeants palestiniens. Ripostant à la décision unilatérale du chef de la Maison-Blanche sur Jérusalem, la direction palestinienne rejette désormais tout "monopole américain" sur le processus de paix. Même si Mahmoud Abbas "reste engagé" dans ce processus, a assuré le chef de la diplomatie palestinienne.
Mais si l'UE veut contribuer à relancer les négociations de paix pour sauvegarder la "solution à deux Etats", il est clair que la reconnaissance d'un Etat palestinien n'est pas aujourd'hui sur la table. Certains Etats-membres pourraient cependant bientôt franchir le pas, comme la Slovénie, selon des sources palestiniennes.
Tout au plus, selon des diplomates, les Européens pourraient proposer la perspective d'un "accord d'association" entre l'UE et l'AP, comme il en existe un avec Israël. La France et l'Espagne, notamment, sont favorables à l'idée. "Nous voulons passer d'un accord intérimaire à un accord d'association et qu'on engage dès à présent un processus dans cette direction", a plaidé à son arrivée le ministre français Jean-Yves Le Drian.
"Je pense qu'on doit demander (à Abbas) de modérer la réponse aux décisions (américaines) que nous avons nous-mêmes désapprouvées. Et aider autant que nous pouvons", a argué l'Espagnol Alfonso Dastis.
"Nous n'en sommes qu'à une étape très préliminaire", a déjà prévenu un haut responsable européen, expliquant qu'un accord d'association ne pourrait être signé et ratifié qu'à condition que l'UE ait reconnu la Palestine comme un Etat indépendant.
Malgré le rappel constant des "positions inchangées" de l'UE -sur la solution à deux Etats dans les frontières de 1967, la colonisation israélienne ou le statut de Jérusalem-, les 28 ne peuvent masquer des "divergences de vues et des différences d'approche", reconnaît-on à Bruxelles. De toute façon, ce type d'accord ne saurait "remplacer" une reconnaissance en bonne et due forme de la Palestine, a estimé dimanche Ryad al-Malki.
Si le conflit israélo-palestinien est le plat de résistance de la réunion ministérielle, les discussions porteront aussi sur deux autres préoccupations régionales: la Libye, où l'UE s'applique à soutenir les efforts de l'ONU pour aider des migrants retenus dans des centres de détention à retourner dans leur pays, et l'Iran, après la remise en cause par Donald Trump de l'accord nucléaire.
Les trois pays européens signataires de l'accord (France, Royaume-Uni et Allemagne) et Federica Mogherini n'ont pas révélé comment ils comptaient répondre à l'ultimatum du président américain, qui réclame d'ici le 12 mai un accord de suivi pour pérenniser certaines clauses du pacte nucléaire, mais veut aussi interdire à Téhéran de développer des missiles balistiques.
"Cet ultimatum nous a pris par surprise", reconnaît un diplomate européen. Des consultations ont commencé pour tenter de "trouver la formule magique" qui permettrait de "garder Trump à bord", explique-t-il, "mais il n'y a encore rien de formalisé".
Les 28 ont également adopté lundi des sanctions contre sept hauts responsables du régime vénézuélien, en raison de la répression de l'opposition, et contre 17 Nord-Coréens impliqués dans les tests nucléaires et de missiles de Pyongyang.