D'après l'Institute for Health Metrics and Evaluation, basé aux Etats-Unis, 145 millions de personnes dans le monde ont souffert d'un Covid long en 2020 et 2021. "Au moins 17 millions d'Européens", selon une récente estimation de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Cela représenterait entre 10 et 20% des personnes ayant été infectées par le virus.
Fatigue, toux, essoufflement, fièvre intermittente, perte du goût ou de l'odorat, difficultés de concentration, dépression... le Covid long se manifeste par un ou plusieurs symptômes parmi une longue liste, généralement dans les trois mois après l'infection et persistant au moins deux mois. Le syndrome touche deux fois plus les femmes que les hommes.
"Il n'y a pas de symptômes vraiment spécifiques au Covid long mais ils ont quand même certaines caractéristiques: ils sont fluctuants avec une fatigue qui reste en toile de fond, ils semblent s'exacerber après un effort intellectuel ou physique et se raréfient au cours du temps", résume Olivier Robineau, infectiologue au centre hospitalier de Tourcoing et coordinateur sur le Covid long à l'Agence nationale-maladies infectieuses émergentes.
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De nombreuses équipes planchent à travers le monde pour comprendre les causes de ces symptômes. En France par exemple, l'hôpital de l'Hôtel-Dieu (AP-HP), l'Université de Paris et l'Inserm ont lancé fin 2020 une étude sur le Covid long au sein de la cohorte "ComPaRe" (https://compare.aphp.fr/covid-long/): "2.500 patients sont suivis très régulièrement, ce qui devrait nous permettre de comprendre les variations des manifestations de la maladie au cours du temps", explique le Dr Viet-Thi Tran, co-investigateur de la cohorte.
Mais la variabilité des symptômes et leur caractère non spécifique rend la recherche difficile. Jusqu'à présent, plusieurs hypothèses sont étudiées par les scientifiques.
L'une d'elles est la persistance du virus dans l'organisme chez certains individus. Ainsi, début septembre, une étude publiée dans "Clinical infectious diseases" concluait à la présence de la protéine Spike (la clé permettant au SARS-Cov 2 de pénétrer dans les cellules, ndlr) chez des patients atteints de Covid long. Ceci suggère une réplication virale ou la persistance de reliquats viraux longtemps après l'infection initiale.
Un virus vivant ou des reliquats de virus pourraient entretenir une activité inflammatoire, peut-être à l'origine des symptômes.
Ces résultats ne sont toutefois pas retrouvés par d'autres équipes.
D'autre pistes existent. Le virus aurait bien disparu après l'infection mais l'inflammation initiale, une fois enclenchée, aurait provoqué un dérèglement du système immunitaire.
Parcours multidisciplinaireL'hypothèse dite des "dommages tissulaires" évoque, elle, le rôle de l'épisode infectieux initial dans l'apparition de lésions durables au niveau de certains organes.
Des études ont encore mis en évidence l'atteinte de vaisseaux sanguins à la suite de l'infection.
"Pour chacune de ces hypothèses, les données ne sont pas encore très solides", affirme Olivier Robineau, faisant le pari qu'"on ne va pas trouver une cause unique pour expliquer le Covid long". "Les causes peuvent ne pas être exclusives, elles pourraient s'associer, voire se succéder chez un même individu et être différentes chez des individus différents", dit-il.
Il est difficile alors de trouver une solution pour ces malades du Covid long.
A l'Hôtel-Dieu à Paris, un protocole dit "CASPER" propose depuis un an un parcours de soin aux patients pendant une demi-journée: "Ils rencontrent un infectiologue ou un interniste, un psychiatre puis un médecin spécialiste en rééducation sportive", explique la Pr Brigitte Ranque, spécialiste en médecine interne, à l'origine de ce circuit.
"Dans l'expérience de l'équipe, une majorité des symptômes peut être attribuée à des +troubles somatiques fonctionnels+ (les symptômes résultent d'un déséquilibre de fonctionnement du système nerveux central, ndlr). De ce fait, un traitement cognitivo-comportemental est souvent associé à de l'activité physique supervisée".
"On rappelle les patients trois mois après: la majorité d'entre eux va mieux, plus de la moitié se disent guéris", détaille la Pr Ranque. "Mais environ 15% ne sont pas du tout améliorés", admet-elle.