Le gouvernement va "lancer une large concertation (...) en vue de l'adaptation progressive de la politique des transferts sociaux" et des subventions aux produits et services de base, a annoncé le Premier ministre aux députés. Ces transferts sociaux - aides au logement, à la santé et à l'éducation - ainsi que les subventions par l'Etat de produits alimentaires de base (semoule, lait, huile...) et de la fourniture d'eau et d'énergie, représentent 23,7% du PIB selon le FMI.
Ce dispositif-clé de l'économie algérienne, qui permet aujourd'hui à tous les Algériens de bénéficier de produits de base, d'eau courante et d'énergie à très bas coût, ainsi que de soins gratuits ou presque, pourrait, si la réforme aboutit, être modulé en fonction des revenus. Le gouvernement entend progressivement mettre en place un rééquilibrage tarifaire de la fourniture d'eau, de gaz, d'électricité ou de fioul, pour rapprocher le prix payé par les usagers du coût réel, selon le plan d'action présenté par Tebboune lors d'une séance nocturne, entamée à l'issue du 'ftor', le repas de rupture du jeûne du ramadan.
Il a assuré à la Chambre basse que seraient préservés "des tarifs appropriés aux ménages à bas revenu". Cette réforme annoncée "est une excellente mesure", a déclaré à l'AFP l'économiste Abderahmane Mebtoul, expliquant que ce système consommait un tiers du budget de l'Etat. Mais elle devra se faire en concertation avec "les forces économiques et sociales, sinon elle échouera", a-t-il souligné.
Un haut fonctionnaire du secteur économique, ayant requis l'anonymat, a de son côté estimé ce projet "vague" et "difficilement applicable en l'état". L'Algérie reste très largement dépendante des hydrocarbures (95% de ses recettes extérieures, 60% du budget de l'Etat) et subit de plein fouet la chute des cours du brut.
Le gouvernement est "conscient des limites d'une stratégie de croissance assise principalement sur la seule dépense publique", a expliqué Tebboune, se disant déterminé à développer "les secteurs productifs de richesses, de valeur ajoutée et d'emploi, gage de diversification de l'économie nationale fortement dépendante des hydrocarbures".
Renforcement du "climat des affaires" et poursuite des réformes du système bancaire - notamment en améliorant les possibilités de financement des micro-, petites et moyennes entreprises - sont des "objectifs-phares" du gouvernement, a-t-il assuré.
Le gouvernement entend attirer les investissements directs étrangers - notamment ceux permettant des transferts de technologie ou le développement des exportations hors hydrocarbures - mais n'envisage pas de remettre en cause la règle 51/49, a-t-il indiqué.
Cette mesure, souvent jugée rédhibitoire par les investisseurs étrangers, contraint les entreprises étrangères s'implantant en Algérie à s'associer à un partenaire local détenant au moins 51% du capital de la société créée. "La réforme de l'administration et la lutte contre la bureaucratie - et son corollaire la corruption - demeurent une préoccupation permanente" du gouvernement, a assuré M. Tebboune, annonçant une future "loi relative aux relations de l'administration avec les usagers".
Autres projets envisagés, la possibilité de saisir le Conseil constitutionnel d'une exception d'inconstitutionnalité de la loi et des textes sur la protection des données à caractère personnel, le droit à l'obtention des informations, documents, statistiques et leur circulation, les réunions et manifestations publiques, entre autres.
Le Premier ministre a également évoqué le renforcement de "la moralisation de la vie publique" avec l'élimination souhaitée des "situations de conflit d'intérêt et d'incompatibilité dans l'exercice des mandats et fonctions", sans toutefois annoncer de mesures concrètes. Il a également souligné que le gouvernement poursuivrait "inlassablement et sans relâche" la lutte contre le terrorisme et le renforcement du rôle et de la place de l'Algérie sur la scène internationale.
Les députés débattront jusqu'à vendredi de ce "plan d'action" gouvernemental qui sera ensuite soumis au vote. Le Front de libération nationale (FLN), au pouvoir depuis l'indépendance de l'Algérie en 1962, et son allié du Rassemblement national démocratique (RND) détiennent la majorité absolue, avec 261 sièges à eux deux sur les 462 de l'APN.