Depuis le début du mois de ramadan, deux séries télévisées marocaines se toisent en chiens de faïence sur le terrain de l’audience. D’un côté du ring, «L’Maktoub» (chaque jour à 20h15 sur 2M), qui en est à sa deuxième saison, a été suivie durant ces deux semaines par un total de 15,4 millions de téléspectateurs, d’après les chiffres publiés par le Centre interprofessionnel d’audimétrie médiatique (CIAUMED).
En face, «Kayna Dourouf» (chaque jour à 20h00 sur Al Aoula) qui, bien qu’encombrée de têtes d’affiche comme Raouia, Samia Akariou, Oussama Bastaoui et Rafik Boubker, reste à la traîne dans les mesures d’audience, totalisant 9 millions de téléspectateurs.
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Même sanction pour le duel transposé sur YouTube: «l’Maktoub 2» garde une confortable avance, avec un peu plus de 35 millions de vues, loin devant les quelque 22 millions de «Kayna Dourouf».
L’Maktoub 2 largement en tête, mais…
À première vue, les scores d’audience ainsi exposés sont sans appel, laissant fortement croire que la série réalisée par Alaa Akaâboune est la plus appréciée. Chose presque prévisible, puisqu’il s’agit de la suite d’une première saison à succès, qui avait l’année dernière, empilé les records d’audience. Son diffuseur avait même à l’époque émis un communiqué, annonçant que le 8ème épisode de la saison inaugurale a été le plus regardé de toute l’histoire des séries produites par la chaîne.
Tout le contraire pour «Kayna Douf», la série réalisée par Driss Roukh et écrite par Bouchra Malak, la même qui a signé la série à succès Bnat El Assas diffusée il y a trois ans sur Al Aoula. Ce mélodrame, qui raconte l’histoire de femmes qui se battent pour leur réinsertion dans la société après leur sortie de prison, voit son audience augmenter.
«Contrairement à “L’Maktoub 2″, “Kayna Dourouf” dénote d’un certain réalisme et d’une certaine crédibilité. En plus, son sujet est inédit à la télévision marocaine.»
— Mustapa Taleb, critique de cinéma
Cette deuxième saison en est-elle la digne héritière? Difficile de répondre par l’affirmative. Déjà, au niveau des audiences, «il n’y a pas photo»: sur la même période du mois de ramadan, le second opus avait rassemblé pratiquement deux fois moins de téléspectateurs. Ensuite, et surtout, la série ne cesse d’en perdre au fil des jours: de 8,3 millions durant la première semaine, ils sont passés à 7,1 millions pour la seconde.
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«Très attendue par le public, cette suite a inévitablement fait son lot de déçus. On perçoit une certaine désaffection, notamment parce que la Saison 2 raconte une histoire presque totalement différente, et le jeu des acteurs me semble beaucoup plus théâtral, plus apprêté… Quelque chose sonne faux!», tente d’expliquer Mustapha Taleb, critique de cinéma et enseignant en audiovisuel.
«Kayna Dourouf» sur une pente ascendante
Le constat est tout autre pour «Kayna Dorouf», réalisée par Driss Roukh et écrite par Bouchra Malak, déjà auteure il y a 3 ans de la série à succès «Bnat El Assas». Ce mélodrame, qui narre l’histoire de femmes se battant pour leur réinsertion dans la société après leur sortie de prison, voit son audience suivre une pente ascendante.
Durant la deuxième semaine, la série d’Al Aoula a ainsi séduit 5,1 millions de téléspectateurs, contre 4 millions durant la première. «Contrairement à “L’Maktoub 2″, “Kayna Dourouf” dénote d’un certain réalisme et d’une certaine crédibilité. En plus, son sujet est inédit à la télévision marocaine. Et pour parfaire le tableau, les personnages sont attachants et le jeu de la majorité des acteurs reste sobre et d’un naturel convaincant», adoube Mustapha Taleb. De quoi anticiper un futur croisement des courbes d’audience des deux séries, permettant à « Kayna Dourouf » de virer en tête? Wait and see…
Le mélodrame, recette gagnante
En attendant, il y a un point sur lequel les deux productions et leurs réalisateurs semblent parfaitement d’accord: leur registre. En effet, toutes deux sont des mélodrames assumés, jouant sur les mêmes ressorts dramatiques et des palettes émotionnelles similaires. Avec, il faut le reconnaître, un succès certain. De quoi encourager les producteurs à se consacrer presque systématiquement à cette famille de séries? Les belles années des comédies, parfois loufoques, voire à l’humour clownesque, semblent bel et bien révolues. Et peu s’en plaindront.
«Il s’agit certes une recette gagnante, mais jusqu’à quand? Les téléspectateurs marocains ont tendance à s’ennuyer très rapidement. À mon opinion, il serait peut-être temps de s’intéresser à d’autres genres, d’explorer d’autres terrains et univers», suggère Mustapha Taleb.