C’est un rendez-vous attendu par tout l’écosystème médiatique et publicitaire marocain. Les Assises nationales de la publicité, organisées par le ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, les 8 et 9 octobre prochain à Casablanca, invite les principaux acteurs du secteur à débattre des enjeux cruciaux liés à la régulation, à la transparence et à la souveraineté numérique.
Depuis mai dernier, plus de 100 réunions ont été tenues pour préparer cet événement, mobilisant une large coalition: ANME, FNM, FMEJ, FNPM, SNRT, 2M, régies publicitaires, FIIC, ARTI, ACC... Objectif : poser les jalons d’une loi sur la publicité, inexistante à ce jour au Maroc, alors qu’elle est déjà en vigueur dans plusieurs pays comme le Portugal, la Corée ou la France.
«Au Maroc, les médias veulent qu’il y ait des règles. Qui va les obliger à les appliquer? C’est la loi», affirme Younes Boumehdi, directeur général de Hit Radio, soulignant l’urgence d’un cadre juridique clair.

Un marché en pleine expansion, mais déséquilibré
Le marché publicitaire marocain a atteint près de 9 milliards de dirhams en 2024, dont 4,5 milliards pour le digital. Pourtant, moins de 10% de ces investissements bénéficient aux sites ou contenus marocains. Le reste est capté par les géants du numérique, les GAFAM, les cinq géants américains du numérique: souvent domiciliés dans des paradis fiscaux. «Quand un annonceur marocain investit par exemple 100 dirhams, le support local ne touche que 15 à 20 dirhams. Le reste est absorbé par les intermédiaires», déplore un professionnel du secteur.
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Ce déséquilibre alimente une concurrence biaisée entre les plateformes internationales et les médias locaux, qui peinent à mutualiser leurs efforts et à se rendre visibles dans les algorithmes dominants.
L’exemple européen
La France, dès 2016, avait convoqué les GAFAM et instauré une taxe basée sur des contributions volontaires. Résultat : un fonds de numérisation des médias doté de 80 millions d’euros par an, dont 22 millions versés par Google dans le cadre du programme «Journalism». Ce mécanisme a permis d’accélérer la transition numérique de la presse écrite.
«En Europe, ils se sont dit que ce n’était pas normal que les multinationales ne soient jamais imposées. C’est du dumping par rapport aux entreprises locales», rappelle un acteur du secteur.
L’OCDE a depuis adopté une règle imposant aux multinationales un taux minimum de 15% d’imposition dans les pays où elles opèrent, une mesure saluée comme un pas vers plus d’équité fiscale.
Vers une souveraineté numérique marocaine
La présence annoncée d’un représentant de META aux Assises est perçue comme un signal fort. Elle témoigne de l’intérêt croissant des géants du numérique pour le marché marocain et pourrait ouvrir la voie à des engagements concrets. «Si les gens de META viennent, cela signifie qu’il y a un intérêt pour le Maroc», estime Younes Boumehdi.
Ces assises pourraient ainsi marquer un tournant décisif pour le secteur, en posant les fondations d’une régulation ambitieuse, équitable et adaptée aux réalités du digital.








