Plus qu’un enjeu climatique, la décarbonation est aussi un défi économique à relever pour les exportateurs marocains avec l’instauration de la taxe carbone aux frontières de l’Europe. En effet, le Parlement européen et les Etats membres de l’Union européenne (UE) ont annoncé en décembre 2022 l’adoption d’un mécanisme visant à appliquer des «droits à polluer» aux importations européennes. Communément appelée taxe carbone, cette mesure, qui entre en vigueur le 1er octobre 2023, concerne les secteurs jugés les plus polluants, comme ceux de l’acier, de l’aluminium, du ciment, des engrais, de l’électricité ou encore de l’hydrogène.
Lors d’une conférence organisée jeudi 6 avril à Casablanca par l’hebdomadaire Finances News Hebdo, les acteurs de l’écosystème industriel ont confirmé la capacité du Maroc à relever le défi de la décarbonation et à en faire un atout compétitif pour accroître les exportations vers l’Europe.«La décarbonation de l’industrie va créer de nombreux emplois et représente une énorme opportunité pour le Maroc. cela élimine certains concurrents qui ne disposent pas des mêmes atouts que nous au Maroc», a souligné le ministre de l’Industrie et du commerce, Ryad Mezzour, lors de son intervention.
Du côté des industriels, l’optimisme était de mise. Si quelques contraintes liées au financement et à l’aspect technique ont été évoquées, un consensus s’est dégagé autour de la disposition des exportateurs à décarboner leur production et à tirer profit du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières européennes. «L’acier est parmi les secteurs qui vont subir la taxe carbone. Nous n’avions jamais, ou très peu, exporté vers l’Europe avant, mais avec les nouveaux produits que la Sonasid est en train de développer, le marché européen devient important», a indiqué le directeur général de la Sonasid, Ismail Akalay.
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Et ce dernier de poursuivre: «Nous produisons de l’acier à plus de 90% d’énergies renouvelables et nous avons une certification en cours pour être capables l’année prochaine de présenter un certificat audité qui prouve que nous faisons une économie de 250.000 tonnes de carbone qui nous permettra d’être exonérés de cette taxe.»
De son côté, le directeur général de TAQA Morocco, Omar Alaoui M’hamdi, a assuré de la capacité du Maroc à produire suffisamment d’énergie décarbonée pour répondre aux besoins de l’industrie nationale. «Le Maroc a des atouts majeurs pour décarboner son mix énergétique. Nous avons une capacité éolienne et solaire installée qui va nous permettre d’être très compétitifs à l’export. Mieux encore, nous sommes proches d’un marché majeur, ce qui nous donne la possibilité de devenir un exportateur d’énergie verte à l’avenir au lieu d’un importateur d’énergie fossile», a-t-il noté.
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Même son de cloche du côté du directeur général de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE) pour qui le Maroc se doit d’assurer sa souveraineté énergétique. «Quand on parle de décarbonation, on parle des volets économique, écologique, mais aussi géopolitique. C’est une question de souveraineté énergétique pour le pays. Plus on utilisera le solaire et l’éolien pour produire notre énergie, plus on sera indépendant énergiquement et c’est très important dans le contexte actuel», a-t-il insisté, avant de souligner lui aussi que le Maroc a les moyens de devenir un pays exportateur d’énergie verte.