Publié ce lundi 4 août 2025 par Bank Al-Maghrib (BAM), l’Autorité de Contrôle des Assurances et de la Prévoyance Sociale (ACAPS) et l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC), le nouveau rapport annuel sur la stabilité financière donne un aperçu actualisé de la situation des caisses de retraite au Maroc.
Pour les régimes relevant du secteur public (CMR-RPC et RCAR-RG), la revalorisation des salaires a permis une hausse des cotisations, contribuant à atténuer partiellement les déficits. Toutefois, le rapport souligne que cette dynamique n’a pas permis d’améliorer de manière significative la viabilité à long terme de ces régimes.
Au niveau de la CNSS, la même source indique que la branche long terme continue d’afficher un solde global positif, porté par une dynamique démographique favorable dans le secteur privé. Toutefois, la sous-tarification des droits au sein du régime, ainsi que l’assouplissement des conditions d’accès à la pension ou de restitution des cotisations, fragilisent ses équilibres à long terme.
Dans ce contexte, il devient de plus en plus indispensable de procéder à la réforme du secteur, souligne le rapport, ajoutant qu’une tarification équilibrée des régimes devrait être instaurée au terme de cette réforme permettant de résorber une grande partie des engagements non couverts des régimes et d’assurer leur soutenabilité à long terme.
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Dans le détail, les réserves du régime des pensions civiles (CMR-RPC) se sont situées à 57,4 milliards de dirhams enregistrant une baisse de 7,1% par rapport à 2023 et une régression de 6,4% en moyenne annuelle sur les cinq dernières années. Les déficits techniques cumulés du régime depuis l’enregistrement de son premier déficit technique en 2014 ont atteint un montant de 60,3 milliards de dirhams, dont 35,3 milliards sur les cinq dernières années.
Hormis les dépôts auprès de la CDG de la branche long terme de la CNSS d’un montant de 66,2 milliards de dirhams, les réserves des caisses de retraite sont représentées à hauteur de 54,3% par des titres de taux, de 34,3% par des actions et parts sociales et de 10,3% de placements immobiliers, indique le rapport.
Réforme systémique
Les cotisations du régime CMR-RPC ont enregistré une hausse significative de 10,6% pour se situer à 31,9 milliards de dirhams contre 28,9 milliards en 2023. Cette progression résulte principalement de l’application, à compter de juillet 2024, de la première tranche d’augmentation des salaires convenue dans le cadre du dialogue social. Cette dynamique devrait se maintenir au cours des exercices 2025 et 2026, portée par la mise en œuvre de la seconde tranche de cette revalorisation salariale prévue à partir de juillet 2025, précise le document.
Les prestations du régime ont progressé de 6% atteignant 39,1 milliards de dirhams. Le déficit technique s’est ainsi légèrement atténué, passant de 8 milliards de dirhams à 7,2 milliards. Le solde global du régime s’est situé quant à lui à -4 milliards de dirhams grâce à un résultat financier de 3,4 milliards de dirhams.
Les projections financières du régime CMR-RPC en 2024 confirment globalement les prévisions établies l’année précédente intégrant les augmentations salariales. Ces dernières permettraient principalement d’améliorer les indicateurs d’équilibre du régime à long terme, notamment son taux de préfinancement et le taux de cotisation d’équilibre. En revanche, les flux de trésorerie générés par cette masse salariale supplémentaire ne permettraient de retarder la date d’épuisement des réserves que de deux à trois années.
Le régime RCAR-RG a également enregistré une progression notable de ses cotisations en hausse de 6,9% (contre 2,2% une année auparavant) pour atteindre 3,5 milliards de dirhams. Cette évolution s’explique également par l’apport des revalorisations salariales issues du dialogue social. Les prestations ont, quant à elles, suivi une trajectoire similaire, progressant de 5,4% pour s’établir à 8,1 milliards de dirhams. Le déficit technique du régime s’est ainsi légèrement aggravé, passant de 4,4 milliards à 4,5 milliards de dirhams. Toutefois, grâce à la bonne performance financière de 5,9 milliards de dirhams, le solde global du régime est devenu excédentaire à 1,2 milliards de dirhams contre un déficit de 317 millions de dirhams en 2023.
S’agissant des perspectives financières du régime à long terme, la révision des salaires aurait un impact modérément positif sur l’horizon de viabilité du régime. Néanmoins, ces augmentations de salaire, combinées à la sous tarification du régime, induiraient une dégradation de ses indicateurs d’équilibre notamment son taux de préfinancement, ajoute la même source.
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Les situations de déséquilibre financier que continuent de connaître les deux régimes du secteur public soulignent l’urgence de mettre en place une réforme systémique de ces régimes, souligne le rapport.
Le régime CMR-RPC, bien que bénéficiant d’une tarification équilibrée instaurée à la suite de la réforme paramétrique de 2016, le poids des droits acquis dans le régime, antérieurement à cette réforme, pèse toujours lourdement sur sa viabilité et réduit en conséquence ses marges de manœuvre.
De son côté, le régime RCAR-RG reste confronté à une sous-tarification des droits accordés à ses affiliés. Malgré la réforme paramétrique introduite en 2021, le rapport prestations/cotisations demeure supérieur à 140%. Cette situation conduit, d’année en année, à une accumulation d’engagements non couverts, fragilisant davantage l’équilibre du régime.
CNSS: une réforme paramétrique indispensable
La branche long terme de la CNSS a enregistré en 2024 un excédent global de 4 milliards de dirhams, en hausse de 273 millions par rapport à l’année précédente. Cette évolution s’explique principalement par la progression des cotisations collectées qui ont atteint 19,3 milliards de dirhams, en hausse de 6,7% par rapport à 2023. Les prestations, quant à elles, se sont élevées à 16,9 milliards de dirhams, en progression de 6,3%, ce qui situe le solde technique à 2,4 milliards de dirhams.

En ce qui concerne les perspectives d’équilibre de la branche, son taux de préfinancement se situe à 61%, ce qui traduit la sous-tarification des droits octroyés dans le régime. La dynamique démographique du secteur privé a permis l’adoption de mesures en faveur des affiliés de la branche, notamment la revalorisation des pensions à partir de 2022 et la réduction de la durée minimale de cotisation pour l’ouverture du droit à la pension, passée de 3.240 à 1.320 jours. Afin de préserver la viabilité sur le long terme, le rapport estime qu’il est nécessaire d’engager une réforme paramétrique visant à garantir la pérennité financière du régime. Celui-ci dispose encore d’une marge de manœuvre pour renforcer sa soutenabilité, à travers notamment la révision du taux de cotisation, le relèvement de l’âge de départ à la retraite et l’adaptation du mécanisme d’acquisition des droits favorisant l’équité entre les affiliés du régime.
S’agissant de la CIMR, le régime a enregistré une hausse des cotisations de 8,8%, s’élevant à 12 milliards de dirhams. Les prestations ont progressé de manière plus modérée (+3,5%), pour atteindre 7 milliards de dirhams. Cette dynamique a permis une amélioration de l’excédent technique, qui passe de 4,3 à 5 milliards de dirhams. Avec un solde financier de 4,1 milliards de dirhams, le solde global du régime s’établit à 8,2 milliards de dirhams en progression de 4,9% par rapport à son niveau en 2023. Selon les évaluations actuarielles, cet excédent devrait se maintenir sur l’horizon des projections, permettant ainsi aux réserves de poursuivre leur tendance haussière, conclut le rapport sur la stabilité financière.








