Google, Apple, Facebook ou Amazon, souvent désignés par l'acronyme GAFA, sont des mastodontes: Apple est la première capitalisation boursière à près de 800 milliards de dollars. Celle d'Alphabet, la maison mère de Google, atteint près de 650 milliards de dollars. Plus de 2 milliards de personnes consultent leur compte Facebook chaque mois.
Google détient 90% du marché de la recherche sur internet aux Etats-Unis et en Europe et, avec Facebook, draine plus des trois quarts du marché publicitaire sur internet aux Etats-Unis.
Le géant de la vente en ligne Amazon est pour sa part accusé de tuer le petit commerce, un reproche relayé récemment par le président américain Donald Trump, hostile de façon générale à la Silicon Valley, considérée comme un bastion progressiste.
Ces groupes sont dans le viseur des autorités européennes, qui ont notamment sanctionné Google pour abus de position dominante ou tentent de taxer davantage les GAFA.
Mais même aux Etats-Unis, de plus en plus de voix venant de tous horizons idéologiques s'élèvent pour dénoncer leur influence.
Selon un sondage publié lundi par le quotidien USA Today dans un article titré "Amazon, Google et Facebook sont-ils trop gros?" 76% des Américains interrogés estiment que les entreprises technologiques ont trop d'influence dans leurs vies. Parmi ceux qui pensent ainsi, 52% jugent cette influence "mauvaise".
Google, Facebook et Amazon "ont plus de pouvoir qu'aucun autre monopole jusqu'ici" et "nous devons nous (en) inquiéter très fortement", lance Barry Lynn, directeur de l'Open Markets Institute, très virulent contre les GAFA depuis qu'il a été renvoyé d'une fondation co-financée par Google.
Ils sont aussi dans le collimateur de l'organisation "New Center", créée récemment par des personnalités politiques de gauche et de droite.
"Les grands groupes tech ont des moyens quasi illimités, qu'ils peuvent utiliser pour faire du lobbying", regrette Bill Galston, ex-conseiller de l'ancien président démocrate Bill Clinton et co-fondateur de "New Center". "Est-ce bon pour la démocratie?" s'interroge-t-il...
Cet été, le très à droite Steve Bannon, un temps conseiller de Donald Trump, voulait imposer des régulations à Google et Facebook semblables à celles dont font l'objet les opérateurs de téléphonie ou du câble.
Particulièrement ciblé, Facebook se retrouve mêlé à l'enquête des autorités américaines sur une possible influence russe dans l'élection de 2016 remportée par Donald Trump.
Le groupe a révélé de lui-même que des comptes activés depuis la Russie avaient acheté des espaces publicitaires pour créer des tensions lors de la campagne. Sous pression, son PDG et fondateur Mark Zuckerberg s'est engagé à fournir le contenu de ces annonces au Congrès.
Mais pour certains, Facebook a tardé à réagir, sous-estimant les possibilités d'utilisation du réseau à des fins malveillantes.
"Il sera important pour la commission (d'enquête) de s'assurer de la rigueur de l'enquête interne de Facebook, de vérifier ses conclusions et de comprendre pourquoi cela lui a pris aussi longtemps pour découvrir" les contenus financièrement liés à la Russie, a réagi le parlementaire démocrate Adam Schiff.
Le Congrès prévoit aussi d'entendre Google ou Twitter dans le cadre de l'enquête russe.
Selon le Washington Post, Barack Obama aurait lui-même mis en garde l'an dernier Mark Zuckerberg contre l'influence russe.
Comme pour d'autres controverses récentes, Facebook assure de sa bonne foi en expliquant que ses algorithmes sont utilisés à des fins malveillantes à son insu.
"Nous n'avons jamais voulu -ni prévu- que cette fonctionnalité puisse être utilisée de cette façon", avait ainsi écrit la semaine dernière la numéro deux du groupe Sheryl Sandberg, à propos d'une autre polémique, sur des filtres permettant aux annonceurs de cibler certains utilisateurs grâce à des expressions racistes ou antisémites.
"Un aveu de naïveté", pour le New York Times, qui estime que Facebook, telle la créature de Frankenstein, a échappé à son créateur.
Malgré toutes ces critiques, il est peu probable que les Etats-Unis se lancent dans une réforme.
Pointant "les bénéfices évidents pour le consommateur de l'innovation technologique", Maureen Ohlhausen, la présidente de la Federal Trade Commission, le régulateur du commerce, s'est montrée elle-même hostile à l'idée d'utiliser la législation antitrust contre les GAFA.