La guerre des monnaies divise le Yémen

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Revue de presseKiosque360. Le gouvernement du Yémen et les rebelles Houthis sont désormais engagés dans une "guerre des monnaies" qui vient encore compliquer l'existence d'une population déjà exsangue, confrontée depuis des années à la pire crise humanitaire au monde.

Le 22/08/2021 à 23h07

Dans son édition électronique, le magazine Le Point revient sur le conflit «monétaire» qui oppose d’un côté le gouvernement yéménite et les rebelles Houthis. Dans un pays en conflit depuis sept longues années, les parties rivales utilisaient encore jusqu'à fin 2019 la même monnaie, précise l’hebdomadaire.

Mais, le riyal a été rattrapé par les divisions yéménites: les rebelles ont alors banni de leurs territoires des nouveaux billets imprimés à Aden (sud), siège du gouvernement en exil. Conséquence principale: ces billets se sont accumulés dans les territoires sous contrôle loyaliste, y entraînant une dépréciation sans précédent du riyal, et une inflation galopante.

Depuis, la donne a changé. Selon Le Point, la monnaie «nationale» a atteint un plus bas historique ces dernières semaines, dans les territoires gouvernementaux —plus de 1.000 riyals pour un dollar — quand le taux de change est resté stable dans les zones sous contrôle Houthis — autour de 600 riyals pour un dollar.

«Nous constatons désormais deux taux pour une même monnaie (...). D'un point de vue économique, c'est une aberration", commente Amal Nasser, économiste au Sana'a Center For Strategic Studies, dans les colonnes du site du magazine. Selon plusieurs témoignages, ce différentiel fait aussi que les Yéménites paient au prix fort tout virement entre les deux zones, avec d'importantes commissions.

Ce pays divisé entre les territoires Houthis du nord -- comprenant la capitale Sanaa -- et le sud aux mains du gouvernement vit depuis plusieurs années la pire crise humanitaire au monde, selon l'ONU, rappelle l’hebdomadaire. Alors que le Yémen d'avant-guerre faisait déjà office de nation la plus pauvre de la péninsule arabique, écoles, usines, hôpitaux et entreprises ont depuis été détruits ou fermés.

Sur le plan monétaire, après la prise de Sanaa par les Houthis en 2014, le gouvernement a transféré la Banque centrale à Aden. Des années plus tard l'unité a aussi volé en éclats, précise Le Point.

Début août, face à la dégringolade du taux de change dans les territoires gouvernementaux, la Banque centrale a annoncé vouloir retirer progressivement les nouveaux billets ?- ceux bannis par les Houthis -- de la circulation. En parallèle, elle a annoncé injecter sur le marché d'anciennes coupures.

"Evidemment, cette (nouvelle) injection de monnaie affectera négativement (l'économie), en suscitant une hausse de l'inflation, ce qui affectera le pouvoir d'achat du citoyen", déjà réduit à peau de chagrin, dénonce auprès de l'AFP Alaa al-Haj, un habitant d'Aden.

Par Khalil Rachdi
Le 22/08/2021 à 23h07