Depuis la suspension des livraisons de gaz via le gazoduc Maghreb-Europe (GME) par l’Algérie, le Maroc s’est tourné vers l’Espagne pour son approvisionnement. Selon Enagás, la société publique espagnole responsable de la gestion du GME, citée par le site d’information espagnol The Objective, les importations marocaines de gaz en provenance d’Espagne ont augmenté de près de 1.200% depuis la fermeture du gazoduc côté algérien.
En détail, le Maroc a importé pour 60 gigawattheures (GWh) en juin 2022, via l’interconnexion internationale de Tarifa. Depuis, une tendance haussière s’est observée et s’est maintenue durant les mois suivants: 172 GWh en juillet, 119 GWh en août, 123 GWh en septembre, 328 GWh en octobre, 553 GWh en novembre, 527 GWh en décembre, 536 GWh en janvier, 680 GWh en février, et 820 GWh en mars 2023.
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Selon des experts interrogés par The Objective, cette hausse constante s’explique par le mécanisme ibérique qui a rendu le prix du gaz transitant par le GME plus compétitif, permettant ainsi au Maroc de bénéficier d’une source d’énergie à un prix attractif.
Un partenariat qui dérange
Cependant, cette coopération entre le Maroc et l’Espagne n’a pas été bien reçue par la partie algérienne. Cette dernière a déclaré, en avril 2022, seulement quatre mois après avoir décidé de cesser de fournir du gaz au Maroc via le GME (qui prenait sa source dans les gisements d’Algérie et se terminait en Espagne après avoir transité par le Maroc), qu’elle annulerait son contrat avec l’Espagne si le gaz algérien était transmis au Maroc par le biais d’un autre réseau.
L’Algérie s’est vu promettre par l’Espagne que le gaz serait fourni au Maroc à partir d’autres sources, telles que les États-Unis à partir de ses installations de regazéification ou ses usines flottantes. «Cette mesure vise à maintenir des relations économiques et commerciales fructueuses entre les deux royaumes, qui sont indispensables pour leur sécurité et leur économie», explique un expert espagnol.
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En conséquence, Enagás a mis en place un système complexe pour s’assurer que le gaz acheminé vers le Maroc ne provienne pas des gisements algériens. «Ce système permet de mesurer chaque molécule de gaz transportée, depuis l’arrivée du gaz naturel liquéfié (GNL) via les méthaniers jusqu’aux usines espagnoles de regazéification», explique un expert espagnol.
Le choix du Maroc d’importer du gaz via un port espagnol, inversant ainsi le flux du GME, aura sans doute un impact direct sur la production nationale d’électricité, notamment sur l’approvisionnement des deux stations à gaz de Tahaddart et d’Aïn Beni Mathar, qui étaient à l’arrêt depuis la suspension des livraisons du GME.