Pour autant, ces embauches ne suffiront pas à compenser le naufrage du marché de l'emploi américain.
Du transport aérien au tourisme et l'hôtellerie en passant par la restauration, nombre de secteurs ont vu leur activité se réduire comme peau de chagrin ces dernières semaines en raison des mesures draconiennes prises pour endiguer le nouveau coronavirus qui se répand aux Etats-Unis. Et la première économie du monde a violemment plongé dans la récession.
Partie de Chine fin 2019, le coronavirus a infecté plus de 16.630 personnes et fait 216 morts dans le pays, selon les dernières projections de l'université Johns Hopkins. Cette pandémie a provoqué partout dans le monde des ruées vers les supermarchés pour faire des stocks de denrées par crainte de pénurie. Les Etats-Unis n'ont pas échappé à cette panique.
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Résultat, la chaîne de distribution américaine Walmart, premier employeur aux Etats-Unis avec 1,5 million d'"associés", a annoncé jeudi l'embauche de 150.000 personnes pour faire face à la demande accrue. Le groupe va aussi verser 365 millions de dollars en bonus à ses employés payés à l'heure pour les récompenser de leur "dur travail" pendant "cette crise sanitaire nationale sans précédent".
C'est aussi une façon de fidéliser ces travailleurs, qui occupent les emplois les plus précaires, et d'assurer que les magasins puissent poursuivre une activité normale alors que le coronavirus n'épargne personne.
Rodney McMullen, PDG de la chaîne de supermarchés Kroger, qui possède notamment l'enseigne Fred Meijer et Harris Teeter, a indiqué de son côté que le groupe —plus grande chaîne de supermarchés aux Etats-Unis—, avait actuellement 10.000 postes vacants.
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"Au cours de la dernière semaine, nous avons embauché plus de 2.000 personnes", a-t-il indiqué à la radio NPR, évoquant "une flambée de la demande" nécessitant plus de bras. En outre, il est indispensable de relayer les équipes qui travaillent d'arrache-pied, de leur permettre de travailler un nombre d'heures raisonnables et de prendre des jours de repos "car l'environnement est très stressant", a-t-il reconnu.
Le patron a par ailleurs expliqué qu'il travaillait en partenariat avec divers hôtels et restaurants, qui ont été contraints aux licenciements. "Nous avons beaucoup de chance de pouvoir faire venir des gens et ce sont des gens très talentueux", a commenté M. McMullen. "Et cela nous aide vraiment à continuer de répondre aux demandes et aux attentes de nos clients", a-t-il poursuivi. Quoique significatives, ces embauches sont une goutte d'eau dans l'océan des suppressions d'emplois. Les données officielles indiquent une augmentation sans précédent des licenciements.
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"Le prochain rapport sur les demandes d'allocations chômage pour la semaine du 15 au 21 mars devrait faire état de quelque 2,5 millions de demandes", contre 281.000 demandes la semaine précédente (+70.000), prédit Goldman Sachs dans une note. Ce serait le niveau le plus haut jamais enregistré.
"Les données d'un large éventail de secteurs suggèrent également une baisse sans précédent des revenus dans de nombreuses industries. Les dépenses de consommation pour les sports et les divertissements, les hôtels, les restaurants et les transports publics en particulier ont déjà considérablement chuté", explique Goldman Sachs. En attendant, le géant du commerce en ligne Amazon est en train, lui, de recruter 100.000 personnes.
"Il faut prendre ces annonces avec précaution", a réagi Gregory Daco, chef économiste chez Oxford Economics, soulignant que le confinement national était devenu inéluctable même si Donald Trump n'envisage pas encore cette possibilité. "Et même si les gens vont consommer un peu plus à la maison, la consommation de services va être considérablement réduite", ajoute M. Daco. Il s'attend, lui, à plus de quatre millions de demandes d'allocations chômage cette semaine. Et à ce rythme, le taux de chômage pourrait dépasser les 20% au mois d'avril, dit-il.
De nombreux économistes avancent une contraction de plus 10% du produit intérieur brut pour le deuxième trimestre. "Nous nous attendons a une contraction de 13%, mais la réalité pourrait être bien pire", conclut Gregory Daco.
C'est ce que veut éviter à tout prix l'administration Trump qui a proposé un plan de relance de 1.000 milliards de dollars. Celui-ci est actuellement examiné au Sénat. Les Républicains escomptent un accord vendredi soir pour un vote lundi. Mais ce plan ne suscite pas l'enthousiasme des démocrates, qui lui reprochent de "placer les entreprises avant les gens", comme l'a souligné leur leader au Sénat Chuck Schumer.