Budget de l’État: ce que pèse la fonction publique

L'Université Mohammed V de Rabat.. Adil_Gadrouz

Revue de presseSi le nombre de fonctionnaires civils recule légèrement, la masse salariale continue de peser lourd sur les finances publiques. À l’université, les départs massifs à la retraite menacent la continuité de l’enseignement et de la recherche, malgré les mesures incitatives et les créations de postes. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Les Inspirations Éco.

Le 26/10/2025 à 18h21

Le Maroc compte aujourd’hui 576.062 fonctionnaires civils. C’est ce que révèle le dernier décompte adossé au Projet de Loi de Finances (PLF) 2026.

En dix ans, de 2016 à 2025, les effectifs ont reculé en moyenne de 1,61%. Une tendance attribuée à la fois aux départs massifs à la retraite, notamment dans l’Éducation nationale, et à la montée en puissance du recrutement régionalisé des enseignants par les académies.

Malgré la légère baisse des effectifs, indique le quotidien Les Inspirations Éco, la masse salariale continue de peser lourd sur les finances publiques. En moyenne, l’État a consacré 10,67% du PIB au paiement des salaires et à la couverture sociale de ses agents. Pour 2025, la facture s’élève à 180,3 milliards de dirhams, soit plus du double de ce que rapporte chaque année l’Impôt sur les sociétés, principale recette du Trésor.

Le gouvernement en est conscient: la maîtrise de la masse salariale demeure un enjeu majeur. Pourtant, chaque cycle de dialogue social se solde par de nouvelles concessions. Depuis 2022, les augmentations successives négociées avec les syndicats ont engendré près de 40 milliards de dirhams de dépenses structurelles supplémentaires.

Sur une décennie, les dépenses de personnel sont passées de 116,86 à 180,27 milliards de dirhams, soit une progression de 54,3%, l’équivalent d’une croissance annuelle moyenne de 4,43%, écrit Les Inspirations Éco. D’après les projections de la Caisse marocaine des retraites (CMR), 68.418 fonctionnaires partiront à la retraite d’ici 2030 pour limite d’âge. Les départements les plus touchés seront ceux comptant les plus gros effectifs, notamment l’Education nationale avec plus de 31.000 départs, soit 13,9% des effectifs, l’Enseignement supérieur où 18,6% des enseignants quitteront le service, l’Intérieur avec 15.617 départs prévus et la Santé avec 6.064 départs.

Si certains ministères compensent par de nouveaux recrutements, la situation est bien plus critique à l’université. D’ici juin 2027, près de 5.000 professeurs prendront leur retraite, auxquels s’ajouteront 861 enseignants qui feront valoir leurs droits anticipés.

Sur les campus, l’inquiétude est palpable. Présidents d’université et doyens de faculté redoutent une hémorragie sans précédent. Les départs s’accélèrent, mais la relève peine à suivre.

L’État, pour sa part, n’applique plus la règle du remplacement systématique des départs, ce qui creuse davantage le déficit, a-t-on pu lire. Selon le ministère des Finances, huit suppressions de postes budgétaires sur dix proviennent désormais des départs à la retraite.

Pourtant, l’enseignement supérieur reste un secteur prioritaire. En 2025, il bénéficiera de 2.349 nouveaux postes budgétaires, un chiffre qui le place juste derrière les ministères de l’Intérieur, de la Défense et de la Santé. Sur la période 2016–2025, ces quatre départements ont concentré 64,3% des 139.000 emplois créés dans la fonction publique.

Mais un poste inscrit au budget ne garantit pas un recrutement effectif, indique Les Inspirations Éco. Les universités font face à une double équation: manque de candidats qualifiés et lenteur des procédures administratives.

Pour tenter de freiner l’hémorragie, les pouvoirs publics ont instauré une dérogation spéciale permettant de repousser l’âge de la retraite pour les professeurs d’université. Ceux-ci peuvent, sur demande, prolonger leur activité au-delà de 65 ans, pour une durée de deux ans renouvelable deux fois, soit jusqu’à 71 ans.

Mais la mesure, présentée comme une forme de flexibilité, ne séduit guère. En raison de la fiscalité plus avantageuse appliquée aux pensions, il est souvent plus rentable de partir à 65 ans que de prolonger sa carrière et être imposé à plein taux.

Pire encore, le ministère de l’Enseignement supérieur a été surpris par une vague de demandes de départs anticipés, au point de devoir ordonner aux universités de geler temporairement les autorisations.

Les incitations mises en place (revalorisation salariale de 3.000 dirhams sur trois ans et création d’un nouveau grade D pour les professeurs) n’ont pas suffi à endiguer cette tendance.

Entre la nécessité de rationaliser la masse salariale et celle de préserver la qualité du service public, notamment dans l’enseignement supérieur, l’État marche sur une ligne de crête.

Par La Rédaction
Le 26/10/2025 à 18h21