Il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Le Maroc semble l’avoir compris en diversifiant ses sources d’approvisionnement en blé au cours des six dernières années. Une stratégie efficace qui a permis au Royaume d’être à l’abri de la fluctuation des prix dans un marché international instable.
Concrètement, le Maroc a acheté près de 20 millions de tonnes de blé tendre dans 22 pays entre 2018 et 2023, d’après des données de la Fédération nationale des négociants en céréales et légumineuses (FNCL) compilées par Le360.
Au total, 2.904.756 tonnes de blé ont été importées en 2018. Des expéditions dont plus d’1,7 million de tonnes provenaient d’Europe de l’Est, principalement d’Ukraine (1.265.018 tonnes) et de Russie (459.185 tonnes). Ces deux pays étaient d’ailleurs respectivement premier et troisième fournisseur du Royaume cette année. La France occupait le deuxième rang avec 689.936 tonnes.
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Un an plus tard, le volume des importations a chuté pour s’établir à 1.453.161 tonnes. Quatre nouveaux pays, la Lituanie, la Pologne, la Grande Bretagne, et l’Allemagne rejoignent le club des exportateurs.
L’Europe de l’Ouest et de l’Est, principaux fournisseurs
Un grand changement s’opère dans le trio de tête. La France, avec ses 690.197 tonnes exportées, supplante l’Ukraine (2ème avec 431.380 tonnes) et devient le premier fournisseur du Maroc. L’Allemagne (133.796 tonnes) ferme le podium.
Résultats: les principales cargaisons de blé émanaient d’Europe de l’Ouest, soit plus de 831.000 tonnes, devant celles de l’Europe de l’Est avec ses plus de 527.000 tonnes.
Source : FNCL.
En 2020, fameuse année coïncidant avec l’épicentre de la Covid-19, les importations marocaines ont monté en flèche pour atteindre 4.220.973 tonnes. L’Office des changes révélait d’ailleurs en décembre de la même année, que le montant des importations de blé du Maroc s’élevait à plus de 2 milliards de dirhams à fin octobre 2020, soit une hausse de 44% par rapport à la même période en 2019.
Le contexte pandémique, conjugué à une sécheresse persistante, pousse donc les négociants à accroître leurs volumes sur le marché international, en rajoutant de nouveaux greniers dans leurs factures, en l’occurrence la Lettonie, l’Estonie, la Finlande et les Pays-Bas. La France (1.730.020 tonnes) conserve sa première place, devant l’Ukraine (907.433 tonnes) et la Russie (361.836 tonnes) qui devance l’Allemagne (4ème) pour s’adjuger la troisième place.
Baisse des importations en 2021
L’Europe de l’Ouest reste le premier pourvoyeur de blé du Royaume avec un volume de plus de 2,1 millions de tonnes, contre plus d’1,9 million de tonnes pour l’Europe de l’Est. L’Amérique du Nord (Canada) et l’Amérique Latine (Argentine) arrivent loin derrière avec respectivement 61.642 tonnes et 27.050 tonnes.
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Après avoir emprunté un trend haussier, les importations de l’«or brun» du Maroc baisse pour se stabiliser à 3,4 millions de tonnes en 2021. La très bonne récolte céréalière de la campagne 2020-2021 qui avait atteint 103,2 millions de quintaux, soit une hausse de 221% par rapport à la précédente, n’y est pas étrangère.
La Bulgarie et la Suède, qui avaient quitté le navire des fournisseurs depuis 2018, de même que les Etats-Unis (depuis 2019) réintègrent la liste. Le Brésil, l’Espagne et la Serbie effectuent leur entrée.
Petit changement dans le haut du tableau. L’Argentine occupe désormais le troisième rang avec ses 523.788 tonnes expédiées, derrière la France (1.026.396 tonnes) et l’Ukraine (805.381 tonnes). L’on note également la présence de la Pologne (391.996 tonnes) et de la Lettonie (141.365 tonnes) dans le Top 5.
Source : FNCL.
En 2022, nouvelle hausse des cargaisons dans les ports marocains, avec 5.275.917 tonnes importées. Une progression qui s’explique notamment par la baisse de 62% de la récolte céréalière durant la campagne 2021-2022 par rapport à la précédente, avec seulement 34 millions de quintaux, dont 18,9 millions de quintaux de blé tendre.
La guerre entre la Russie et l’Ukraine, qui a débuté le 24 février 2022, a contraint les négociants marocains à modifier leurs plans. Moscou quitte la liste des fournisseurs de blé de Rabat, Kiev régresse et occupe désormais le 7ème rang avec seulement 64.292 tonnes livrées.
«Cette importante hausse des approvisionnements s’explique par le souci de prendre des précautions face au risque de pénurie de blé causé par la guerre russo-ukrainienne », avait récemment déclaré une source autorisée à la FNCL, contactée par Le360.
Source : FNCL.
La France consolide sa place de leader avec plus de 3 millions de tonnes, suivie de l’Argentine (878 292 tonnes) et de l’Allemagne (360.304 tonnes). Le Brésil avec 268.604 tonnes, et la Pologne (215.711 tonnes) complètent le quinté.
Cette tendance s’est confirmée durant le premier semestre 2023. Sur les 2.241.115 de tonnes de blé tendre importées, plus d’1 million provient de la France, 758.908 tonnes de l’Allemagne, et 156.104 tonnes de la Pologne. S’ensuivent la Roumanie (4ème) avec 138.185 tonnes et la Lettonie (5ème) (60.249 tonnes).
Près de 10 milliards de primes versées par l’Etat
Si le Maroc a pu diversifier ses approvisionnements en blé au cours de ces six dernières années, c’est notamment grâce aux subventions mises en place par le gouvernement, pour encourager les importations de cette céréale si prisée. Des restitutions qui consistent à payer la différence entre le prix du blé importé et le prix d’importation de référence de 270 dirhams par quintal.
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D’après notre source à la FNCL, les primes forfaitaires ont atteint plus de 12 milliards de dirhams entre le 1er novembre 2021 et le 31 mai 2023. Et sur ce montant, l’Etat a remboursé un peu moins de 10 milliards de dirhams aux importateurs.
«Selon l’Office national interprofessionnel des céréales et des légumineuses (ONICL), il resterait 2,5 milliards en instance de règlement sur ces 12 milliards, sans compter les nouveaux montants générés pour les mois de juillet, août et septembre 2023», précise-t-elle.