Lancé en grande pompe pour moderniser le parc vieillissant des autocars marocains, le programme de renouvellement des véhicules de transport routier de voyageurs semble s’enliser dans l’inefficacité. Un an après son entrée en vigueur, les résultats sont pour le moins déconcertants, constate le quotidien L’Economiste dans son édition du mercredi 9 juillet. Citant Younes Boulaq, président de la Fédération marocaine des petites et moyennes entreprises de transport routier, le quotidien précise que seuls deux autocars auraient été renouvelés en 2024, l’un à Meknès, l’autre à Tanger. «Du côté de la NARSA (Agence nationale de la sécurité routière), chargée de piloter le programme, c’est le silence radio. Aucune donnée officielle n’a été publiée à ce jour», relève L’Economiste.
Doté d’un budget de 200 millions de dirhams annuels pour la période 2024-2026, le dispositif vise à accompagner les transporteurs dans la mise à niveau de leurs véhicules, en offrant une prime à la casse pour tout remplacement d’autocar ancien par un modèle plus récent, neuf ou d’occasion, à condition que ce dernier n’ait pas plus de 7 ans. Une exigence qui, dans la réalité du terrain, s’est vite révélée impraticable.
«Un autocar neuf coûte autour de 2,4 millions de dirhams. C’est inaccessible pour la majorité des professionnels, même avec la subvention», déplore Younes Boulaq. Quant aux modèles d’occasion de moins de 7 ans, ils sont tout simplement introuvables sur le marché. «Aucun opérateur ne voudra se séparer d’un véhicule aussi récent», ajoute-t-il.
Ce constat d’échec soulève de nombreuses critiques quant à la conception même du dispositif. L’arrêté conjoint du 11 juillet 2024, signé par les ministres du Transport et du Budget, avait pourtant été modifié en avril dernier lors du conseil d’administration de la NARSA. «Mais les ajustements restent visiblement insuffisants», écrit L’Economiste.
Pour tenter de débloquer la situation, les professionnels proposent plusieurs pistes. D’abord, relever l’âge maximum des autocars d’occasion éligibles à 10 ans, au lieu de 7 actuellement. Ensuite, revoir la limite d’âge des véhicules en circulation, actuellement fixée à 20 ans. «Tant que le véhicule passe la visite technique, pourquoi l’interdire à la circulation?», s’interroge Boulaq. Il rappelle que les autocars sont soumis à une visite technique obligatoire tous les six mois, un dispositif de contrôle déjà exigeant.
Autre solution évoquée mais restée lettre morte: l’importation d’autocars d’occasion de l’étranger, notamment d’Europe. Or, la législation marocaine interdit l’entrée de véhicules de plus de 5 ans d’âge, réduisant à néant cette alternative. «Un importateur tente actuellement de faire venir des autocars neufs en provenance de Chine, mais se heurte à de multiples obstacles administratifs et fiscaux», lit-on. Homologation complexe, droits de douane, TVA... Il risque d’abandonner le projet.
En parallèle du renouvellement du parc, le programme prévoit une prime pour l’équipement en dispositifs de sécurité (radars de recul, limitateurs de vitesse, GPS, etc.). Cette aide, comprise entre 30.000 et 50.000 dirhams selon la capacité des autocars, est soumise aux mêmes conditions restrictives que la prime à la casse. Les entreprises bénéficiaires doivent maintenir les équipements en état de marche et exploiter les véhicules concernés pendant au moins deux ans. Un engagement difficile à tenir, selon les opérateurs, tant que l’écosystème réglementaire reste rigide.







